Jongleries péquistes

Quels liens envisage-t-elle avec le reste du Canada? Voilà un sujet fondamental que le PQ élude malheureusement depuis plus de 20 ans.

Association, partenariat - où étiez-vous passé depuis 20 ans, M. Salvet?


Vous pensez que Broue est la pièce la plus présentée au Québec? Détrompez-vous. La plus souvent jouée est celle où l’on voit le PQ jongler avec les multiples stratégies susceptibles de mener les Québécois à la souveraineté.

Nous avons eu droit à une nouvelle adaptation du scénario la semaine dernière. La chef du Parti québécois, Pauline Marois, a soutenu que son parti posera des «gestes de souveraineté» avant la tenue d’un éventuel troisième référendum — s’il gagne les prochaines élections, bien sûr.
Nous avions déjà eu l’étapisme de René Lévesque et de Claude Morin, l’éternel débat sur l’élection référendaire, le «si-vous-votez-pour-nous-vous-aurez-un-référendum-sur-la-souveraineté» de Jacques Parizeau, les «conditions gagnantes» de Lucien Bouchard, le référendum «le plus tôt possible» de Bernard Landry et d’André Boisclair, ainsi que le récurrent crêpage de chignon autour des gestes de «rupture».
Voici venu le temps des gestes d’affirmation, des gestes de «souveraineté» ou, si vous préférez, des «gestes de gouvernance nationale pour faire avancer le Québec». Ces jours-ci, Mme Marois utilise indistinctement l’une ou l’autre de ces expressions.
Est-on dans le même registre? Sur le fond, non. C’est pourquoi la réaction des libéraux et des adéquistes est démesurée, caricaturale même. Le ministre Benoît Pelletier a sombré dans le ridicule en parlant de «chaos».
En soi, Mme Marois est plus dans le registre nationaliste que souverainiste. Elle parle de l’adoption d’une Constitution, de la création d’une citoyenneté québécoise, du renforcement du statut de la langue française et du rapatriement de pouvoirs.
Même si nous n’en voyons pas l’utilité, les adéquistes veulent aussi une Constitution québécoise. Récemment, le libéral Benoît Pelletier a lui-même fait savoir qu’il voyait cette idée d’un bon œil… Rien d’extraordinaire, donc.
Le rapatriement de pouvoirs fait par ailleurs partie de la dynamique canadienne. Les transferts de prérogative ont toujours existé. Pensons aux politiques de main-d’œuvre ou aux congés parentaux.
Non, il n’y a pas de quoi fouetter un chat. D’autant que le prochain gouvernement sera vraisemblablement minoritaire. Si le PQ devait remporter le prochain scrutin, aucune de ses propositions ne pourrait être adoptée sans l’appui d’un des partis d’opposition.
En fait, le problème ne concerne pas le fond. Il découle du double langage de Mme Marois. Son discours manque de franchise.
Ainsi, pour éviter de se mettre à dos la frange souverainiste la plus déterminée au sein du PQ, Pauline Marois se sent obligée d’ajouter — mais comme en aparté — que son objectif est de voir le Québec s’affirmer pour mieux pouvoir faire la souveraineté… Elle a un message pour les Québécois en général et un autre, plus spécifique, pour les militants.
Devant ce constat, plusieurs sont en droit de se demander si Pauline Marois ne cherche pas en réalité à provoquer des querelles avec Ottawa pour «raviver la flamme» souverainiste (pour employer une expression de Lucien Bouchard).
À la prochaine campagne électorale, Mme Marois devra choisir la clarté. Elle devra répondre à la question suivante — même si elle la juge hypothétique :
Si des sondages indiquaient une soudaine montée de l’appui à la souveraineté sous un gouvernement du PQ, en profiterait-elle pour déclencher un référendum — même en n’ayant pas mené campagne sur cette possibilité? Oui, non ou peut-être?
Au fait, à quel type de souveraineté songe-t-elle? Dans un monde interdépendant, les souverainetés sont à géométrie variable. Elles sont différentes d’un pays à l’autre.
Quels liens envisage-t-elle avec le reste du Canada? Voilà un sujet fondamental que le PQ élude malheureusement depuis plus de 20 ans.
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