« Confédéralisme ou séparatisme »

Chronique de José Fontaine

C’est le titre d’un article du journal Le Soir de ce mercredi 3 septembre. Je suis un homme engagé qui souhaite depuis longtemps que la Wallonie soit indépendante (même si c’est en maintenant des liens avec Bruxelles, à coup sûr, et avec la Flandre aussi). Mais, alors que, il y a quelques années, j’aurais dû m’efforcer de faire comprendre que c’était vers cela qu’on allait, je puis aujourd’hui, à ma grande joie d’ailleurs, me contenter de redire ce que tout le monde finit par penser. Je lis dans Le Soir du 3 septembre ces phrases (que le journal attribue à deux ministres francophones au fédéral) : Les Flamands nous ont très clairement fait comprendre qu'il n'y a pas lieu de tergiverser. Ou nous acceptons de négocier sans attendre la vraie grande réforme de l'Etat, le confédéralisme, ou c'est la Flandre qui basculera dans le séparatisme et l'indépendance.
Le Ministre-Président qui est à la tête de l’Etat fédéré belge dont la population est la plus attachée à la Belgique, soit la Région de Bruxelles, la capitale du pays, s’exprime dans le même journal de cette façon : La détermination de la Flandre est telle que croire qu'on peut passer par des réformettes et que suivra une longue période de pacification communautaire relève du rêve. Ce n'est pas comme ça que les choses vont se passer. Si on ne négocie pas la grande réforme, on risque de se retrouver dans un processus que rien n'amortira parce qu'il ne restera plus d'expression suffisante du vivre-ensemble. Et un peu avant cela que nous irons rapidement à cette phase ultime qui débouchera si certaines thèses en Flandre triomphent vers le confédéralisme... Tout le contexte de son interview montre justement que Picqué est certain que ces thèses vont triompher. Il est possible qu’il soit l’un des ministres s’exprimant sous le couvert de l’anonymat.
Le président de l'Institut Destrée expliquait tranquillement au colloque de septembre 2006 de l'Institut que les élections de juin 2007 allaient déboucher sur une grande réforme. Juin 2007 est venu et 14 mois après, on n'est nulle part. Tout homme de bon sens peut comprendre que s'il est si difficile de se mettre d'accord, c'est que l'un des partenaires demande énormément (c’est la Flandre) et que l'autre le lui refuse (la majorité actuelle du monde politique wallon). Mais sent que l’on doit l’accepter, car on ne peut pas être unis à soi tout seul, si je peux m’exprimer comme cela.
Si je n'aime plus parler de disparition pure et simple de la Belgique, c'est parce que cela ne me semble pas très rationnel de croire que l'espace où nous sommes étant en quelque sorte si physiquement fait d'imbrications à l'infini (routes, fleuves, chemin de fer, flux des personnes et des biens etc.), il est assez peu envisageable que le confédéralisme signifie la rupture totale de nos relations avec les Flamands. C'est assez inimaginable étant donné le continent et l'époque où nous sommes. Donc, je préfère demeurer prudent en ce qui concerne le mot Belgique mais évidemment, cette Belgique ne sera plus qu'un Etat-coquille et une nation vide. Et si je me réfère à d’autres pour informer les Québécois dans cette chronique c’est que, aussi engagé que je sois, je suis aussi journaliste et que ce qui m’importe plus que tout, c’est de ne pas tromper le lecteur. Avant, je devais défendre mes idées à l’aide d’arguments et sans cacher que tout le monde ne partageait pas mon analyse. Il me suffit maintenant de dire que cette analyse est faite par tous les observateurs lucides en Belgique qui est un pays qui va connaître une transformation bien plus radicale que celles qu’il a déjà voulues, et va devenir une Confédération d’Etats indépendants. Il n’y a plus de doutes à avoir là-dessus. Ce qui m’inquiète, ce sont les Wallons encore attachés à la Belgique qui vont encore user de leur force d’inertie pour gagner du temps, mais en faire perdre à la Wallonie qui a surtout besoin de lucidité et de s’assumer.
José Fontaine

