La défense du français comparée à l’invasion russe

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L’hypocrisie multiculturaliste


Il y a des moments révélateurs dans la vie d’un pays. Le Canada, patrie mondiale du multiculturalisme, est censé être un prototype de tolérance entre la majorité et différentes minorités.


Toutefois, quand la minorité nationale québécoise décide d’agir pour préserver sa langue, défendre sa culture ou encore mettre de l’avant sa vision de la société, comme avec la laïcité, soudainement la tolérance s’évanouit. On voit alors ce que pensent vraiment de nous plusieurs membres de la majorité canadienne-anglaise. Les Québécois sont traînés dans la boue, conspués, décrits comme des êtres vils, des nazis, des racistes et j’en passe.


C’est exactement ce que vient de faire Marlene Jennings, la présidente du Quebec Community Groups Network (QCGN), un lobby anglophone financé en partie par Ottawa. L’intéressée a fait un parallèle sur Twitter entre la brutale invasion de l’Ukraine par la Russie et le projet de loi 96. Celui-ci vise à défendre le français au Québec et à nous faire reconnaître comme nation dans la constitution.


Selon Jennings, il y aurait une contradiction entre le fait que François Legault exprime le soutien du peuple québécois à l’Ukraine alors qu’avec la loi 96 il veut «suspendre tous les droits et libertés de tous les Québécois». Attaquée pour ses propos, elle a persisté et signé. Sa déclaration, qui revient à dire que le Québec se transforme en dictature, est «valide et raisonnable», suivant ce qu’elle a répondu à ses détracteurs.








Parlant de respect du droit, notons que, lorsque Marlene Jennings était la tutrice de la Commission scolaire English-Montréal, en 2019, la commission a déclaré qu’elle violerait la loi 21 en refusant de l’appliquer. L’année suivante, la English-Montréal a effectivement violé la loi en acceptant des fonds du Programme de contestation judiciaire pour contester la Loi sur la laïcité de l’État. Cet organisme fédéral a pour mission, entre autres, de verser de l’argent aux groupes qui combattent en cour les lois identitaires québécoises, comme la loi 101 et la loi 21, et ce, en vertu d’une charte qui nous a été imposée. Or la commission scolaire n’avait pas le droit de recevoir des fonds fédéraux sans l’approbation du gouvernement québécois, ce qu’elle n’avait pas. J’avais dénoncé l’affaire à l’époque et la English-Montréal a finalement dû faire marche arrière.


Tout ça pour dire que madame Jennings est drôlement mal placée pour accuser le Québec de ne pas respecter le droit. Elle pourra toutefois se consoler bientôt de la déconvenue essuyée en 2020 quand elle dirigeait la English-Montréal. Il est écrit dans le ciel qu’Ottawa va arroser d’argent le QCGN pour aller en cour contre la loi 96. Trudeau le fera tout en jurant qu’il ne se mêle pas de ce dossier et en affirmant du même souffle qu’il agit pour la sauvegarde du français au Québec.


C’est ça, le Canada. Vous avez le droit de «basher» la minorité nationale québécoise sans la moindre gêne. Les fédéraux vous donneront de l’argent pour le faire et, en prime, ils vous diront le plus sérieusement du monde qu’ils travaillent très fort pour défendre le Québec.



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Frédéric Bastien167 articles

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Titulaire d'un doctorat en relations internationales de l'Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, Frédéric Bastien se spécialise dans l'histoire et la politique internationale. Chargé de cours au département d'histoire de l'Université du Québec à Montréal, il est l'auteur de Relations particulières, la France face au Québec après de Gaulle et collabore avec plusieurs médias tels que l'Agence France Presse, L'actualité, Le Devoir et La Presse à titre de journaliste. Depuis 2004, il poursuit aussi des recherches sur le développement des relations internationales de la Ville de Montréal en plus d'être chercheur affilié à la Chaire Hector-Fabre en histoire du Québec.





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