De la guenille

Le peuple québécois somnole dangereusement et risque de contribuer à l’élection d’un gouvernement conservateur majoritaire.

Chronique de Patrice Boileau

Elle aura beau hurler qu’elle ne cherchait pas à ratatiner l’État qu’elle représente, reste que l’intervention de la ministre de l’Éducation, Michelle Courchesne, lors des Jeux Olympiques, a parfaitement résumé la pensée fédéraliste qu’elle fait sienne.
Aussitôt qu’un événement est susceptible de souligner la différence québécoise ou de la favoriser au détriment de l’unité canadienne, les fédéralistes québécois s’empressent toujours d’en évacuer tout sens politique.
On l’a vu dans le dossier du 400e anniversaire de la ville de Québec, tout comme durant la grande fête sportive organisée par la Chine. Les arguments qui sont brandis s’avèrent toujours les mêmes : toujours aussi navrants intellectuellement. Prétendre en effet qu’il ne faut pas encourager de réflexion politique dans ces deux exemples, sous prétexte que l’objectif premier d’une fête est de se réjouir, est d’un ridicule consommé. D’autant plus que les fédéralistes ne se sont absolument pas privés de faire l’éloge sans retenue de leur pays, tout au long de ces événements! Comment les Québécois ont-ils pu accepter d’avaler pareille couleuvre?
Dès qu’il est question de montrer le bout d’une fleur de lys, on accuse les auteurs de cette initiative de défendre une idée farfelue de pays ou de nation bidon. De voir ces derniers se tenir debout dérange. Cela perturbe des gens habitués à s’écraser devant le gouvernement canadien. Des complexés qui tremblent à l’idée de contrarier Ottawa en voulant poser des gestes susceptibles de préserver l’identité québécoise. En évoquant une « chicane de guenille », la ministre Courchesne a tout simplement décrit ce qu’elle pense d’elle et des siens, hors de la tutelle canadian. Sans celle-ci pour s’occuper de nos affaires; nous ne sommes rien! Notre esprit n’a pas le dynamisme nécessaire pour veiller adéquatement à toutes les responsabilités nécessaires pour assurer l’épanouissement de notre nation, comme les autres peuvent le faire. De la guenille, voilà ce que nous avons entre les oreilles! Il faut cacher cet handicap collectif qui gêne la ministre et ses collègues fédéralistes. Attirer l’attention sur le peuple québécois, le rendre véritablement distinct en lui donnant l’indépendance, exposera davantage sa mollesse et son impotence! Dilué dans la fédération canadienne, forcé d’obéir aux directives d’Ottawa, il est néanmoins possible de cacher ce peuple de guenille. Voilà pourquoi la ministre Courchesne, ainsi que son patron, s’accrochent désespérément à leur option politique.
Il n’en fallait pas plus pour que le député péquiste de la circonscription de Rousseau, François Legault, tombe dans le piège. Assurément, l’homme ne croit pas que les Québécois sont des guenilles. Néanmoins, sa récente intervention publique témoigne qu’il croit que les siens n’ont pas confiance en eux, ni en ceux qui les représentent à l’Assemblée nationale. Voilà une déclaration très maladroite puisque le Parti québécois auquel il appartient est indépendantiste. Le PQ croit que le Québec possède tout ce qu’il faut pour faire lui-même sa place dans le monde et lui dire qu’il existe. Proposer de mettre en veilleuse cet objectif qui est au cœur de cette formation politique, n’a fait qu’accroître le scepticisme des Québécois, celui qu’il dit vouloir combattre, de manière à rétablir le lien de confiance qui est affaibli.
Car c’est le manque de confiance en eux, qui empoisonne plus que jamais les Québécois. Une absence d’assurance que les médias s’assurent d’entretenir soigneusement, avec la bénédiction de ceux qui forment les gouvernements à Québec et à Ottawa. Quelques belles réalisations sont à l’occasion habilement soulignées, histoire d’éviter de trop peindre en noir le portrait collectif des Québécois. Certains pourraient en effet finir par croire que l’avenir serait meilleur, hors de la fédération canadienne!
Les Québécois sont donc la cible d’un calcul politique efficace de la part des fédéralistes, appuyés d’une machine médiatique colossale. Les résultats sont probants : le Parti conservateur pourrait en effet multiplier les gains au Québec lors du prochain scrutin qui approche, au grand dam du Bloc québécois qui veut pourtant neutraliser les mesures politiques fédérales totalement étrangères aux besoins des Québécois! Un scénario sans queue ni tête pour l’étranger qui s’intéresse le moindrement à la situation politique du Québec!
C’est à se demander si la guenille de madame Courchesne n’est pas imbibée de chloroforme. Le peuple québécois somnole dangereusement et risque de contribuer à l’élection d’un gouvernement conservateur majoritaire. Seule une solide campagne médiatique cherchant à les sortir de leur torpeur pourra éviter ce cauchemar. Encore faut-il pour cela trouver les bons mots pour susciter la fierté que nous apporte notre différence. Une différence pour l’instant qu’on cherche à banaliser, voire mépriser.
Patrice Boileau


