Les causes (probables) de la dégringolade du PQ (1)

Comme une poule sans tête

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Tribune libre

« Qui aime bien châtie bien ! » Je n’ai pas hésité, dans mon dernier texte, à faire mien cet adage populaire en portant un jugement particulièrement sévère sur le Parti québécois et ses dirigeants (https://vigile.quebec/articles/y-en-aura-pas-de-proportionnelle-en-2022). Un choix d’autant plus judicieux de ma part que deux nouveaux sondages sont venus confirmer entre-temps que la formation souverainiste reste « enlisée » dans son propre bourbier (https://vigile.quebec/articles/sondage-ipsos-la-caq-reste-en-tete-le-plq-monte-et-le-pq-recule ; https://vigile.quebec/articles/sondage-leger-le-journal-le-devoir-la-caq-conforte-son-avance-sur-les-libera).


Si j’enfonce aujourd’hui le clou, ce n’est pas tant dans l’espoir d’empêcher le naufrage péquiste, qui – à moins d’un miracle ! – m’apparaît maintenant comme inévitable, que dans l’intention d’éclairer le lecteur sur les principales causes de l’interminable chute de popularité du PQ et sur les éventuels moyens d’y remédier.


Pourquoi les électeurs boudent-ils le PQ ? Les réponses à cette question sont multiples et diverses. Voici la première d’une série d’images fortes qui pourraient servir à expliquer ce qui se passe dans la tête de personnes à qui on n’a jamais pris la peine de démontrer le bien-fondé de la cause indépendantiste.


Des tours de magie qui tombent à plat


Le Parti québécois ne cesse de perdre des plumes pour la simple raison qu’il fait penser à une poule sans tête qui court dans toutes les directions. À le regarder aller, on éprouve le sentiment désagréable que le PQ ne va nulle part, voire qu’il fait fausse route et se dirige tout droit vers l’abattoir.


De toute évidence, l’optimisme de façade dont Jean-François Lisée s’entête à faire preuve ne trompe personne. Le chef du PQ a beau s’amuser à jouer au plus malin en persistant à lancer des idées toutes plus abracadabrantes les unes que les autres avec l’enthousiasme d’un magicien qui sortirait un lapin de son chapeau, cela démontre en réalité qu’il est à mille lieues de disposer d’une feuille de route clairement établie.


À défaut de quoi, les ténors péquistes, tels des anges de l’abondance, n’arrêtent pas de faire pleuvoir avec la régularité d’un métronome, tant sur les médias traditionnels que sur les réseaux sociaux, des messages enflammés qui s’apparentent de près à de fausses bonnes nouvelles sentant l’improvisation bien plus qu’ils ne sont le fruit d’un plan d’action bien arrêté et d’une stratégie soigneusement planifiée.


Ce ne sont pas les exemples à cet égard qui manquent : la nomination de Véronique Hivon comme « vice-cheffe » du PQ ; l’annonce du retour au bercail de Jean-Martin Aussant ; le slogan creux « Un État fort pour réussir l’indépendance » ; le mirobolant projet de « Grand Déblocage » en matière de transport ; l’engagement d’instaurer une déclaration de revenus unique ; le choix « courageux » de refuser de baisser les impôts dans le dessein avoué d’améliorer l’accès aux soins de santé et la qualité de l’éducation et des services publics, etc. (Parions que la liste va encore s’allonger d’ici au déclenchement des prochaines élections !)


De prime abord, il est tentant de voir là autant de signaux positifs susceptibles de convaincre la population québécoise que le PQ ferait un « ***** de bon gouvernement » et de conforter les indépendantistes purs et durs dans leur opinion que ce parti reste malgré tout le meilleur porteur du projet souverainiste. Par malheur, ce mélange d’ingrédients hétéroclites ne parvient toujours pas à faire lever la pâte !


Car aussi bien intentionnés soient-ils, les dirigeants péquistes donnent moins l’impression de s’activer à la défense des intérêts supérieurs du Québec et de se soucier du sort de ses habitants que de chercher à séduire et à rassurer les électeurs. Leur empressement à bien faire trahit leur embarras, cependant que leur attitude suggère qu’ils sont de plus en plus aux abois à l’approche des élections, comme si un vent de panique avait commencé à souffler dans leurs rangs.


