Racisme, non. Discrimination institutionnelle, oui!

Par Jean-Olthène Tanisma

Tolérance des Québécois / Sondage sur le racisme des Québécois



Le Québec constitue actuellement une des sociétés les plus tolérantes et sans aucun doute les plus ouvertes de l'hémisphère occidental. Bien que les études statistiques soient un guide de référence pour confirmer ou infirmer certains postulats, on ne peut pour autant occulter l'observation empirique in situ. À cet effet, il suffit d'examiner attentivement la composition du paysage ethnoculturel québécois, en particulier à Montréal, lors des grands événements de cette nature, par exemple le Festival de jazz, les différents salons et congrès, etc., pour se rendre compte du degré de mixité de la population.
De même, en observant la répartition spatiale des nombreux groupes qui composent cette mosaïque, du West-Island jusqu'à Rivière-des-Prairies et d'Ahuntsic jusqu'à la Rive-Sud, on se rend compte qu'il n'y a pas de ghettoïsation et que les différents groupes se partagent l'espace convivialement, même si on relève à l'occasion certaines gestes de méfiance de la part de propriétaires qui refusent de louer un logement à des ressortissants «visibles».
Cependant, le véritable problème réside dans l'intégration professionnelle et économique des communautés non québécoises de souche dans la fonction publique de la province, notamment dans l'administration montréalaise. En effet, à peine 8 % d'immigrants occupent un emploi stable au gouvernement québécois. Aussi, sur les 29 000 emplois de la Ville de Montréal, on ne compte qu'à peine 5 % des membres des communautés visibles et ethniques.
Les lacunes de la Commission
Par ailleurs, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec, institution gouvernementale dont le mandat consiste à faire appliquer les dispositions de la Charte des droits de la personne, se révèle incapable depuis quelques années de remplir sa mission consistant à sévir contre les gestes évidents de discrimination des institutions gouvernementales envers des plaignants victimes.
Le gouvernement du Québec est bien au courant de cette réalité puisque de nombreuses études en ont fait état. Malgré cela, les politiciens des trois principaux partis provinciaux continuent de faire la sourde oreille et n'accordent d'intérêt à cette problématique récurrente qu'à l'approche des élections, alors que le maire Jean Doré, à la tête du Rassemblement des citoyens de Montréal (RCM), avait déjà sonné l'alarme dans le programme électoral du second mandat du parti, en 1990. Rappelons que celui-ci prévoyait l'embauche d'environ 25 % de membres des communautés ethniques dans l'administration montréalaise à l'orée de l'an 2000. Depuis, bon an, mal an, ce taux oscille autour de 4,5 à 5,5 %. Peut-on parler de progrès?
La ministre de l'Immigration, Lise Thériault, a récemment pris son bâton de pèlerin pour sonder la population québécoise en ce qui a trait à l'immigration et à la tolérance des Québécois. Sans préjuger du bien-fondé d'une telle démarche, il y aurait lieu d'entreprendre cet exercice d'abord au sein de la fonction publique et de revoir le mode de fonctionnement de la Commission des droits de la personne du Québec, conjointement avec l'Assemblée nationale, en vue de rendre cet organisme plus efficace et moins partial.
Que la population du Québec se ravise: il n'y a pas plus de racisme au Québec qu'ailleurs, mais il existe très certainement un frein à l'épanouissement professionnel et économique des communautés ethniques dans la fonction publique. Diverses mesures juridiques à la fois incitatives et coercitives ont été élaborées par le passé (dispositions de la Charte, programme d'accès à l'égalité, etc.). Il convient maintenant de renforcer leur application.


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