À quoi ça sert d’aller voter

Au fond, nous n’avons pas de femmes et d’hommes politiques, des gens qui auraient une vision, des convictions. Nous n’avons que des gestionnaires.

Tribune libre 2008

Nous venons d’avoir des élections partielles. Le taux de participation a été très faible: 33 ou 34%. Le plus faible depuis une quarantaine d’années, dit-on.
On répète que les gens ne sont pas intéressés, n’ont pas de conscience politique. Je dirais plutôt que les gens sont désabusés, déçus. À quoi ça sert, comme me dit un ami, d’aller voter, d’élire des gens qui regardent passer le train? Est-ce que ça change quelque chose que ce soit un parti plutôt que l’autre qui soit au pouvoir?
Les Québécois sont très déçus de leurs femmes et de leurs hommes politiques. Au fond, nous n’avons pas de femmes et d’hommes politiques, des gens qui auraient une vision, des convictions. Nous n’avons que des gestionnaires. À quoi ça sert des femmes et des hommes politiques?
On parle de ce temps-ci de la fermeture de Mirabel, de son déplacement à Dorval, du caractère tiers-mondialiste de l’aéroport de Dorval et de la nécessité d’ouvrir de nouveaux corridors aériens au-dessus des villes environnantes. Où étaient nos femmes et nos hommes politiques quand on a exproprié un nombre exagéré de propriétaires de Sainte-Scholastique, des gens qui étaient là depuis cinq ou six générations et qu’on a délogés avec mépris? Où étaient-ils quand on a décidé de fermer Mirabel et de déménager à Dorval? (On devrait plutôt dire à Toronto...) Il y avait là un combat politique important à livrer, on s’est abstenu. Si un parti politique avait vraiment défendu la cause de Mirabel, il aurait eu tout le Québec derrière lui.
Où étaient nos femmes et nos hommes politiques au lendemain du rapatriement unilatéral de la Constitution qui était pourtant refusé à l’unanimité par l’Assemblée nationale? Il y avait là un combat politique important à livrer, nos hommes et nos femmes politiques se sont abstenus.
Où étaient-ils au lendemain du référendum de 1995 qui, dit-on, a été volé? Si le référendum a été volé, qu’on dénonce ce vol, qu’on livre la bataille qui s’impose.
Où étaient-ils nos hommes et nos femmes politiques quand a éclaté le scandale des commandites?
Qu’ont-ils fait devant le bousillage de la loi 101 par la Cour suprême du Canada? Ils ont assisté à la débandade, comme tout le monde.
Dans l’histoire des « accommodements raisonnables », au lieu de s’adresser aux immigrants et de leur expliquer dans quelles conditions ils sont accueillis au Québec, nos hommes et nos femmes politiques, par peur de se compromettre, de s’acquitter de leurs responsabilités, mettent sur pied une commission qui fera le travail à leur place. Et je pourrais allonger la liste jusqu’à demain.
Comme me dit mon ami, pourquoi aller voter? À quoi ça sert? Pourquoi élire des gens qui se contentent de regarder passer la procession? C’est ma conviction que la majorité des Québécois sont favorables à l’indépendance, mais ils n’ont pas confiance en leurs femmes et leurs hommes politiques, ils sont décontenancés devant leur perplexité, leurs atermoiements, et même leurs contradictions. Ils ne voient pas quel parti les conduirait à l’indépendance. Il faut les comprendre...
Paul-Émile Roy


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