Bref, leur volonté d’agir pour le bien commun n’a d’égale que l’absence totale de fermeté et de détermination qu’on ne peut s’empêcher de déceler dans leur velléité de plus en plus évanescente de faire du Québec un pays. D’où la question : Quels sont l’intérêt et la pertinence de voter à présent pour un parti qui a reporté son projet le plus cher aux calendes grecques, pour ne pas dire qu’il a renié carrément sa raison d’être ?


Tel un navire en perdition


Vu les circonstances, il y a peu de chance que le jovialisme du capitaine Lisée produise le résultat escompté le soir du 1er octobre. Bien que lui et son équipage rament comme des forcenés et se démènent comme des diables dans l’eau bénite dans une tentative désespérée de se sortir du pétrin, rien n’y fait. D’un sondage à l’autre, leur bateau en perdition n’avance pas, échoué qu’il est sur les écueils de leur propre turpitude.


Pis encore, le vaisseau amiral de l’indépendance n’en finit plus de se disloquer depuis que Jean-François Lisée en a pris le gouvernail. À force de semer à tout vent en multipliant les effets d’annonce, ce dernier ne pourra vraisemblablement pas résister à la tempête qu’il s’apprête à récolter. Car il faut bien admettre que, sous sa gouverne, le PQ court inéluctablement à la catastrophe. Si celui-ci devait être balayé par un ouragan qui risque de lui être fatal, il deviendrait pareil au Vaisseau d’or du célèbre poème d’Émile Nelligan, à savoir un « navire déserté » qui aurait « sombré dans l’abîme du Rêve ».


À suivre...



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5 commentaires

  • Jean-Charles Morin Répondre

    27 mai 2018

    Le PQ dégringole pour une raison bien simple: parce qu'il récolte maintenant ce qu'il s'entête à semer depuis plus de vingt ans. La récolte est d'autant plus maigre que les semailles ont été négligentes et décousues.


    Bon, laissons de côté les allégories bucoliques et pastorales et allons aux faits: le PQ fait face à un phénomène croissant de lassitude et de démobilisation chez ses partisans parce qu'il semble incapable de leur proposer un plan de match qui soit crédible pour réaliser l'indépendance et qu'il repousse toujours à plus tard des échéances pourtant  vitales.


    Après la quasi-victoire du "Oui" en 1995, le PQ n'a pas cherché à capitaliser sur son élan et a laissé toute la glace aux fédéralistes et à leur "loi sur la clarté". Sous la gouverne de Lucien Bouchard, un conservateur impulsif à la mèche courte qui a toujours préféré les effets de toge à une véritable réflexion stratégique, le PQ s'est pris comme objectif le "déficit zéro" d'un état resté provincial plutôt qu'une démarche libératrice menant à la création d'un pays. C'était mettre la charrue avant les boeufs car l'équilibre du budget est bien davantage l'apanage d'un état souverain qui contrôle tous les leviers économiques. Il aurait fallu mettre les énergies ailleurs et s'attacher sans plus tarder à réaliser l'indépendance pendant que le fer était chaud.


    La relation du PQ avec l'indépendance est devenue avec le temps très complexe et incroyablement tordue. De report en report, d'une mise en veilleuse à l'autre, le PQ n'en finissait plus de tergiverser et de procrastiner. Et surtout son message s'était tellement édulcoré avec le temps qu'il en était devenu une lavasse insipide dépourvue de toute inspiration. À force de lâcher la proie pour l'ombre, à force de ne pas jouer d'audace, la démobilisation s,est installée à demeure, à gauche comme à droite, et les rangs de l'armée se sont progressivement éclaircis jusqu'à la débandade que tous prédisent en octobre prochain.


    À la décharge de JFL, il a hérité d'un parti que ses prédécesseurs lui ont laissé en bien mauvaise posture. Sa principale erreur, à mon avis, a été de perdre son temps à courir après le lapin garou de Québec Solidaire. Il hérite surtout d'un rôle bien ingrat: celui de devenir l'idiot utile du PLQ car chaque vote qu'il soutirera à partir de maintenant a toutes les chances de l'être au détriment de la CAQ et ainsi de reporter au pouvoir pour quatre ans le parti anti-québécois de Philippe Couillard. Une bien triste performance si elle vient à se concrétiser.


