Le président de la République française au Québec

XIIe Sommet de la Francophonie - Québec du 17 au 19 octobre 2008

Nicolas Sarkozy sera au Québec, à Québec plus précisément, les 17 et 18 octobre. Il sera accueilli, à son arrivée vendredi matin, par la gouverneure générale elle-même, ainsi que par Stephen Harper (quoi qu'il en soit du résultat des élections d'aujourd'hui) et Jean Charest.
Il vient mettre en branle, en tant que président de l'Union européenne, le processus de négociations d'un accord de libre-échange avec le Canada, signer avec Jean Charest une entente sur la mobilité professionnelle, prendre la parole, moment fort de sa visite, à l'Assemblée nationale et participer à la première journée du Sommet de la Francophonie. Il retournera à Paris samedi soir, avant que ne se tienne dimanche matin la cruciale plénière du Sommet concernant l'avenir de la langue française. À moins que la pression populaire ne le fasse changer d'idée.
Deux mots définissent le mieux, dit-on, Nicolas Sarkozy: inclassable et imprévisible. Ainsi, lui qui chantait, pendant la campagne électorale présidentielle de 2007, les louanges de la déréglementation et du moins d'État est devenu depuis quelques semaines le pourfendeur du néolibéralisme et de ses excès. Il ne souhaite rien de moins que refonder le capitalisme. Je dois dire que je préfère ce Sarkozy deuxième mouture. Dans un autre ordre d'idées, il accepte sans réagir que plusieurs de ses ministres, qui mériteraient le prix de la carpette anglaise décernée chaque année par l'Académie du même nom, s'expriment en anglais sur la scène européenne ou internationale et même, en ce qui concerne la ministre des Finances, en France. Or le candidat Sarkozy déclarait le 27 mars 2007: «La politique de la langue est, en effet, à mes yeux, l'un des éléments essentiels d'une conception sereine et légitime de l'identité française. C'est pourquoi je souhaite lui accorder toute la place qu'elle mérite en la mettant au coeur d'une vision ambitieuse de l'influence de notre pays dans le monde». Je préfère, bien évidemment, ce Sarkozy-ci.
Lequel entendra-t-on à l'Assemblée nationale le 17 octobre? Celui qui, le 8 mai dernier, mettait sur un même pied la relation France-Canada et la relation France-Québec ou celui qui déclarait le 22 mai: «Je suis de ces Français qui croient que les Canadiens sont des amis, et les Québécois, des frères.» Souhaitons que ce soit le second.
Il pourrait s'inspirer, par exemple, des propos tenus par son premier ministre, le 3 juillet dernier, à Québec. François Fillon, parlant avec son coeur, au pied de la statue de Samuel de Champlain, a prononcé des paroles bien senties dans un discours intitulé «Il y a en chaque Français un rêve québécois». «Le fait français, disait-il, ne s'est jamais éteint en Amérique. Voilà quarante ans qu'une grande voix, une voix historique [référence au Général de Gaulle] l'a tiré de son hivernement dans l'esprit de mes compatriotes», et il a ajouté: «Dans votre Québec, chaque Français reconnaît ses mots et ses serments.» En fait, Nicolas Sarkozy ne devrait-il pas, devant les parlementaires, reprendre l'un des grands thèmes de sa campagne, celui de l'identité nationale, et le décliner de diverses façons? Expliquer, puisqu'il ne sera pas là le surlendemain pour en discuter avec ses homologues francophones, son propre plan d'action pour que le français, dixième langue du monde, ne perde ni son statut ni son aura de grande langue internationale? Redire, comme le propose l'historien Éric Bédard, qu'assurer la pérennité de sa culture et de sa langue, dans le respect de la diversité du monde, ne saurait être assimilé à un combat d'arrière-garde? Rappeler l'importance de la nation comme cadre de référence et de développement, comme seul tremplin vers l'universel, et citer à ce propos Jean Jaurès, comme il se plaît de le faire à l'occasion? Réaffirmer que croire aux nations, c'est croire à la politique, c'est-à-dire croire à l'emprise des hommes et des femmes sur leur destin? De là, enchaîner sur la crise financière qui démoralise tous les citoyens du monde et à propos de laquelle il semble bien décidé à agir avec toute l'énergie et le volontarisme qui est le sien?
C'est ainsi que ce discours de Québec marquerait l'apothéose de la présence française aux fêtes du 400e. La France a été, pendant toute cette année 2008, très active, beaucoup grâce à l'action dévouée et efficace du président du comité français, Jean-Pierre Raffarin; elle a été à la hauteur des relations profondes, intenses, uniques qui unissent nos deux nations. Des relations qui dépassent la dimension strictement politique, qui lient nos étudiants, nos universités, nos régions, nos entreprises, nos jeunes via l'Office franco-québécois pour la jeunesse, nos organisations non gouvernementales, des milliers de nos concitoyens, regroupés dans ce formidable réseau que constituent les associations France-Québec et Québec-France, sans oublier nos artistes, comme on a pu, notamment, le constater cet été sur les plaines d'Abraham lors d'un grand concert.
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Membre associée du CÉRIUM et coordonnatrice du Réseau Francophonie


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