La génération post-souverainiste

Pour Mario Dumont et l'ADQ, le résultat d'hier soir relève à proprement parler de l'exploit

ADQ - De l'identité à l'autonomisme - La souveraineté confuse



Tout le monde le sait : une élection historique, aux conséquences lourdes de sens pour l'avenir de notre système de partis et pour notre société, avec un taux de participation en nette progression qui rehausse notre confiance dans les institutions et la culture de la démocratie.
Tout le monde en parlera, et pendant longtemps. Pour Mario Dumont et l'ADQ, le résultat d'hier soir relève à proprement parler de l'exploit. Vu la disproportion des ressources, cet exploit dépasse largement les frontières du Québec. Essayons de commencer à comprendre tout cela.
La génération la plus nombreuse au Québec est faite de gens qui avaient entre 15 et 30 ans en 1968 lorsque René Lévesque fonda le PQ. Le rêve souverainiste a été l'élixir de leur jeunesse et l'idée-force de leur vie adulte. Ce rêve a plutôt mal vieilli et il paraît plus irréalisable que jamais au lendemain des élections du 26 mars.
Quand on appartient presque soi-même à cette génération, et quand on a voté Oui lors des référendums de 1980 et de 1995, on ne prend aucun plaisir à disserter sur l'étiolement de ce rêve. Parce que les membres de cette génération pèsent lourdement sur notre destin, je souhaite qu'ils écoutent le Québec qui a élevé l'ADQ au statut de grand parti politique.
Nouvelle génération
L'âme de l'ADQ se trouve du côté d'une génération née au temps de la Crise d'Octobre. Ces gens ont des noms, à commencer bien sûr par celui de Mario Dumont, mais il y en a d'autres, candidats d'hier et d'aujourd'hui, militants dans les instances du parti ou intervenants connus dans les débats de notre sphère publique : Marie-Chantal Pelletier, Eric Montigny, Suzy Larouche, Jean-Simon Venne, Sébastien Proulx, Marc-André Gravel, Patrick Robitaille, Marie Grégoire, Jean Nobert, puis celles et ceux qui se sont greffés à eux.
Ces gens et leur parti ont des rêves : un Québec juste et prospère à l'échelle nord-américaine, avec plus d'enfants mais moins de dettes, résolument autonome mais dans le Canada. C'est la génération post-souverainiste, nationaliste et éprise de mondialisation, technologiquement sophistiquée et hyper-moderne mais tout aussi heureuse d'exprimer sa fierté envers notre passé. Filles et fils de l'échec de Meech, ils estiment que la base de la reconnaissance passe par le respect de soi-même.
Sens des responsabilités, cap sur le long terme, fidélité première au Québec, héritage inter-générationnel, c'est l'ancrage éthique d'un humanisme conséquent à partir duquel l'ADQ post-souverainiste imagine des rêves pour notre XXIe siècle. S'affirmer sans se séparer, 25 ans après le coup de force constitutionnel de 1982, cela reste un défi.
Parce que l'étatisme doctrinaire et symétrique qui alimente la Loi fédérale sur la santé est un marqueur identitaire du nationalisme canadien face aux États-Unis, le rééquilibrage public-privé en santé, débloquant les moyens de nos rêves, sera un chantier périlleux. Incontestablement patriotique, la génération qui a fondé le PQ doit reconnaître que l'on peut rêver autrement et qu'il y a plusieurs avenirs possibles pour le Québec. Notre XXIe politique commence ce matin.
Laforest, Guy
Professeur de science politique à l'Université Laval, l'auteur a été président de l'ADQ et candidat lors des élections de 2003


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