Bâtonnière: le Barreau évoque un deuxième événement

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Un acharnement de plus en plus suspect

En plus de la plainte pour vol à l'étalage au Simons du Carrefour Laval, la bâtonnière du Québec Me Lu Chan Khuong aurait été impliquée dans un second événement au Simons de Place Sainte-Foy, selon l'avocat du Barreau, qui réclame l'accès au dossier d'enquête.
Me Raymond Doray a laissé tomber cette petite bombe en fin de journée d'audience, au palais de justice de Québec, lorsque les journalistes l'ont questionné sur sa requête pour obtenir tous les documents de preuve détenus par la maison Simons.
Il y a quelques jours, l'avocat a demandé, par voie de subpoena, «tous les documents pour tout événement mettant en cause la bâtonnière Me Lu Chan Khuong». Il visait notamment à obtenir les bandes vidéo ainsi que les rapports des enquêteurs.
Selon Me Doray, Simons a répondu qu'elle pouvait assigner trois témoins pour deux événements distincts. Celui du 17 avril 2014 au Carrefour Laval, au cours duquel Me Khuong serait sorti avec deux paires de jeans valant 470$, et pour un autre événement survenu au Simons de Sainte-Foy.
L'avocat du Barreau ne disposait d'aucun autre détail sur cet incident. Il a toutefois indiqué que cet événement n'avait rien à voir avec l'achat des jeans en litige à Laval.
L'avocat de la bâtonnière, Me Jean-François Bertrand, aurait déjà indiqué au Barreau qu'il allait s'opposer au dépôt de ces éléments de preuve du Simons. Un juge entendra cette requête la semaine prochaine.
Débat sur la réintégration
La bâtonnière du Québec Me Lu Chan Khuong, victime des «décisions intempestives» du conseil d'administration du Barreau, doit être réintégrée au plus vite dans ses fonctions, a plaidé aujourd'hui son avocat Me Jean-François Bertrand. Impossible, rétorque l'avocat du Barreau Me Raymond Doray; faire ça équivaudrait à invalider le code de déontologie et à annuler les résolutions du conseil.
Après des semaines d'échanges de procédures légales, la saga qui enflamme le petit monde juridique québécois s'était transportée en Cour supérieure hier à Québec.
Vêtue d'une sobre robe bleue, la bâtonnière, le front plissé par la concentration, a écouté attentivement chaque argument de son procureur. Et sourcillé à certaines remarques de l'avocat du Barreau.
Par sa requête en ordonnance de sauvegarde, l'avocat de la bâtonnière, Me Jean-François Bertrand, tente d'obtenir que sa cliente, suspendue depuis le 1er juillet, puisse reprendre ses fonctions. Et il y a urgence, insiste le procureur, puisque la bâtonnière est élue pour mandat de seulement deux ans. «Ce sera utopique de penser qu'elle pourra réintégrer ses fonctions s'il lui reste seulement trois mois de bâtonnat à faire», soumet l'avocat.
Le Conseil d'administration du Barreau a suspendu sa bâtonnière quelques heures après la publication par le journal La Presse d'un article révélant que Me Khuong avait bénéficié du programme de non-judiciarisation en 2014 après une plainte pour vol à l'étalage au Simons de Laval.
Rien dans la loi ou dans le Code des professions ne donnait le pouvoir au conseil d'administration de suspendre la bâtonnière, allègue Me Bertrand.
Faux, rétorque l'avocat du Barreau, Me Raymond Doray, qui plaide que le code d'éthique des administrateurs de l'ordre prévoit une procédure d'examen en cas de manquement.
C'est pour cette raison qu'un comité d'éthique a été nommé, ajoute l'avocat, afin d'examiner la conduite de la bâtonnière et de faire une recommandation de sanction, s'il y a lieu, au conseil d'administration.
Le conseil d'administration, après avoir demandé à la bâtonnière de démissionner, a choisi de la suspendre en raison du «risque réputationnel», a indiqué Me Doray. «La bâtonnière est la personne la plus importante de l'Ordre, insiste Me Doray. D'où l'importance que ce représentant ne porte pas atteinte à la confiance du public en l'institution.»
Les administrateurs n'ont visiblement pas cru les explications de la bâtonnière sur ce qu'elle qualifie de distraction au Simons. La directrice générale de l'ordre, dans son affidavit, les qualifie d'ailleurs d'«invraisemblables» et de «floues».
Pas un deuxième Joël Legendre
Le Conseil d'administration du Barreau reproche à la bâtonnière d'avoir communiqué avec le journaliste de La Presse après qu'on lui eut interdit de le faire. «Devait-elle se laisser lyncher sur la place publique?» Demande Me Bertrand.
Il fallait répondre aux questions du journaliste pour «éviter que ça devienne une deuxième affaire Joël Legendre», ajoute l'avocat, en faisant référence à la vedette qui a, selon lui, été davantage blâmé pour avoir nié que pour le geste obscène posé dans un parc.
Me Jean-François Bertrand évalue que sa cliente n'avait aucune obligation légale ni même morale de divulguer au conseil d'administration qu'elle avait bénéficié du programme de non-judiciarisation. Comme 100 000 Québécois avant elle, Lu Chan Khuong s'attendait à ce que son dossier reste confidentiel, a fait valoir Me Bertrand. Elle a plutôt, ajoute-t-il, été la première à voir ses droits fondamentaux ainsi violés.
Dans ses motifs de suspension, le conseil d'administration estime lui que la bâtonnière a commis des manquements notamment en omettant de divulguer une information vitale. «Elle a aussi manqué à son devoir d'intégrité, de dire la vérité», estime Me Doray.
La requête en nullité de la décision du conseil d'administration déposée par Me Bertrand ainsi que celle en dommage déposée par les administrateurs du Barreau seront débattues au fonds dans la semaine du 5 octobre.
La bâtonnière réclame 95 000$ en dommages. À la suite de plusieurs allégations de la bâtonnière, les administrateurs du Barreau ont répliqué avec une poursuite en dommages de 90 000$.


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