Par Jacinthe TREMBLAY
Changement important dans l'approche des partenariats public-privé (PPP) québécois en santé: le centre d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) qui desservira les malades du Centre de la santé et des services sociaux (CSS) Champlain, en Montérégie, demeurera la propriété du partenaire privé au terme de l'entente de 25 ans le liant aux autorités publiques. Ce modèle vaudra pour tous les futurs établissements du genre, a appris Le Devoir.
Cette modification de la formule adoptée à ce jour par Québec apparaît dans une courte phrase de la page 2 de l'extrait de l'appel de propositions diffusé dans le site Internet de Partenariats public-privé Québec (PPP Québec): «Le soumissionnaire sélectionné assumera les responsabilités de concevoir, de construire, de financer, d'offrir la prestation des soins et services, d'entretenir et de maintenir l'installation. Il est propriétaire de l'installation et il n'y a pas de rétrocession au terme de l'entente de partenariat.» L'information était absente du communiqué de presse conjoint du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et de PPP Québec le 25 juin, jour du dévoilement de l'appel de propositions aux quatre soumissionnaires dans la course. Les intentions annoncées et défendues jusqu'à maintenant par le Conseil du trésor, les ministères concernés par des PPP ainsi que PPP Québec étaient de permettre la remise à l'État d'infrastructures et d'édifices publics en parfaite condition au terme des ententes. C'est d'ailleurs cette approche qui prévaut dans le cas du pont de l'autoroute 25 et qui demeure toujours la formule retenue pour les deux hôpitaux universitaires montréalais.
Moins cher, moins risqué
«C'est vrai que c'est une nouveauté. Cette option a été retenue parce que la location est moins coûteuse que la rétrocession de l'établissement en fin de contrat», a confirmé le porte-parole de cet organisme, Hugo Delanay. La porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux, Hélène Gingras, a pour sa part indiqué au Devoir que «la location a été retenue parce qu'il est impossible de prévoir si l'État aura encore besoin de ces établissements dans 25 ans». À titre d'exemple, elle a mentionné les progrès possibles dans la recherche d'un outil de prévention efficace de la maladie d'Alzheimer qui viendrait réduire les besoins pour ce type de service.
L'ajout en mode PPP de 200 nouvelles places sur le territoire du CSSS Champlain est le projet que le ministère et PPP Québec entendent utiliser comme modèle pour l'ajout de 1000 à 1200 places en CHSLD prévues au plan d'action gouvernemental d'hébergement et de soins de longue durée pour les personnes en lourde perte d'autonomie. «Le gouvernement a décidé de réaliser en PPP toutes les constructions neuves d'établissements de ce type et de confier à la Corporation hébergement Québec les agrandissements et les rénovations», a précisé Mme Gingras. La CHQ est le bras immobilier du MSSS.
Cette approche découlerait, selon Mme Gingras, des résultats d'une étude menée par Québec sur le projet du CHSLD du CSSS Champlain par le consultant Guy Choinière dans la foulée de la politique cadre des PPP de juin 2004. Cet ancien de la Banque de développement du Canada (BDC), de la Caisse de dépôt et placement du Québec et de la Caisse centrale Desjardins est, depuis 2006, vice-président de PPP Québec. Diplômé de HEC Montréal, M. Choinière a également oeuvré chez SNC-Lavalin et chez Bombardier Transport avant d'être responsable du dossier du CHSLD ainsi que de l'Adresse symphonique au sein de PPP Québec. «Les résultats de cette étude sont valables pour les autres projets de CHSLD à venir», a noté Mme Gingras. Le processus en vigueur à PPP Québec prévoit que l'examen de 2004 de M. Choinière sera rendu public après la signature de l'entente de partenariat, prévue en mars 2009, de ce CHSLD vitrine.
À court terme, cette étude ainsi que le processus de sélection du partenaire et ses critères seront la base qui sera utilisée pour la réalisation de trois autres nouveaux CHSLD de 66 places chacun annoncés par Québec en novembre 2007 pour les secteurs de Granby, de Saint-Jean-sur-Richelieu et de Châteauguay, également en Montérégie. Mme Gingras a aussi fait savoir au Devoir que «l'ajout de 100 places supplémentaires dans la couronne de Montréal sera annoncé sous peu», sans en préciser le lieu.
Si c'est dans l'appel de propositions que la décision de Québec d'opter pour la location des futurs CHLSD est mentionnée pour la première fois, une autre nouveauté introduite dans ce PPP santé était déjà connue depuis l'an dernier: les soins cliniques seront entièrement sous la responsabilité du partenaire privé.
En mai 2004, dans le document Briller parmi les meilleurs, qui résumait le plan de modernisation de l'État du gouvernement Charest orchestré par Monique Jérôme-Forget, présidente du Conseil du trésor, on pouvait pourtant lire, concernant la rénovation et le remplacement de places dans les CHSLD: «Le projet prendrait la forme d'une entente impliquant la rénovation ou le remplacement des infrastructures, le financement des investissements requis et l'exploitation des soins non cliniques pendant une durée de 30 ans.» En entrevue au terme de sa ronde de deux jours à Montréal, il y a une semaine, le Dr Yves Bolduc, ministre récent de la Santé et des Services sociaux, avait répondu à une question du Devoir portant sur l'inclusion des soins dans la responsabilité du partenaire privé. «Pour moi, les PPP sont un outil pour financer des infrastructures. Je ne connais pas encore ce genre de PPP en santé qui inclut les soins. Je ne me suis pas fait une tête là-dessus», avait-il déclaré.
Des PPP de plus en plus privés
Les CHSLD construits en partenariat ne seront pas cédés au gouvernement
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