Le bilinguisme pas assez présent selon les anglos

Cf6f1288d60018e7fe19120cf8ec18b1

Ce ne sont pas nos revendications qui posent problème aux Canadiens anglais, mais notre seule existence

Les anglophones veulent plus d’affiches bilingues et un accueil dans les deux langues au Québec, selon un sondage Léger. Certains se sont donné la mission de convaincre les commerçants d’ajouter l’anglais à leurs enseignes.


« J’ai mon voyage de toutes ces stupidités de mesurage d’affiches. Après 40 ans, ça suffit », s’indigne Ruth Kovac, conseillère municipale à Côte Saint-Luc.


« Nous sommes fatigués que l’anglais soit traité comme une maladie à éradiquer », ajoute l’avocat montréalais Harold Staviss.


Comme eux, plus de la moitié des anglophones du Québec voudraient voir plus d’affiches sur lesquelles le français et l’anglais se côtoient. La même proportion souhaiterait un assouplissement de la loi 101, qui impose notamment le français dans le monde du travail.


Anglais ignoré


Selon Harold Staviss, trop d’entreprises ignorent que l’anglais peut aussi apparaître sur les affiches à l’intérieur des commerces tout en respectant la loi 101.


L’avocat se fait un devoir de commenter sur leurs pages Facebook et de lancer des pétitions afin de les convaincre d’ajouter l’anglais à leurs menus et pancartes.


Certaines entreprises emboîtent le pas. Subway laisse maintenant le choix à ses franchisés d’avoir des affiches bilingues ou en français seulement, donne-t-il comme exemple. Subway n’a toutefois pas voulu confirmer cette information.


Important Bonjour, hi


M. Staviss souligne que les francophones doivent pouvoir être servis en français. « Ceux qui ne parlent pas français devraient avoir honte. Ils n’ont pas d’excuse. »


Mais dans les secteurs où les anglophones sont nombreux, le bilinguisme devrait être présent, estime-t-il. Les listes d’ingrédients unilingues sur les aliments en épicerie posent problème pour les personnes allergiques. Et les camionneurs américains peinent à comprendre nos enseignes sur la route, illustre-t-il.


Une majorité d’anglophones du Québec croit que le français n’a plus besoin d’être protégé comme par le passé, révèle le sondage.


En revanche, la plupart des anglos interrogés estiment comme M. Staviss que le bilinguisme est une source de richesse, une valeur qu’il faut défendre.


Ils ont été outrés lorsque des politiciens ont critiqué en novembre dernier l’expression « Bonjour, hi» utilisée pour accueillir les clients dans bon nombre de commerces montréalais. Près des trois-quarts des anglos disent apprécier cette formule.


Plusieurs soupçonnent que la controverse risque de faire mal au Parti libéral du Québec lors des prochaines élections.


« Ridicule »


« C’est tellement idiot. Dire aux gens comment accueillir leurs clients, c’est inacceptable. Nous avons l’air ridicules », s’exclame Ruth Kovac.


La Ville de Côte Saint-Luc a d’ailleurs adopté une résolution pour se déclarer « fière communauté «bonjour, hi » en réaction à la controverse.


« J’aime parler français. Je le parle le plus possible. Mais je ne suis pas fier de vivre au Québec. J’en serais fier si on valorisait vraiment le bilinguisme », conclut M. Staviss.



Ils veulent que leur langue soit plus présente



Les anglos du Québec estiment majoritairement que leurs droits ne sont pas défendus, selon un sondage Léger effectué après le débat entourant le « Bonjour, hi ». Ils estiment en majorité que l’anglais n’est pas assez présent dans la province.


LES ANGLOS SUR LA LANGUE D’AFFICHAGE AU QUÉBEC


Quand vous pensez à la langue d’affichage au Québec, est-ce que vous aimeriez voir plus d’affiches bilingues (français/anglais), autant d’affiches bilingues (français/anglais), ou moins d’affiches bilingues (français/anglais) ?