    Jean-Charles Morin


    • Normand Paiement Répondre

      28 mai 2018

      Monsieur Morin,
      Je n'aurais su mieux dire!
      C'est malheureux à dire, mais votre excellent commentaire confirme ma perception de la situation.
      Cordialement,
      Normand Paiement

  • François Ricard Répondre

    27 mai 2018

    Bien des gens ici, sur Vigile, souhaitent la débandade et de  Jean-François Lisée et du PQ.Masochistes invétérés, vous préférez appuyer une chimère québécoise en Martine Ouellet comme vous avez appuyé la chimère française Marine LePen.Comme si la souveraineté nationale pouvait s'accomplir d'un coup fourré après un abracadrant référendum.


    On peut parler d'indépendance pendant 100 ans sans par ailleursjamais y parvenir. Ce ne sont pas des paroles mais des actes qu'il faut poser. Se servir des lois et règles existantes pour construire ce pays. Pour cela, il faut être au pouvoir.


    Dans le fond, il semble bien que vous ne voulez pas de la souveraineté. Vous aimez mieux vous payer de mots et ouvrir la porte à notre Trump national: Franôis Legault.Force est de l'admettre: bien  des indépendantistes ont quitté Vigile.


    • Guy Pruneau Répondre

      28 mai 2018

      Quelques remarques:
      Marine Le Pen est peut-être une chimère, mais c'est une chimère qui a obtenu le plus haut score de la droite nationale française jusqu'ici, alors que Lisée, s'il continue sur sa lancée actuelle, pourra se compter chanceux d'avoir la moitié du score de Le Pen à la prochaine élection... J'aime mieux les chimères finalement.
      Quant à Martine Ouellet, il faudra m'expliquer en quoi elle est plus chimérique que les sept démissionnaires.
      Et effectivement, il semble qu'une certaine proportion d'indépendantistes ait quitté Vigile. Ce qui se comprend: on peut en effet se lasser de débattre d'un hypothétique projet qui devient de plus en plus une chimère précisément à cause de gens comme Lisée qui le mettent au rancart et refusent d'en faire la promotion. Ce sont des gens comme lui qui voudraient plus de la souveraineté que les intervenants de Vigile? Si c'est vrai, il serait temps que ça paraisse.
      Et puisqu'on parle de quitter, si certains indépendantistes ont quitté Vigile, leur nombre est sans doute loin d'être aussi grand que le nombre de ceux qui ont quitté le PQ, du moins dans les intentions de vote, depuis que Lisée en est le chef. Et plus Lisée se tassera à gauche, plus il perdra des votes en faveur de la CAQ. Moi-même, je vais passer mon tour tant et aussi longtemps que le PQ n'aura pas un chef qui défend l'indépendance et l'identité, s'oppose à la mondialisation et au multiculturalisme, ne souffre pas d'anglomanie et se tient loin de QS - tous des critères qui devraient logiquement aller ensemble. Ça prend quand même une bonne raison pour appuyer un parti et je n'en vois pas plus dans le cas du PQ que dans celui des autres partis.
      En passant, au PQ, on semble se gargariser du fait que le parti a plus de membres que les autres partis. Si ça inclut des gens comme Alexandre Taillefer, ça ne veut pas dire grand chose.

    • Normand Paiement Répondre

      28 mai 2018

      Monsieur Ricard,
      Le PQ et ses dirigeants n'auraient qu'eux-mêmes à blâmer s'ils devaient perdre la prochaine élection.
      Prenez le temps de lire la plateforme électorale fraîchement pondue par le PQ: https://pq.org/plateforme.
      Tout ça, c'est du "wishful thinking": les militants prennent leurs désirs pour des réalités et se bercent de douces illusions sans même se rendre compte qu'ils foncent droit dans le mur. C'est d'un pathétique!
      J'espère sincèrement me tromper dans mes prédictions. Mais pour cela, il faudrait d'abord que le PQ sorte ses griffes et montre les dents face à des adversaires qui ne vont pas leur faire de cadeau...
      On en reparlera après le 1er octobre.
      Bon courage d'ici là!
      Normand Paiement