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José Fontaine355 articles

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Né le 28/6/46 à Jemappes (Borinage, Wallonie). Docteur en philosophie pour une thèse intitulée "Le mal chez Rousseau et Kant" (Université catholique de Louvain, 1975), Professeur de philosophie et de sociologie (dans l'enseignement supérieur social à Namur et Mirwart) et directeur de la revue TOUDI (fondée en 1986), revue annuelle de 1987 à 1995 (huit numéros parus), puis mensuelle de 1997 à 2004, aujourd'hui trimestrielle (en tout 71 numéros parus). A paru aussi de 1992 à 1996 le mensuel République que j'ai également dirigé et qui a finalement fusionné avec TOUDI en 1997.

Esprit et insoumission ne font qu'un, et dès lors, j'essaye de dire avec Marie dans le "Magnificat", qui veut dire " impatience de la liberté": Mon âme magnifie le Seigneur, car il dépose les Puissants de leur trône. J'essaye...





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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    12 septembre 2008

    Je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce que dit Alex Remacle. Il y a les définitions scolaires du confédéralisme (disons une organisation politique réunissant des Etats indépendants comme la CEI post-soviétique). Le problème c'est que la Belgique qui n'est pas une confédération d'Etats indépendants, mais un Etat fédéral a cependant certains traits d'une organisation confédérale puisque la non-hiérarchie des normes, la pleine compétence des entités fédérées sur le plan international (doctrine bien connue au Québec sous le nom de deux hommes politiques dont j'oublie les noms au moment de les écrire), et enfin la nécessité (mais de fait, de facto), d'avoir l'unanimité des composantes pour décider, voilà des traits de confédéralisme. Vincent de Coorebyter que je cite souvent dans mes chroniques s'explique là-dessus en disant qu'il n'y a pas de modèle juridique pur. Ainsi l'Union européenne où le droit communautaire l'emporte sur le droit national: certains militants fédéralistes européens se fondent sur la comparaison entre la Constitution belge et celle de l'Union européenne pour dire que l'Union est bien une fédération et non une Confédération. Donc je suis d'accord avec G.Bousquet. Effectivement, les solutions vers lesquelles on s'oriente en Belgique - et qui d'ailleurs sont déjà effectives pour une part - devraient inciter le Canada à plus de souplesse envers le Québec.
    Ceci dit, sur le plan de la reconnaissance, je sais que dans l'esprit des citoyens du pays comme des autres pays, on n'admet qu'une contrée soit un vrai pays que si elle est pleinement souveraine. Il m'arrive encore que, lorsque je dis "des amis québécois", mon interlocuteur me corrige en me disant "Ah! des Canadiens??!!" Et pourtant, nous sommes un pays francophone. Cependant, je crois que, au moins dans les pays francophones, un grand nombre de personnes reconnaissent le Québec. Dès lors, ajouter, à cette reconnaissance morale, la réalité de la souveraineté juridique (ne serait-ce que dans les limites de ce qui existe et va s'amplifier en Belgique), ce serait pas mal.
    Maintenant, il faut dire une chose, c'est que l'addition des deux choses pour le Québec (la reconnaissance que je dis "morale" songeant au fait que le Québec est considéré comme une nation, par exemple mais aussi sa reconnaissance de fait comme société distincte + l'effectivité juridique, par exemple la capacité de signer des traités sans l'aval du Canada, dans le cadre de ses compétences), aurait quelque chose d'explosif, peut-être? Si cela n'a pas ce caractère en Belgique, c'est que la Wallonie ne bénéficie pas ou pas encore de la reconnaissance dont bénéficie le Québec tant vis-à-vis de l'extérieur que vis-à-vis de ses propres ressortissants. Car la Wallonie a cette sorte d'indépendance juridique (liée au fédéralisme), moins la reconnaissance effective qui est celle du Québec.
    Ce qui m'amène à reformuler la comparaison Québec/ Wallonie que je fais souvent: la Wallonie, qui est en avance sur le Québec sur le plan juridique, est fort en retard sur lui en ce qui concerne sa reconnaissance identitaire. Si nous voulons raisonner, Québécois et Wallons, à partir de nos situations respectives, je crois que c'est cette formule qui est la bonne. Mais je ne sais pas quelle est la meilleure position: parfois, je me dis que c'est le Québec, parfois je me dis que c'est nous. Et en fait, oui, je ne le sais pas et je pense que c'est impossible à établir.
    Donnons-nous la main par-dessus l'Océan! Informons-nous les uns des autres! Restons ensemble, car il se fait tard et la nuit descend sur le monde!