  • Plus : 64 %

  • Autant : 28 %

  • Moins : 5 %

  • Ne sait pas/refus : 3 %


SUR LA CHARTE DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOI 101)


Croyez-vous que la Charte de la langue française (loi 101) doit, 40 ans après son adoption, être...



  • Renforcée : 6 %

  • Laissée telle quelle : 22 %

  • Assouplie : 64 %

  • Ne sait pas/refus : 8 %


OPINION À L’ÉGARD DES COMMUNICATIONS BILINGUES DANS LES COMMERCES


Lorsqu’on s’adresse à vous de façon bilingue (Bonjour, hi), est-ce que cela vous plaît ou est-ce que cela vous déplaît ?



  • Cela me plaît : 70 %

  • On ne s’adresse jamais à moi de cette façon : 21 %

  • Cela me déplaît : 8 %


SUR DIVERSES RÉALITÉS TOUCHANT LA LANGUE


Êtes-vous en accord : Le français devait être protégé dans les années 1970, mais il n’a plus besoin de l’être aujourd’hui



  • En accord : 66 %

  • En désaccord : 23 %

  • Ne sait pas/refus : 11 %


SUR LA DÉFENSE DES DROITS DES ANGLOPHONES DU QUÉBEC


Selon vous, est-ce que les droits des anglophones du Québec sont bien défendus actuellement au Québec ?



  • Non : 62 %

  • Oui : 22 %

  • Ne sait pas/refus : 16 %




Méthodologie : Sondage Web réalisé du 5 au 9 janvier 2018 auprès de 504 résident(e)s Québécois, âgé(e)s de 18 ans ou plus dont la langue maternelle ou la langue d’usage est l’anglais. Afin de rendre l’échantillon représentatif de l’ensemble de la population à l’étude, les résultats ont été pondérés selon la population anglophone par la région, l’âge, le sexe, la langue maternelle et la langue parlée à la maison. À titre comparatif, une étude représentative de 504 répondants comporterait une marge d’erreur globale de + ou - 4,4 %.



Qu’est-ce que la loi 101 ?



Près des deux tiers des répondants au sondage Léger souhaitent que la loi 101 soit assouplie, plus de 40 ans après sa mise en place.


Une proportion semblable de répondants estime que le français n’a plus besoin d’être protégé comme il l’était dans les années 1970.


La Charte de la langue française (aussi appelée loi 101) est adoptée le 26 août 1977. Le Parti québécois de René Lévesque est alors au pouvoir.


Elle fait du français la langue officielle du Québec. Le français devient la langue officielle de la justice, de l’administration et des organismes parapublics. Elle est également la langue d’affichage et d’enseignement, sous certaines exceptions.


Par exemple, l’affichage public et la publicité commerciale doivent se faire en français. Mais elles peuvent aussi se faire à la fois en français et dans une autre langue, à condition que le texte rédigé en français ait un impact visuel beaucoup plus important que le texte rédigé dans l’autre langue*.



Quelques controverses



Le « pastagate » - 2013


Le populaire restaurant Buonanotte du boulevard Saint-Laurent, à Montréal, reçoit une lettre de l’Office québécois de la langue française lui reprochant notamment l’utilisation du mot « pasta » dans son menu, ainsi que d’autres mots pour décrire des plats italiens, comme « insalata » ou « calamari ». L’organisme va finalement reconnaître qu’il s’agit d’un excès de zèle.


Sugar Sammy - 2014


L’humoriste crée la polémique avec une campagne de publicité audacieuse. Sur une affiche dans le métro, il indique : « For Christmas, I’d like a complaint from the Office de la langue française ». La plainte est venue rapidement et l’histoire a fait le tour du Québec. Des bandes noires ont ensuite recouvert la portion en anglais du message.


Le nouveau CHUM - 2015


Le consortium responsable de la construction du nouveau Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) s’est retrouvé à plusieurs reprises sur la sellette pour l’utilisation répandue de l’anglais, et même de l’espagnol, dans les locaux de la direction. Une manifestation a même eu lieu devant le chantier pour dénoncer la situation.