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9 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    5 septembre 2008

    @ Roger Turcotte
    Vous écrivez en relevant une phrase de M. Boileau :
    « - attirer l’attention sur le peuple québécois - c’est cela que Pierre Curzi du PQ a fait et vous avez vu le résultat. C’est cela que vous recherchez ? Pas moi. »
    M. Curzi a endossé mon texte intitulé « Mot de bienvenue... à Sir Paul McCartney ». Oui il y est question du peuple souverain du Québec. Les canadianisateurs ont vu rouge... certains fans y ont vu un « mouvement d'opposition » à la pourtant « bienvenue venue » de Sir Paul. Une réplique à un texte qui n'a jamais été publié a été diffusée à ondes, câbles et pages que veux-tu pendant des jours... Créant une dérive médiatique sans précédent... qui a eu pour résultat de montrer l'idole britannique brandir le drapeau du Québec... ces couleurs cachées et honnies de ces fêtes... voir Vigile « Retour sur un détournement de message » Michel Roberge
    Pas mal comme résultat...
    Reste à dénoncer, documenter, cette odieuse et falsificatrice dérive médiatique qui est le fer de lance des canadianisateur... Provoquer une tétanisante psychose collective au moment crucial précédant une échéance, suffisamment proche pour que la réaction ne puisse produire un effet... Cela fonctionne tant et aussi longtemps que nous tenons pour objective, mesurée et équilibrée, les médias du Québec. Ce qui est le cas 99,9% du temps... du moins d'une manière à peine tolérable... et qui en temps opportun se permet toute les dérives... cela fonctionne... a fonctionné et fonctionnera tant et aussi longtemps que telle falsification ne sera pas démasquée... Je m'y emploie ici...
    Le résultat donc que vous déplorez n'est pas si négatif...

    - de un nos couleurs ont eu finalement droit de Cité, les canadianisateurs ont reculés... ( voir dans Vigile « Le succès du 400e - Il n’y a pas que les critiques qui se soient estompées » )
    - de deux, nous disposons d'un cas d'espèce de manipulation qui a fait dire aux souverainistes, dont M. Curzi l'exact contraire de ce qu'il a et de ce qu'ils ont dit, et écrit, en les faisant faussement partie d'un « mouvement d'opposition » qui n'a jamais existé... cela en toute contravention avec la déontologie journalistique dont l'une des règles est l'équilibre dans la présentation de l'information... on n'a jamais publié le texte dont on écrivait qu'il était à l'origine de l'affaire, alors qu'on n'a publié que la réplique à ce qui n'a jamais été publié...