  • Archives de Vigile Répondre

    10 septembre 2008

    Le titre de votre message : "Confédération ou séparatisme" pourrait aussi être utilisé pour désigner des solutions, des alternatives pour le Québec et le Canada.
    Le ROC et nous sommes mariés sous le régime de communauté de biens depuis 1867 sous le faux nom de CONFÉDÉRATION. Le ROC, très majoritaire, est le conjoint autoritaire et autorisé à l'être. La Province de Québec est l'autre, le conquis et l'assujetti par la force militaire et économique ensuite "voir son dictionnaire sous le mot PROVINCE".
    L'idée de confédération serait comme changer la communauté en séparation de corps et de biens "Québec-ROC". Chacun dans sa chambre mais en pouvant partager la cuisine, le salon et le compte de chauffage avec chacun la permission de fôlatrer avec qui il ou elle veut dans le vaste monde.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 septembre 2008

    A l'analyse des données socio-économique de la Belgique, le séparatisme flamand est certainement moins dangereux pour la Wallonie et Bruxelles qu'un Etat confédéral dans lequel la Flandre maintient sa domination et continue à profiter de l'essentiel des ressources de la Belgique.
    Le projet flamand est de soumettre la région de Bruxelles à cet Etat confédéral.
    Nous devons, nous wallons, défendre avec ardeur la solution d'une Fédération Wallonie-Bruxelles.
    Quelques chiffres, par exemple le PIB par habitant, en euros : Flandre 25.724 ; Wallonie-Bruxelles 26.330 ! Chiffres 2006.
    Il faut savoir que 235.000 flamands travaillent à Bruxelles et payent leurs impôts à la Flandre !
    Dans le cas où la Flandre devient indépendante ou d'une Confédération des Etats Flandre et Wallonie-Bruxelles, les impôts seront prélevés à la source (sur le lieu de travail).
    Dans le cas d'une confédération, il y aurait scission de la sécurité sociale, en général ce sont les règles de la CE.
    Dans le langage communément admis par la majorité des juristes, le confédéralisme est une association entre plusieurs Etats souverains, fondée sur un traité international et destinée à organiser la gestion commune de quelques matières déterminées.
    Si il y a scission, comment déterminer les frontières d'Etat?
    Il sera sans doute nécessaire et démocratique d'organiser des consultations populaires et l'intervention de médiateurs internationaux sera aussi indispensable. Notamment dans les communes à facilités de la périphérie bruxelloise.
    Le mouvement flamand veut aujourd'hui revenir sur des accords votés à majorité qualifiée.
    N'oublions pas que la Flandre n’a pas reconnu la convention cadre sur la protection des minorités.
    Elle s’est dévalorisée au niveau international.
    Selon l'analyse sur la base de l'enquête post-électorale de 2007 des professeurs AP Frognier, L. De Winter et P. Baudewyns de l'Université Catholique de Louvain,
    nous sommes une majorité de wallons, 56.50%, à vouloir cette Fédération Wallonie-Bruxelles et les dirigeants des deux Régions oeuvrent dans ce sens.
    Mais un Etat indépendant Wallonie-Bruxelles ne recueille que 20.5% d'avis favorables, et Bruxelles cogérée par la Flandre et la Wallonie 16%.