Deuxième visite de Stephen Harper au Québec, hier, depuis qu'il est premier ministre. De passage à Montréal, il a de nouveau vanté les mérites du fédéralisme d'ouverture qu'il prône envers le Québec, ouverture dont le degré demeure toujours à définir.
Sympathique envers le Québec, le premier ministre conservateur l'est, il n'y a pas de doute. Qu'il le soit par conviction ou par opportunisme électoral demeure sujet à débat, mais il faut tout de même reconnaître que son attitude tranche avec celle de ses prédécesseurs libéraux. Le fait qu'il commence presque toutes ses interventions en français illustre le respect qu'il porte à l'équilibre des langues officielles au Canada.
Tout appréciée que soit la francophilie de M. Harper, l'ouverture promise envers le Québec ne saurait demeurer crédible aux yeux des Québécois s'il n'arrive pas à la concrétiser rapidement dans des propositions qui soient plus que des slogans électoraux. En ce sens, le discours prononcé à la Chambre de commerce de Montréal hier était décevant. Il ne nous aura rien appris de plus que ce qu'il avait exposé en campagne électorale. Certes, son gouvernement n'ayant pas encore trois mois, on peut l'excuser. On serait toutefois en droit de s'attendre à ce qu'il élabore, dans son prochain budget, sur la façon dont il entend enrayer le déséquilibre fiscal, comme il s'y est engagé.
L'intention qui anime Stephen Harper est simple. En instaurant une pratique du fédéralisme respectueuse des compétences respectives des deux ordres de gouvernement qu'on trouve au Canada, il veut briser la polarisation qui, au Québec, oppose fédéralistes et souverainistes. On peut le croire sincère puisque cela a toujours fait partie du credo conservateur. Lorsqu'il était premier ministre, Brian Mulroney avait réussi à détendre l'atmosphère en professant ce même type d'ouverture à l'égard des provinces en général et du Québec en particulier sans pour autant réussir à imposer durablement un nouveau mode de relations entre Ottawa et les provinces.
Les propositions que M. Harper met en avant permettront, dans la mesure où elles se réalisent, de créer un climat de collaboration plutôt que d'affrontement. La promesse la plus rapide à réaliser sera celle portant sur la participation du Québec aux délibérations de l'UNESCO. Une entente sur cette question, même si elle n'aura vraisemblablement pas l'ampleur souhaitée par le Québec, permettra à son gouvernement d'illustrer sa volonté de changer les choses.
Pour que les pratiques du fédéralisme canadien «changent pour vrai», comme le disait son slogan de campagne électorale, Stephen Harper devra non pas les changer mais les transformer durablement. Il n'y parviendra pas s'il ne s'attaque pas à la source même des tensions qui perdurent entre les deux ordres de gouvernement. Celles-ci proviennent du pouvoir de dépenser attribué à Ottawa par la Constitution et qui, selon ses propres mots, «est une menace sérieuse pour l'avenir de notre fédération».
Sans minimiser l'importance de la question du déséquilibre fiscal, c'est en limitant ce pouvoir de dépenser que le gouvernement conservateur pourrait empêcher qu'un «fédéralisme dominateur» refasse surface. La seule façon sûre d'y arriver serait par un amendement constitutionnel, ce qui n'est pas à portée de main aujourd'hui. S'il est sérieux, Stephen Harper devrait imposer à son gouvernement un encadrement de ce pouvoir de dépenser par une loi inspirée de feu l'accord du Lac-Meech, qui abordait cette question. Ce serait passer véritablement de la parole aux actes.
bdescoteaux@ledevoir.ca
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