    Une leçon donc qui nous enseigne qu'il faut vérifier à la source... qui nous enseigne que les médias disent et font dire à quiconque ce qu'ils veulent bien que l'on pense... tout partisans qu'ils sont... Nous en avons une preuve flagrante... un texte à l'appui...
    Il ne s'agit plus d'une question de déclaration malhabile ou mal comprise... comme dans le cas présent de la guenille. Il s'agit clairement d'une falsification, d'une fabrication... pure et simple...
    Du reste... j'émets l'hypothèse suivante... pour décourager le fait que l'on fouille cette affaire de dérive médiatique qui a un temps enfoncé les souverainistes... les canadianisateurs ont instrumentalisé une malhabile phrase de l'une des leurs... pour rétablir le score à 0... ainsi... les libéraux provinciaux... seront moins tenté de tancer M. Curzi... Mme Courchesne n'ayant pas fait mieux... Elle avait raison d'être en rage... elle a été sacrifiée par les fédéraux pour égaliser le score... Vous voyez souvent La Presse canadienne ainsi enfoncer des fédéralistes ??? C'est un deux dans un... en plus il se font une image d'équilibre journalistique... C'é t'y pas beau ça ?
    Elle voulait dire fini le « chicage » de guenille... ce qui n'avait rien voir avec le fait de qualifier le drapeau du Québec de guenille... elle s'est reprise... « fini la chicane » autour du drapeau... Il n'y a rien là de scandaleux... ce n'est qu'une opinion... que l'on conteste... Vivement le drapeau... pas ce chicane... Pourquoi donc faire mine de dire qu'elle a voulu dire ce qu'elle n'a jamais voulu dire... sinon... égaliser le score... ??? De médias malveillants indépendantistes... je veux bien... mais de la Presse canadienne... c'est quoi la passe ???
    Comme si cela pouvait faire oublier qu'une fabrication falsificatrice avait tétanisé le Québec tout entier... parvenant à faire en sorte que les souverainistes, désinformés par leur manipulation, aient honte des souverainistes... C'é t'y pas beau ça ?
    La voilà à nouveau dans votre message...
    Votre honte n'est pas fondée... elle l'est seulement dans la mesure où vous accordez du crédit à ce que veulent que vous pensiez les canadianisateurs... Sur le coup... je veux bien... mais un mois plus tard... il faudrait que le message passe...
    M. Curzi et moi n'avons jamais été contre la bienvenue venue de Sir Paul...
    Nous avons pris la parole et on en a fait l'exact contraire... un faux mouvement d'opposition à Sir Paul... ce qui a causé un tollé... qui n'avait pas lieu d'être...
    Au plaisir, Luc A.

  • Archives de Vigile Répondre

    4 septembre 2008

    Vous écrivez: - attirer l'attention sur le peuple québécois - c'est cela que Pierre Curzi du PQ a fait et vous avez vu le résultat. C'est cela que vous recherchez? Pas moi.

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    4 septembre 2008

    M. Boileau,
    Votre argumentation porte sur l’ENSEMBLE de la question nationale québécoise. Un bon Québécois fédéraliste est celui qui réussit à enjôler papa-fédé pour obtenir ses faveurs. On pouvait entendre hier la ministre Nathalie Normandeau se féliciter d’avoir soutiré à Ottawa « notre part du gâteau »(subventions annoncées pour une deuxième élection consécutive). Peuple de serviteurs qui laisse sa paie aux mains du Boss et doit ensuite quémander pour s’acheter des souliers. Et vous ne négligez pas le rôle capital du Bloc Québécois en résistance à Ottawa : « …le Parti conservateur pourrait en effet multiplier les gains au Québec lors du prochain scrutin qui approche, au grand dam du Bloc québécois qui veut pourtant neutraliser les mesures politiques fédérales totalement étrangères aux besoins des Québécois!»
    Pourtant, les tièdes vous laissent des messages contradictoires : « Tout à fait d’accord avec vous, Monsieur B., dit l’un, PQ pas indep : seul PI défend ce concept au Québec… » Et ce même citoyen volage vient tout juste de reconnaître la « grande sagesse de Mme Ferretti » qui justifie la présence du Bloc Québécois par son rôle de démonstrateur du cul-de-sace entre les 2 Solitudes.
    Sans doute signe que vous ne travaillez pas inutilement, M. Boileau. L’opinion québécoise est actuellement soumise à un assaut diviseur de la part des forces fédéralistes. Parions que la « sagesse » de vos propos comme celle de la vénérable Dame saura faire triompher la maxime : « L’union fait la force » pour que les Québécois se réunissent sous un même parapluie contre l’assimilateur. Et la radio-poubelle étant à la solde de ce dernier, qu’on lui réserve le même sort qu’à ses ancêtres Arthur et Filion, pour faire place à une information civilisée sur les ondes de la Capitale Nationale.

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    3 septembre 2008

    M. Boileau,
    Pierre Maisonneuve était à Québec aujourd'hui pour sa ligne ouverte du midi à la radio de SRC. Il demandait aux gens leur meilleur souvenir des fêtes du Q400. Je lui ai envoyé ceci:
    Moi, mon meilleur moment de l’été Q400, c’est quand le militant a répondu au maire Balabeaume qui l’avait traité de minable pour avoir manifesté son désaccord avec l’envoi de nos enfants à l’abattoir d’Afghanistan :
    Francis-Dupuis Déri, intellectuel, ancien chercheur au MIT et prof de sciences politiques à l'UQAM, antimilitariste avoué et nouvellement « minable », répond au maire dans une lettre aux médias et contre-attaque :
    «Ce que je trouve minable, moi, c'est l'attitude des politiciens comme vous (qui n'irez jamais à la guerre) qui moussent leur capital de sympathie à même le sang des victimes, nos concitoyens ou des étrangers... Il n'y a pas de quoi célébrer.»
    Monsieur Dupuy-Déry est personnellement touché dans cette cause puisque sa sœur a effectué une mission là-bas… Quand les élus se croient maîtres des citoyens à qui ils doivent leur poste…

