Le caractère français de nos cégeps et universités est en danger

PQ et bilinguisme



La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) tient à exprimer son inquiétude devant l'apparition d'une certaine tendance qui menace le français comme langue de l'éducation dans les établissements d'enseignement supérieur.
Le cas le plus récent est celui du collège Édouard-Montpetit, où le conseil d'administration a pris la décision de demander au ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport d'offrir un programme de DEC en anglais en maintenance d'aéronefs. Cette décision du conseil d'administration, tout en étant une première pour un cégep de langue française, n'est malheureusement pas le premier cas du genre. Cela s'inscrit dans une réalité qui prend dangereusement forme au Québec et qui menace la langue française et, conséquemment, la culture québécoise.
Et ça ne s'arrête malheureusement pas là. La tendance est déjà bien présente dans le milieu universitaire, comme en font foi les faits suivants.
Pas plus tard que le 16 avril dernier, le conseil d'administration de l'Université du Québec en Outaouais (UQO) adoptait sa politique linguistique, conformément aux exigences imposées par la Charte de la langue française. Une vaste consultation interne et externe ayant pour but de statuer sur l'avenir des programmes en anglais développés à l'UQO depuis 1998 a précédé son adoption.
Si le conseil d'administration a décidé de mettre fin aux programmes en anglais, il a quand même autorisé le début d'une nouvelle cohorte pour 2007-08. D'ici là, l'université jongle avec l'idée de développer un programme trilingue, à l'instar d'autres universités québécoises, dont l'Université de Montréal, qui a déjà un tel programme. Est-il besoin d'indiquer que nous ne sommes toutefois pas contre l'idée de favoriser l'apprentissage d'une langue seconde et même d'une troisième langue dans le cadre de programmes postsecondaires dans la mesure où le français demeure la langue dans laquelle ces programmes sont offerts?
Fait intéressant, alors que le collège Édouard-Montpetit justifie son projet d'offrir un DEC en anglais pour supposément répondre exclusivement aux besoins de la population anglophone, l'expérience vécue à l'Université du Québec en Outaouais démontre le danger bien réel d'un détournement de cet objectif. En effet, des étudiants inscrits au programme français de l'UQO ont dû suivre en 2001 des cours en anglais parce que l'offre de cours était plus grande au programme anglais. De plus, en 2003, on constatait que 58 % des personnes inscrites à ces programmes étaient francophones.
De son côté, l'Université Laval offre, en anglais exclusivement, un programme de maîtrise spécialisée en management de systèmes logistiques, en collaboration avec l'École nationale des ponts et chaussées de Paris et l'École polytechnique fédérale de Lausanne, quoique ce programme existe en français... à Paris. Et ce n'est pas tout: l'Université de Sherbrooke veut elle aussi offrir des programmes en anglais à son campus de Longueuil.
Tout le monde n'y voit que du feu. Sous prétexte de faire dans l'innovation et l'ouverture sur le monde, on justifie l'abandon du français comme langue d'enseignement dans ces établissements de langue française. Mais en fait, à voir l'attitude de ces directions d'établissement, force est de constater que l'identité culturelle a un prix sur le marché et que certains administrateurs se montrent de plus en plus prêts à la monnayer pour compenser le sous-financement chronique avec lequel ils doivent malheureusement composer.
Urgence d'agir
Les faits qui précèdent ne laissent place à aucun doute. Une dangereuse tendance est en train d'apparaître qui menace le statut français des établissements d'enseignement supérieur au Québec. Les cas qui se présentent sont déjà suffisamment nombreux pour qu'on sonne l'alarme.
Depuis le rapport Larose, paru en 2001, aucune analyse exhaustive de la situation et de l'avenir de la langue française au Québec n'a été réalisée. Au rythme où vont les choses, le gouvernement ne peut pas rester indifférent devant les sérieuses conséquences que risque d'avoir le développement de programmes en anglais dans des établissements d'enseignement de langue française.
Ce nouveau phénomène va complètement à l'encontre de la Charte de la langue française, qui oblige les établissements d'enseignement supérieur à se doter d'une politique relative à l'emploi et à la qualité de la langue française. Le gouvernement dispose donc de toute la légitimité nécessaire pour intervenir et obliger ces établissements délinquants à tout mettre en oeuvre afin d'assurer la protection et la promotion de la langue française ainsi qu'à renoncer à offrir des programmes en anglais qui entrent en contradiction avec leur propre mission éducative.
Une culture et une langue qui n'ont pas de prix
Certes, le sous-financement chronique des cégeps et des universités peut expliquer partiellement cette tentation de recourir à des programmes en anglais, mais il ne peut en aucun cas la légitimer. Parce que nous croyons que la culture québécoise et la langue française ne sont pas monnayables, parce que nous croyons que cette importante question de la langue d'enseignement dans les établissements de langue française ne doit pas être laissée à la seule discrétion de chacun de ces établissements, nous pressons le gouvernement d'agir afin de préserver la langue française et la culture québécoise, notre héritage commun.
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Réjean Parent, Président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)


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