Dites je le jure

CDPQ-Subprimes - qui sont les coupables?

Pour le commun des mortels, qui a trop souvent l'impression qu'on joue avec son argent comme dans une partie de Monopoly, il est certainement choquant de voir Henri-Paul Rousseau empocher une prime de 350 000 $, sans parler d'une intéressante pension, après que la Caisse de dépôt ait annoncé des pertes de 40 milliards.
M. Rousseau, qui en a les moyens, ferait certainement un beau geste en y renonçant, même s'il a parfaitement le droit d'exiger que les conditions auxquelles il avait été embauché par le gouvernement Landry en 2002 soient respectées.
Dans son allocution de lundi dernier devant les membres de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, il a dit comprendre l'émoi que les résultats désastreux de la Caisse ont semé chez les Québécois. Joindre le geste à la parole témoignerait concrètement de son empathie.
Les députés péquistes seraient cependant bien avisés de ne pas s'aventurer sur ce terrain glissant, comme deux d'entre eux s'y sont imprudemment risqués mardi. À ce compte, certains pourraient exiger que l'ancien p.-d.g. de la Société générale de financement (SGF), Claude Blanchet, rende aussi l'indemnité de 250 000 $ qu'il avait touchée malgré des pertes de 700 millions.
Pauline Marois a certainement pensé à ce possible rapprochement en considérant la question comme accessoire. Elle a cependant raison: l'heure n'est pas aux faux débats. L'important est de s'assurer qu'une commission parlementaire fasse, dans la mesure du possible, la lumière sur ce qui s'est réellement passé à la Caisse.
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Il est injustifiable qu'aucun membre du gouvernement ne comparaisse devant une commission parlementaire. En avril 2008, la ministre des Relations internationales, Monique Gagnon-Tremblay, et le premier ministre Charest lui-même avaient témoigné relativement au congédiement du délégué général du Québec à New York, Bruno Fortier.
Si leur comparution était apparue justifiée dans le cas d'une affaire aussi triviale, elle l'est d'autant plus maintenant qu'il s'agit de déterminer ce qui a entraîné un désastre financier dont on ne mesure pas toutes les conséquences. Loin d'avoir permis de tirer l'affaire au clair, l'intervention d'Henri-Paul Rousseau devant la Chambre de Commerce a plutôt donné un aperçu de ce qu'on ignore encore.
Il faut dire qu'à l'époque, M. Charest devait s'accommoder d'un «Parlement de cohabitation», dont il ne cessait d'ailleurs de vanter les mérites. Maintenant qu'il dirige à nouveau un «gouvernement de stabilité», l'imputabilité ne lui apparaît plus aussi désirable.
Il est vrai que la comparution de Monique Jérôme-Forget devant une commission parlementaire donnerait une dimension politique au dossier. Précisément, la gouvernance de la Caisse et la définition de son mandat sont des questions essentiellement politiques.
À défaut d'être animé par la vertu démocratique, le premier ministre devrait comprendre qu'il a tout intérêt à crever l'abcès, quitte à passer un mauvais moment, plutôt que d'étirer l'étalage de sa mauvaise foi pendant de longues semaines. Quand ils prennent valeur de symbole, certains dossiers s'incrustent dans les esprits. Chaque jour qui passe renforce l'impression que son gouvernement se complaît dans le mensonge depuis des mois.
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Au cours des dernières années, M. Charest a eu beaucoup de succès en imposant une image négative de ses adversaires. André Boisclair a été dépeint comme un «immature» et un «irresponsable». Aux yeux d'une bonne partie de l'opinion publique, Mario Dumont est réellement devenu une «girouette».
Il se fait maintenant servir la même médecine. Hier, il était assez savoureux de voir la vice-première ministre, Nathalie Normandeau, s'indigner du ton adopté par Pauline Marois dans sa réplique au discours inaugural, quand elle a évoqué la légende des trois singes de la bêtise.
En réalité, si le premier ministre avait si bien réussi à définir ses adversaires, c'est qu'ils avaient prêté le flanc à ses attaques. Si Mme Marois peut le traiter de menteur aussi impunément, c'est que personne ne croit qu'il a dit la vérité, qu'il s'agisse du déficit, de la péréquation ou de la Caisse de dépôt.
Si besoin était, la période de questions d'hier à l'Assemblée nationale a démontré qu'elle est le cadre le moins approprié pour aller au fond des choses. Un politicien le moindrement expérimenté n'a aucune difficulté à noyer le poisson, même si cela peut parfois manquer un peu d'élégance.
Au pire, si elle se retrouvait dans les câbles , Monique Jérôme-Forget pourrait toujours compter sur le leader du gouvernement, Jacques Dupuis, pour transformer le débat en foire d'empoigne. Il y excelle. Quant à l'interpellation de deux heures que propose le gouvernement, la formule est si contraignante qu'il en résulterait une série de monologues qui ne mèneraient nulle part.
Les péquistes sont convaincus que la ministre des Finances ne veut pas se retrouver dans une situation qui la forcerait à se parjurer. Pourtant, il n'y a pas si longtemps, elle se disait prête à jurer sur la tête de ses petits-enfants. Alors pourquoi pas sur la Bible? À moins que quelqu'un d'autre ne craigne qu'elle dise tout bêtement la vérité. C'est qu'elle en serait bien capable.
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mdavid@ledevoir.com


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