  • Marcel Haché Répondre

    3 septembre 2008

    M. Duceppe avait reçu un traitement particulièrement injuste des médias parce des photos montraient, derrière lui, à l’occasion d’une manifestation à laquelle il participait, des drapeaux du Hezbollah libanais.
    C’était lors de la dernière guerre Israël-Liban. Vous vous souvenez sans doute : il y avait 50,000 ressortissants canadiens pris dans cette guerre. Piégés au Liban. 50,000 canadiens !
    50,000 citoyens !

    Devait bien y avoir quelques « québécois » dans le groupe… ! Mais comme le Liban, c’est un peu plus loin que la Floride, 50,000 citoyens, piégés, dans un pays où les drapeaux gardent toute leur signification, cela peut se remarquer. Ce 50,000 était pourtant passé plutôt inaperçu.

    Il ne viendrait à l’idée de personne au Liban de parler des drapeaux comme de vulgaires guenilles. Encore moins de parler de guerre de guenille, non plus que de « chicane de guenille ». Des hommes et des femmes meurent pour leurs drapeaux là-bas !
    Manifestement, Mme Courchesne ne mourra pas pour le drapeau québécois.

    Elle peut bien s’excuser, ici, loin du Liban et de la guerre, de ses propos à l’égard du drapeau québécois. Elle n’a pas à le faire pour le drapeau libanais, parce qu’elle n’a rien dit à son sujet. Et ne dira surtout rien non plus !
    Pour cause : sa courte majorité électorale…ne le lui permettrait pas !

  • Archives de Vigile Répondre

    3 septembre 2008

    Je voudrais répondre à monsieur Michel G. concernant la radio-poubelle de Québec.
    J'ai suivi la montée de cette radio et en ai averti les dirigeants du PQ de Lotbinière pendant les années où j'étais sur son exécutif. J'ai parlé des dangers de cette mouvence de droite qui finirait par faire des petits sur le plan politique. On me répondait que c'était un épiphénomène passager et que j'avais tort de m'en inquiéter.
    La réalité m'a donné raison! Conservateurs et adéquistes murs-à-murs!
    J'habite Chaudière-Appalaches et puis vous dire que les dommages sont importants dans sa population. On le constate par la quantité grandissante des auto-collants'' ENCOURAGEONS LES TROUPES '' qui poussent comme des champignons sur les pare-chocs des voitures. J'ai dernièrement failli me faire lyncher parce que j'ai dit que j'étais contre l'intervention canadienne en Afghanistan. On observe une agressivité et une vulgarité chez les jeunes au volant des automobiles. On nous fait des doigts d'honneur, on nous insulte. Je suis représentant depuis 25 ans et visite presque toutes les régions du Québec et puis vous assurer qu'il n'y a que dans les régions de Québec et Chaudière-Appalaches, qu'on observe ce dérapage sur le plan social. Il y a quelque chose qui couvre ici. J'ignore ce que c'est, mais ça commence à sentir mauvais!

  • Archives de Vigile Répondre

    3 septembre 2008

    Je souscris entièrement à vos propos monsieur Pierre B.
    L'indépendance, c'est autre chose et à part le PI, aucun autre parti politique défend cette option au Québec.

  • Michel Guay Répondre

    3 septembre 2008

    Le Parti Québecois est vraiment indépendantiste même si comme pays il proposait en 1980 une association d'égal à égaql avec le Canada et en 1995 des partanariats si nécessaire et suivant les utilités .
    Pour ce qui est de la montée des conservateurs dans la région de Québec c'est le succès de la radio poubelle permise par le CRTC avec nos impôts fédéraux.

  • Archives de Vigile Répondre

    3 septembre 2008

    Vous croyez que le parti québécois est indépendantiste? Je n'ai pas lu cela dans son programme. Il est souverainiste. Il veut un État souverain - des pouvoirs en surplus - conditionné à une union économique et politique. Cela s'appelle: une confédération. C'est ce sur quoi vous avez voté en 1995.
    L'indépendance, c'est autre chose !
    Pierre B.