La Belgique sans gouvernement réel

Chronique de José Fontaine


Malgré les apparences, la Belgique n’a pas de gouvernement. Selon la formule d’un journaliste flamand, il y a bien des ministres, mais il n’y a pas de gouvernement.
C’est quand même un peu pénible de voir les ministres d’un gouvernement à durée déterminée – l’accord qui le met en place stipule sa dissolution le 23 mars – se pavaner à la télé sur divers objectifs qu’ils ont déjà trouvé (en quelques semaines!), absolument nécessaires: un plan de santé publique contre le cancer, la coopération renforcée avec le Congo etc.
Un gouvernement hypothéqué par de futures élections
Evidemment, la finalité de tout cela, ce sont les élections dans les Etats fédérés en 2009, soit un peu plus que 12 mois (et leurs résultats influencent le national puisque, en réalité, les élections ont lieu dans les trois Etats fédérés: Flandre, Wallonie, Bruxelles, et que les partis sont soit wallons et bruxellois, soit flamands et bruxellois, d’après la langue).
Normalement, ce gouvernement doit préparer le programme du... futur gouvernement. Tant sur le plan économique et social que sur le plan institutionnel. Sur ce dernier plan, on sent que Wallons et Flamands sont d’accord pour transférer de nouvelles compétences de l’Etat fédéral aux Etats fédérés.
Mais vu les difficultés d’une telle négociation qui implique des intérêts immenses, on se demande comment on va arriver à un accord en 57 jours. Il y a 22 personnes autour de la table pour négocier cet accord et parmi ces personnes des partis ou représentants de partis qui sont dans l’opposition.
L’inutile nostalgie wallonne
La mentalité de la plupart des dirigeants wallons s’améliore. Mais il faut avouer que ce que l’on entend dire parfois est pénible. Ainsi ce matin, j’entendais interviewer le président de la Ligue des droits de l’homme. Il a fallu que la première question qui lui soit posée porte sur le fait que cette Ligue était encore unitaire en 1978! Et ce président et la journaliste de se lamenter de ce que, dans un “petit pays”, on ait divisé cette organisation selon la langue. Si trente ans après, on se lamente encore, combien de temps la nostalgie va-t-elle durer?
Et que révèle cette nostalgie? Que dans tous les autres domaines où l’autonomie de chaque région a été acquise, beaucoup de gens la vivent comme un échec, comme quelque chose d’anormal!!! Les Wallons vivent comme anormales les institutions qu’ils ont. C’est assez catastrophique parce que, dans ces conditions, il y a chance que ces institutions fonctionnent mal.
C’est d’autant plus navrant que dans l’exemple que je citais, qui concerne une organisation de la société civile, tout a toujours été séparé en Belgique... Avant même que la Belgique n’existe. Au début du 17e siècle, les ordres religieux se sont déjà séparés dans ce qui correspond à la Belgique actuelle en deux parties ou deux provinces (celle des jésuites et celle des capucins, ordres religieux socialement tout à fait importants dans une Belgique bastion de la Contre-Réforme catholique).
Cependant, sur les difficultés de la formation d’un gouvernement fédéral – celui qui a été mis en place n’est en réalité pas tout à fait un gouvernement! - on commence quand même à ouvrir les yeux. Et selon mes informations, les régionalistes wallons se préparent à une grande offensive par rapport à l’opinion publique. Avec l’appui de grandes forces sociales organisées.
La monarchie fonctionne encore mais elle est obsolète
Il est vrai aussi de dire que, par exemple dans le domaine de l’historiographie et, en tout particulier sur Internet, les sites wallons, celui de l’Institut Destrée par exemple ou celui de l’Etat-région wallon, sont parmi les mieux faits. Si par exemple l’histoire de la Wallonie est peu connue des jeunes, pour l’histoire de Belgique, c’est encore pire, hormis la succession des rois sur le trône, ce qui est une manière de combler un vide et une inculture qui font peur par un symbole comme la monarchie, évidemment obsolète et d’autant plus que le Prince Héritier est considéré comme un incapable.
José Fontaine

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José Fontaine355 articles

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Né le 28/6/46 à Jemappes (Borinage, Wallonie). Docteur en philosophie pour une thèse intitulée "Le mal chez Rousseau et Kant" (Université catholique de Louvain, 1975), Professeur de philosophie et de sociologie (dans l'enseignement supérieur social à Namur et Mirwart) et directeur de la revue TOUDI (fondée en 1986), revue annuelle de 1987 à 1995 (huit numéros parus), puis mensuelle de 1997 à 2004, aujourd'hui trimestrielle (en tout 71 numéros parus). A paru aussi de 1992 à 1996 le mensuel République que j'ai également dirigé et qui a finalement fusionné avec TOUDI en 1997.

Esprit et insoumission ne font qu'un, et dès lors, j'essaye de dire avec Marie dans le "Magnificat", qui veut dire " impatience de la liberté": Mon âme magnifie le Seigneur, car il dépose les Puissants de leur trône. J'essaye...





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