Un débat ambigu

Il y a quelque chose d’étrange dans le débat actuel sur la place de la religion dans la société québécoise

Questions de société


Il y a quelque chose d’étrange dans le débat actuel sur la place de la religion dans la société québécoise. Ce débat a été provoqué par le problème des accommodements à effectuer dans les relations avec les immigrants qui ont des habitudes, des coutumes ou des pratiques culturelles ou religieuses différentes des nôtres. Ce qui est étrange, c’est que depuis quelque temps, on oublie à peu près le problème des relations avec les immigrants pour nous chicaner entre nous.
Que se passe-t-il donc? On a l’impression que le petit problème bien banal, au fond, de nos relations avec les néo-Québécois, nous a fait prendre conscience d’un malaise qui nous habite, nous les Québécois de toujours. Nous ne sommes pas en paix avec nous-mêmes, semble-t-il . Nous sommes profondément divisés. Nous faisons la critique, non seulement de notre passé, mais de ceux qui ne pensent pas comme nous, comme certains d’entre nous. Il est normal que dans une société, nous n’ayons pas tous les mêmes idées, mais ici, le débat devient acrimonieux, prend l’allure d’un procès. Comment expliquer ce qui se passe ?
Je soumets une idée à la discussion. Une idée qui n’a peut-être pas d’allure mais que je suis porté à considérer comme utile pour mieux saisir la nature du débat actuel qui est parfois d’une agressivité inutile, il me semble, quand ce n’est pas d’une grossièreté mal placée.
Mon idée est celle-ci: les changements qui se sont produits au Québec depuis le milieu du siècle dernier, ont provoqué la formation d’une nouvelle orthodoxie qui n’est pas clairement formulée mais qui est au moins aussi impérative que celle qui pouvait exister autrefois. Une orthodoxie, c’est un ensemble de dogmes, de principes qu’on accepte, qu’on ne discute pas, qui assure la sécurité et le confort de l’esprit. Celui qui entre en conflit avec cette orthodoxie ne peut être qu’un demeuré, ou encore un dissident. On ne discute pas avec un dissident, ou un hérétique, on l’écarte, on l’exclut, on lui refuse de participer au débat.
Pour assainir le débat, il me semble urgent de préciser les dogmes de cette nouvelle orthodoxie. Disons d’abord qu’elle se présente comme postmoderne et postmorale. Elle est le fruit des grandes «libérations» postmodernes. Elle accepte comme une évidence que la religion est une chose du passé. La sexualité n’a rien à voir avec la morale. L’avortement, « y a rien là ». Le mariage des homosexuels, cela va de soi...
Ce sont là quelques-uns des articles du dogme nouveau. Si vous les acceptez, vous faites partie du nouveau type d’hommes ou de femmes qui construisent le monde nouveau. Si vous les contestez, vous êtes un ringard, un réactionnaire, un déphasé. Çà ne vaut même pas la peine de discuter avec vous.
Le tenant de l’orthodoxie ne met pas en cause les principes de sa foi. Il réfléchit à l’intérieur de son corps de doctrine. Ceux qui ne pensent pas comme lui sont des hérétiques On ne discute pas avec eux, on les excommunie. On les met au ban de la société...
Ce qui distingue l’orthodoxie d’aujourd’hui de celle d’hier, c’est que celle d’hier était officielle, on pouvait l’identifier, la contester de l’extérieur; celle d’aujourd’hui est censée ne pas exister, et ses pontifes ne sont pas reconnus comme tels, ils ne sont pas désignés. Ils occupent cependant les médias, le système d’enseignement. Malheur à celui qui ose les contester.
Paul-Émile Roy


