Le monde à l'envers

ADQ - De l'identité à l'autonomisme - La souveraineté confuse



L'assermentation du nouveau gouvernement Charest, aujourd'hui, pourrait permettre de mettre fin à une sorte de confusion des genres qui s'est installée depuis le 26 mars. Pour faire court, disons que c'est le monde à l'envers - autant dans l'opinion publique que chez bien des élus, ce qui nous donne d'étranges quiproquos.
Pour faire court, disons qu'un peu tout le monde considère Mario Dumont comme le vainqueur de ces élections. Sauf qu'il n'est pas au pouvoir. Alors que Jean Charest se retrouve dans la position de celui qui a perdu. Mais c'est tout de même lui qui doit former un gouvernement.
On l'a vu encore en fin de semaine, il suffit que M. Dumont se prononce sur quelque dossier que ce soit - par exemple, cette déclaration somme tout anodine sur le besoin, un de ces jours, de corriger les erreurs du rapatriement de la Constitution en 1982 - pour que tout le monde lui réponde comme s'il était premier ministre. Y compris la "une" du très sérieux Globe and Mail !
Même Stéphane Dion, qui devrait pourtant savoir ce qu'est un chef de l'opposition, s'est senti obligé de lui répondre, tout comme, de façon indirecte, l'ancien ministre Marc Lalonde. Pourtant, ce n'est pas M. Dion qui parle pour le Québec en ces matières et le gouvernement ne croit pas qu'il faille rouvrir le dossier constitutionnel à ce moment-ci.
Il y a un grand risque pour M. Dumont dans le fait d'être vu comme le gagnant des élections sans être au pouvoir. Il y a une sorte de contrat implicite qui s'est noué entre Mario Dumont et les électeurs qui ont voté ADQ le mois dernier : celui de changer la politique et, en particulier, la polarisation libéraux contre péquistes.
Le seul ennui, c'est que M. Dumont n'est pas au pouvoir. Même dans un Parlement minoritaire, les pouvoirs du chef de l'opposition restent bien limités.
Pourtant, il faudra quand même que M. Dumont prouve autre chose que le fait, déjà avéré, qu'il est le "roi de la clip".
Un exercice difficile de mise en place d'un programme et d'une équipe de gouvernement qui va l'obliger à un devoir de cohérence et de rigueur dont il pouvait faire l'économie du temps où son parti n'était autre chose qu'un one-man-show.
Jean Charest, lui, va vivre le problème inverse et qui est bien plus dangereux pour lui, à long terme. M. Charest est le grand perdant des élections du 26 mars. Les deux tiers des électeurs ont voté contre lui et son parti a connu son pire résultat électoral depuis la Confédération.
Pourtant, c'est lui qui est à la tête du groupe parlementaire qui a le plus de députés et il assumera donc les fonctions de premier ministre. M. Charest et les libéraux n'abandonneront donc pas les avantages qui viennent avec le pouvoir : les entourages ministériels comme les limousines. Sans compter tous ceux qui s'arrachent les faveurs des décideurs.
C'est une arme à deux tranchants. Mieux vaut être au pouvoir que dans l'opposition, même pour montrer qu'on a appris sa leçon et qu'on ne gouvernera plus de façon aussi arrogante.
Mais, en même temps, quand on a conservé tous les avantages du pouvoir, il est bien facile de penser que tout va bien, qu'on n'a qu'à continuer comme avant et que les élections n'étaient, au fond, qu'un mauvais moment à passer.
C'est d'autant plus facile que, dans la gestion quotidienne, quand on s'occupe de la machine gouvernementale - et, aussi, que la machine s'occupe de nous - on ne sent guère qu'on est à la tête d'un gouvernement minoritaire. Il n'y a guère qu'à la période des questions et à l'Assemblée nationale qu'on se sentira vraiment en minorité. Ce n'est pas une très longue portion de la journée.
Le danger qui guette Jean Charest et les libéraux, c'est le business as usual.
Qu'après quelques beaux discours sur les leçons du 26 mars, la routine reprenne comme avant.


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