Le début de la fin?

On ne peut jurer de rien... sauf chez GESCA!


Le dernier sondage CROP-La Presse, publié le week-end dernier, nous apprenait que l'option souverainiste est en perte de vitesse, à 35%, et que les deux partis qui défendent cette thèse ne sont pas à leur meilleur. Le Parti québécois est maintenant devancé par les libéraux, et le Bloc québécois est à égalité avec les conservateurs.

Est-ce qu'on peut en déduire que le projet souverainiste a du plomb dans l'aile et prédire sa mort prochaine. Il est extrêmement téméraire de sauter aux conclusions sur la foi d'un seul sondage.
D'autant plus qu'une première nuance doit être apportée. La maison CROP a cessé de poser sa classique question sur la souveraineté-partenariat au printemps dernier, parce que le PQ lui-même a abandonné ce concept. On demande maintenant aux répondants s'ils veulent ou non «que le Québec devienne un pays souverain». Le changement de question fait perdre au moins cinq points de pourcentage au oui et explique en partie la perte de vitesse de l'option.
Mais il n'en reste pas moins que cette nouvelle question ressemble sans doute beaucoup à celle qui serait posée dans un éventuel référendum. Et le résultat est là. À peine un peu plus d'un électeur sur trois appuierait la souveraineté. On est loin du compte.
Première question: est-ce que cela veut dire que le projet souverainiste est mort? Évidemment pas. Cette idée, profondément intégrée à notre vie politique, appuyée par un grand nombre de Québécois, est là pour rester, et résistera aux vents et marées.
Seconde question: les déboires récents de l'option représentent-ils un sursaut conjoncturel ou le début d'une dégringolade? Les mouvements d'opinion vont dans tous les sens. Le contexte actuel n'est pas favorable à la souveraineté, mais cela peut changer rapidement. N'oublions pas qu'il y a un mois, en février, l'appui au oui était à 41%.
La vraie question n'est pas là. Le projet n'est certainement pas mort, il peut certainement connaître des jours meilleurs. Mais peut-il susciter une adhésion assez forte pour que les souverainistes puissent remporter un référendum et faire du Québec un pays souverain? Ce ne sont évidemment pas les données d'un seul sondage qui nous permettront de répondre à cette question.
Le sondage CROP de mars ne fait que mettre en relief une réalité que l'on peut constater depuis de très nombreuses années. Et c'est qu'il n'y a pas, au Québec, une adhésion majoritaire, claire et stable pour le projet souverainiste.
Ce constat, les leaders souverainistes eux-mêmes l'ont fait, année après année, depuis 1995. Avec le concept de conditions gagnantes, ils ont repoussé l'échéance d'un référendum qu'ils savaient ne pas pouvoir remporter. Et c'est le même constat qu'a fait la nouvelle chef, Pauline Marois, en modifiant l'article 1 du programme de son parti pour repousser aux calendes grecques une consultation qu'elle ne peut pas gagner.
Il y a des moments où l'appui à l'option souverainiste a été élevé. Mais, paradoxalement, ces revirements de l'opinion publique n'ont rien de réjouissant pour les souverainistes, en raison de leur volatilité. Par exemple, au plus fort du scandale des commandites, le oui a été majoritaire pendant plusieurs mois. Mais cet appui soudain, éphémère, épidermique, est retombé aussi vite. De la même façon, les sondages CROP récents montrent que l'appui au oui est passé de 32% en juin dernier, à 41% en février et à 35% en mars. Ce sont des déplacements énormes, où le oui voit ses appuis augmenter de 28% en huit mois, pour baisser ensuite de 14% en un mois.
Qu'est-ce que ça veut vraiment dire? Peut-on changer aussi vite d'idée sur un enjeu aussi fondamental? Cela nous montre qu'une partie des appuis à la souveraineté est extrêmement fragile et n'exprime sans doute pas la volonté d'un peuple de se doter d'un pays. Ces appuis changeants n'offrent pas non plus aux stratèges souverainistes le type de soutien indéfectible dont ils auraient besoin pour construire un pays.
Ce que montrent les sondages, et ce n'est pas nouveau, c'est que le Parti québécois ne pourra pas remporter un référendum à moins de compter sur le hasard. En fait, le mouvement souverainiste, qui n'est pas vraiment plus près du but qu'il y a quarante ans, est dans une impasse, qui n'a rien de temporaire et de conjoncturel.
Bien sûr, parce qu'ils sont dans une période de déni, les stratèges souverainistes s'accrochent à l'idée qu'une victoire est toujours possible dans un avenir plus lointain. Mais quelles forces, quel contexte feraient en sorte que ce qui n'était pas possible hier, qui n'est pas possible aujourd'hui, qui ne sera pas possible demain, puisse devenir possible après-demain?


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