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2 commentaires

  • Jacques Bergeron Répondre

    23 janvier 2008

    Est-ce vraiment un boulet que nous trainons? J'ai bien peur que le boulet des «intégristes de la laïcité» soit plus difficle à contrer que celui qui est dénoncé par un autre lecteur.En attendant, si ensemble, nous dénoncions l'intégrisme de certains «Musulmans» qui utilisent leurs (jeunes) frères pour accomplir leurs basses oeuvres de destruction du monde libre afin de le dominer sous l'emprise (ou l'empire) de leur dictature,en leur promettant le paradis, ne rendrions-nous pas un meilleur service à l'humanité?On peut aussi dénoncer les «croisades» et les exactions de ceux qui les ont faites! On doit cependant retenir qu'elles se sont passées il y a près
    ( ou plus de) de «500 ans» alors que le peuple était illettré, ce qui n'excuse pas les erreurs du passé et celles de ceux qui ont utilisé cette arme religieuse.Qu'en est-il du présent, sinon que certains religieux Musulmans refusent d'instruire leurs ouailles afin de pouvoir les utiliser dans leurs différentes guerres saintes,selon eux, bien sûr? Comme nous l'indiquions au lendemain du «11» septembre 2001,il sera toujours difficile de se débarraser des dictatures,qu'elles soient de droite ou de gauche ou religieuse, et peut-être plus difficile de s'en défaire si elle est religieuse, alors que dans nos démocraties «issues» de la «Chrétienté», il est toujours possible d'espérer qu'un jour prochain il nous sera possible de nous libérer de tous les Georges W Bush de cette terre.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 janvier 2008

    La chrétienté est une religion organisée autour de croyances, de mythes et de prescriptions créés, entretenus et interprétés par des hommes (de pouvoir) qui ont, depuis plus de 2 millénaires ce mauvais réflexe de qualifier d'intolérance toute critique à l'égard de leurs opinions, sinon de laisser planer des doutes, des insinuations et des affirmations non argumentées sur l'intégrité morale et intellectuelle de leurs critiques.
    Il est tout simplement désolant de constater à quel point les défenseurs de la Chrétienté, de l'Islam, de l'Hindouisme, du Sikhisme et du Judaïsme, entre autres, ont en commun cette allergie et cette imperméabilité à la raison, aux leçons de l'histoire et aux connaissances scientifiques qui peuvent nous libérer maintenant (et sans référendum) de l'asservissement de nos esprits aux premiers manipulateurs venus.
    Comment au juste peut-on espérer "convaincre" nos concitoyens par la raison de la nécessité de l'indépendance du Québec tout en les encourageant à continuer de "croire" aux sottises qui ont si bien servi nos élites dans le passé. Il me semble que dans le contexte contemporain, dans notre société démocratique et en considérant nos objectifs pour le Québec de demain que nous avons besoin de plus d'esprits capables de raisonner par eux-mêmes que de «croyants» incapables de se servir à fond de cette caractéristique qui nous distinguent des animaux; la pensée rationnelle et l'esprit critique.
    Oui, le Québec a été marqué par la religion. Honnêtement, nous ne sommes pas seuls; à peu près tout le monde occidental a été marqué par la chrétienté. Devons-nous continuer à traîner ce boulet avec nous jusqu'à la fin des temps? Ou bien ne serait-il pas temps de se prendre en main et de finalement accepter d'être entièrement responsables de nos décisions? Ne serait-il pas temps d'arrêter de se dire (de prétexter) que nous sommes qui nous sommes en grande partie à cause de la religion catholique? Ne serait-il pas temps de se dire que nous voulons nous parfaire, nous améliorer? Ne serait-il pas temps de faire un peu de ménage dans notre maison? De se débarrasser de toutes ces vieilleries qui ne servent plus? Qui nous encombrent?
    Voulons-nous transformer le Québec en musée ou en pays en marche enthousiaste vers un avenir meilleur? Quant à moi, j'opte pour un Québec qui avance, confiant en l'Homme, seul avec Lui-même, sans dieux, tout en reconnaissant lucidement son histoire et ses origines.
    Jacques A Nadeau