Le Parti Québécois a oublié l’essentiel

Retour à la case zéro

S’interroger, oui ça donne des frissons, mais ça reste pour le moment notre plus précieux révélateur

Tribune libre - 2007



Encore une fois, ce 26 mars dernier, mon peuple a donné son verdict. Un fédéraliste-libéral à nouveau premier ministre, un adéquiste autonomiste à l’opposition. Pas de P.Q. au pouvoir, pas de référendum en vue.
Retour à la case zéro. Tout un constat devant nos yeux ébahis, sidérés de cette approche choisie par le plus grand nombre d’entre nous. Moi qui n’ai pas voté pour ça, je rage en mon for intérieur. Et je crie à l’aveuglement des uns et des autres.
Ma colère se tourne de surcroît, vers le Parti Québécois que j’ai toujours soutenu et pour lequel j’ai encore voté malgré mes réticences. Comme bien d’autres, je suis une pure et dure. Je veux un pays libre et indépendant, libéré du carcan du fédéralisme et affichant fièrement son histoire et sa culture. Face à ces convictions, je n’avais rien d’autre à faire, me semble-t-il, que de voter pour ce parti qui représente toujours cet idéal national. Québec Solidaire, peu pour moi. Leur programme social et démocrate, si beau soit-il, ne sert en ce moment aucunement la cause en laquelle je crois. Bien au contraire!
Mais dites-moi donc, qu’a-t-il fait lui de son côté, le Parti Québécois, sinon se détacher de son idéal et le reléguer au bastion des oubliettes? Sinon se détacher de sa base militante et fuir ses responsabilités premières?
Le déséquilibre fiscal je veux bien, certes il fallait en parler mais il aurait fallu tout à la fois, brandir notre foi en notre culture, notre passé, notre histoire. Souligner les bienfaits économiques mais aussi sociaux, culturels de notre passage à un état national indépendant et contrôlant tous ses pouvoirs de décision. Le Parti Québécois a oublié l’essentiel. Nous revoilà donc revenus à la case départ comme si n’avait pas eu lieu trente ans de lutte nationale pour la reconnaissance de notre identité. Situation pour le moins aberrante et traumatisante. Il faut dire à la décharge du Parti Québécois que le gouvernement fédéral est drôlement bien armé pour contrer toutes nos velléités d’indépendance et de libération. La machine fédéraliste fonctionne depuis toujours à pleins poumons.

Restons positifs et disons-nous, encore une fois, que rien n’est perdu. Cet échec électoral mettra tout le monde face à ses valeurs et contradictions et nous permettra sans nul doute de mieux nous resituer sur la carte politique et nous sortir de cette torpeur ambiante.

Pour ce faire, le grand remue-ménage à l’intérieur comme à l’extérieur du Parti Québécois doit continuer. Délicat et périlleux travail. Nous y sommes. Ça éclate aujourd’hui de toutes parts. Boisclair et Duceppe. Un étrange face à face. Imprévisible. Inadéquat. Inefficace. Les émotions passées, les attaques lancées publiquement, se lèvera-t-il intact le nouveau matin? Mais surtout : notre chef actuel ici au Québec saisira-t-il le message de ses troupes? Car vue de loin, de près, de tous côtés, cette sortie publique déçoit, révolte. Indispose tous ceux qui ont à cœur le rêve du pays. Indispose tout le peuple.
J’ose à peine espérer que notre commune patience et notre gêne nationale atteindront bientôt leurs propres limites? J’ose à peine espérer que notre mémoire collective nous servira de tremplin pour nous sortir de cette situation pour le moins difficile. La maison brûle. Rebâtissons. Revenons à ce qui nous anime collectivement.
Avec ou sans le Parti Québécois? Avec ou sans Boisclair? Poser ces deux questions : affaire pénible, hasardeuse mais n’en sommes-nous pas là? S’interroger, oui ça donne des frissons, mais ça reste pour le moment notre plus précieux révélateur.


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France Bonneau39 articles

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France Bonneau est professeure de français auprès des adultes-immigrant-e-s . (MICC)





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