Les dernières campagnes électorales québécoises nous ont habitués à ce que les principaux partis politiques fassent de la santé le thème central de leur programme et rivalisent de promesses en faveur d'un système garantissant un meilleur accès aux soins et aux services.
Cette année, force est de constater que les partis ne placent pas la santé bien haut sur la liste de leurs priorités. La situation économique requiert toute leur attention. L'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux (AQESSS) estime toutefois que la crise financière ne doit pas occulter les enjeux liés à notre système public, surtout qu'une mauvaise situation économique a des impacts sur la demande en santé et en services sociaux.
Pourquoi parler encore de santé?
Notre système public de santé et de services sociaux est en profonde modification. Des changements importants et nécessaires y ont été apportés au cours des dernières années et les administrateurs et les gestionnaires sont engagés à en améliorer la performance. Cependant, qu'on le veuille ou non, ce système fait face à un très grand défi: celui de son financement.
Le défi du financement
Trois commissions (Clair, Ménard et Castonguay), regroupant des personnes de divers courants politiques, ont conclu que, si nous voulons conserver un système public fort, assurer l'accès aux soins et aux services sociaux au cours de la prochaine décennie, il faut trouver de nouvelles sources de financement.
Le vieillissement de la population, l'augmentation des maladies chroniques et du prix des médicaments et des appareils technologiques font en sorte qu'il est impossible de limiter la croissance des coûts du système au niveau de l'inflation.
Si les dépenses en santé augmentent au Québec au même rythme que dans le reste du Canada, c'est plus de 40 milliards de dollars qu'il en coûtera à l'État québécois dans dix ans pour maintenir à leur niveau actuel les soins et les services à la population. Théoriquement, le gouvernement du Québec peut y faire face, mais à quel prix? Quelles sont les autres missions de l'État que le Québec devra abandonner pour payer le système de santé? Faudra-t-il gruger dans l'entretien des routes, dans les relations internationales, dans la gestion de nos ressources naturelles, dans l'éducation, la culture?
Les partis politiques doivent fournir une réponse aux citoyens pendant la présente campagne et nous indiquer comment ils entendent faire face au défi du financement du système de santé et de services sociaux.
Des impacts à court terme
Ceux qui pensent que c'est là un enjeu trop lointain et que nous en débattrons une fois sortis de la crise économique n'ont qu'à regarder les sommes qui ont été investies dans notre réseau au cours de la dernière décennie. Grosso modo, les dépenses du réseau augmentent entre 5 % et 6 % annuellement, ce qui est nettement plus élevé que la moyenne de la croissance des revenus du gouvernement.
Les partis politiques doivent indiquer à la population du Québec quelle part ils réservent à la santé et aux services sociaux dans le cadre budgétaire qu'ils proposeront en cours de campagne.
Du personnel pour offrir soins et services
L'accès aux services est un problème quotidien pour une partie de la population. Au cours des dix prochaines années, uniquement pour maintenir les soins et les services à leur niveau actuel, il faudra embaucher 113 000 nouvelles personnes dans le réseau, soit 40 000 infirmières, 26 000 préposés aux bénéficiaires, 16 000 professionnels, 14 000 techniciens, 11 000 infirmières auxiliaires, 5000 cadres et 1000 pharmaciens. Le réseau repose essentiellement sur les hommes et les femmes qui chaque jour donnent les services à la population. Sans eux, pas d'accès!
Tous les partis politiques qui aspirent à former le prochain gouvernement devraient aussi avoir comme priorité de s'attaquer au renouvellement du personnel du réseau. C'est pourquoi nous leur demandons comment ils entendent participer à ce vaste chantier.
Réduire les délais d'attente
La population québécoise peut compter sur un système de santé public fort, un système à la fine pointe des technologies, souvent à l'avant-garde. Pourtant, les problèmes d'accès aux médecins de famille et aux services spécialisés persistent. Un prochain gouvernement devra soutenir la modernisation du réseau en consolidant les services de première ligne afin d'assurer l'accès et de réduire les délais d'attente, notamment pour les jeunes et leur famille, pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et pour celles et ceux qui nécessitent des tests d'imagerie médicale.
Ces enjeux sont importants. Les partis politiques doivent indiquer à la population ce qu'ils entendent faire pour améliorer l'accès aux soins et aux services.
Au cours des prochaines semaines, à titre de représentant de 135 établissements publics de santé et de services sociaux, nous entendons exiger des partis politiques des réponses claires à ces questions. Occulter le problème de la pérennité de notre système public ne fera que l'aggraver davantage.
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Lise Denis, Directrice générale de l'Association québécoise d'établissements de santé et services sociaux
Lettre aux partis politiques
Pourquoi occulter les enjeux en santé et services sociaux?
Santé - le pacte libéral
Lise Denis1 article
Directrice généralede l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux (AQESSS*)
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