La brune jeune fille, aux yeux très noirs, a aujourd’hui 18 ans. Elle témoigne au procès de Joey-Brant Fournier, 24 ans, accusé de proxénétisme.
Fournier avait plaidé coupable il y a environ un an et demi, puis a demandé à être relevé de son plaidoyer de culpabilité, contestant plusieurs faits.
Assis dans le box de détention, il rouspète et soupire en écoutant Laurie.
La plaignante n’est pas dans la salle d’audience. Comme c’est le cas dans presque tous les dossiers du genre, la Couronne présente, à titre de témoignage, l’interrogatoire vidéo de Laurie par l’enquêteur Christian Lachance du Service de police de la Ville de Québec, le 20 mars 2017.
À cette date, l’enquêteur Lachance en connaît déjà un bout sur la prostitution juvénile.
Le policier a été patrouilleur sur la Grande-Allée, à l’époque où 13 bars animaient l’artère de la Haute-Ville. Il a été en contact avec les suspects du Wolf Pack et les jeunes filles sous leur joug. L’enquêteur a aussi été enquêteur jeunesse et policier dans les écoles. Depuis 2017, Christian Lachance travaille exclusivement à la lutte au proxénétisme au sein d’une équipe provinciale. Des centaines de jeunes filles lui ont raconté leur histoire.
Laurie lui parle sans gêne, d’un ton vif et plutôt détaché. Après s’être sauvée du centre jeunesse, l’adolescente a fait une journée de «brosse» chez une amie.
Son copain de l’époque, Thomas Chenêvert, lui envoie un ami, Joey-Brant Fournier, en attendant qu’il puisse venir la retrouver.
Chênevert a depuis plaidé coupable aux accusations de proxénétisme et écopé de six ans de pénitencier.
Laurie est conduite dans un logement du quartier Saint-Roch. Il y a un matelas au sol, dans une chambre. Fournier lui aurait alors annoncé qu’elle allait se prostituer et gagner beaucoup d’argent.