Faible. Et je ne parle pas du gouvernement libéral de Jean Charest. Avec un taux d’insatisfaction dépassant les 70%, son opposition à une enquête publique sur la construction, son refus de convoquer Bellemare devant l’Assemblée pour qu’il explique ce qu’il sait sur le financement du PLQ, son refus de régler définitivement le problème des accommodements raisonnables, son incapacité à gérer le dossier du CHUM, les allégations dans le milieu des garderies et alouette, le gouvernement Charest s’en va nulle part. Mais la vraie faiblesse, face à un parti aussi usé par le pouvoir, ne provient-elle pas de l’opposition?
En effet, comment se fait-il qu’avec le bilan catastrophique du gouvernement actuel, le Parti Québécois stagne dans les sondages et soit incapable de s’affirmer comme étant une alternative crédible à Jean Charest? Le PLQ a perdu 5% d’intentions de vote, à 32%, mais le PQ est demeuré stable, lui, à 38%, tandis que Québec Solidaire gagnait 4%, à 10%. Pourquoi le PQ ne peut-il pas récupérer la majorité de mécontents du gouvernement actuel? Pourquoi le PLQ, malgré tous les scandales, demeure aussi puissant? Un mot: crédibilité.
Le Parti Québécois manque de crédibilité pour constituer une alternative crédible à Jean Charest. C’est-à-dire: les Québécois regardent le premier ministre qu’ils ont, veulent le remplacer, mais par qui, par quoi, se demandent-ils. Par Marois?
Ce qu’on reproche au PLQ, actuellement, on a pu le reprocher au PQ lorsqu’il était au pouvoir. Charest n’est pas à l’écoute de la population? Et Bouchard, lui, l’a-t-il été quand les infirmières étaient dans la rue en 1999? L’a-t-il été quand on a imposé des fusions municipales forcées à des citoyens qui n’en voulaient pas? Et le cafouillage du CHUM n’a-t-il pas été péquiste avant d’être libéral? Et l’affaire Michaud, où on a vu un premier ministre à genoux devant la minorité juive, ne pourrait-elle pas se comparer aux accommodements consentis par la ministre de l’éducation Courchesne aux écoles juives? Et la pusillanimité de Charest à colmater la brèche dans la loi 101 ouverte par la Cour suprême, qui a invalidé la loi 104, ne se compare-t-elle pas à un Lucien Bouchard affirmant qu’il ne pourrait plus se regarder dans le miroir si le PQ invalidait la loi 86, qui affaiblissait tout autant notre loi fondatrice?
Plus ça change, plus c’est pareil.
On peut comprendre que de nombreux jeunes militent actuellement au Parti Québécois. Ils manquent d’expérience politique, ils manquent du recul d’avoir souffert ce que constitue véritablement un Parti Québécois au pouvoir. Ils n’ont pas expérimenté les reculs importants aux niveaux social, identitaire et linguistique que le gouvernement de Bouchard, suivi par Landry, ont imposé au Québec. Ils n’ont pas connu les manifestations monstres contre un gouvernement péquiste insensible aux revendications des étudiants, des travailleurs, des citoyens. Ils n’ont pas subi ce gouvernement qui prenait en otage les souverainistes en se gavant de leur vote, au son de la mélodie de « conditions gagnantes » qui ne venaient jamais, et qui ensuite ne faisait rien pour la cause. Ils n’ont que peu connu ce gouvernement hautain, méprisant, condescendant, qui avait adopté une idéologie économique somme toute identique à celle du PLQ aujourd’hui… et à celle que le PQ de Pauline Marois espère proposer de nouveau!
Non, les citoyens ne sont pas dupes. Ils savent que sur le fond, le Parti Québécois et le Parti Libéral constituent deux facettes d’un même pouvoir, d’une même insensibilité face à la population, d’une même conviction que la population est malléable, qu’on peut lui faire bouffer n’importe quoi et qu’elle en redemandera.
Si on avait une véritable alternative à l’Assemblée, un parti ne portant pas sur ses épaules le poids des mauvaises décisions du passé, n’y aurait-il pas un engouement pour le changement? Regardons ce qui s’est produit aux États-Unis, en 2004. Après un premier mandat Bush catastrophique, n’a-t-il pas été réélu non pas parce qu’il était bon, mais parce que son opposant ne l’était pas assez? C’est cela qui risque de se produire, ici, avec le Parti Québécois de Pauline Marois. Le PLQ sera réélu non pas parce qu’il constitue un bon gouvernement, mais peut-être simplement parce qu’on préfère toujours un tyran qu’on connaît et qui s’assume à une sauveuse qui cache son jeu et son passé. Dit autrement: on ne veut pas changer quatre vingt-cinq sous pour une pièce d’un dollar.
Ce qu’il manque au PQ, en fin de compte, ce sont peut-être les idées, les valeurs. Les convictions. Le parti végète depuis des années, changeant d’opinions au gré des chefs et des sondages. Aucune stabilité d’idées, aucune solidité des convictions. On regarde Marois ou ses sbires critiquer le Parti Libéral, mais on ne voit que des opportunistes, des carriéristes qui critiquent pour critiquer et qui n’y croient plus vraiment. Ils ont adopté le petit catéchisme néolibéral et ils font le moins de vagues, se contentant de donner la réplique qu’on attend d’eux, et espèrent que le pouvoir tombera comme un fruit mûr.
Après l’usure du pouvoir, on se retrouve maintenant avec l’usure d’une opposition partageant la plupart des valeurs du parti au pouvoir mais qui espère seulement avoir sa chance, elle aussi, de gouverner avec tout autant de mépris que celui affiché par Jean Charest.
À quand du sang neuf? À quand un parti politique véritablement social-démocrate et combatif au niveau de la langue française et de l’identité? À quand un remplacement du vieux Parti Québécois, un parti devenu un véritable clone mollasson du PLQ?
Et si les militants, au lieu de gaspiller leur formidable énergie créatrice au PQ, ne s’organisaient-ils pas en-dehors de celui-ci, afin de véritablement jeter les bases d’un renouvellement du mouvement? Quand René Lévesque a quitté le Parti Libéral en 1967 pour créer le Mouvement Souveraineté-Association, il lui a fallu du courage. C’est peut-être de ce type de courage qu’auraient besoins les militants péquistes qui contribuent, en appuyant les politiques régressives et mollassonnes du PQ, à prendre tous les nationalistes et sociaux-démocrates en otage.
Quand le véhicule est rouillé, prend l’eau, et fait plus de bruit qu’il ne se déplace, il ne faut plus lui appliquer une petite potée pour masquer ses problèmes. Il faut l’envoyer au dépotoir et s’en approprier un nouveau.
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