La voix du Québec

Kyoto



Pendant deux jours dans la salle de conférence des bureaux de l'ONU à Naïrobi, les représentants de dizaines de pays se succéderont au micro pour vanter leurs efforts dans la lutte aux changements climatiques. Chacun aura son 4 minutes de «gloire», c'est-à-dire de discours que personne n'écoutera, sauf peut-être quand les porte-parole des grandes puissances prendront la parole.


Le ministre québécois de l'Environnement, Claude Béchard, aurait aimé accaparer 45 des 240 secondes auxquelles a droit son homologue canadienne, Rona Ambrose. Quand Mme Ambrose a refusé, M. Béchard s'est choqué, voulant apparemment avoir l'air plus souverainiste que les souverainistes. Il était pourtant évident qu'Ottawa dirait non. Comme l'explique samedi dans La Presse mon collègue Alain Dubuc, il n'y aucune raison que le Québec jouisse d'un statut particulier dans une instance internationale où il n'est pas question de culture, mais d'environnement.
En ce domaine en effet, le Québec n'est en rien distinct du reste du Canada. Si son bilan est plus reluisant en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre, ce n'est pas parce que les Québécois sont plus écologistes ou ont consenti de plus grands sacrifices. C'est tout simplement parce que nous sommes nés sur une terre riche en rivières. Nous gaspillons autant d'énergie que les autres nord-américains mais, par pure chance, une bonne partie de cette énergie est propre.
Le gouvernement conservateur est contre Kyoto, c'est vrai, et celui de M. Charest est pour. Cela ne nous donne pas le droit de prendre la parole dans un forum international pour planter le gouvernement fédéral. Toutes les provinces pourraient réclamer ce même droit; cela donnerait 21 secondes à chacune. L'environnement serait bien avancé!
Au sujet de Kyoto, les Québécois ne sont pas plus vertueux que les autres Canadiens. Dans la grande majorité des provinces, les gens sont favorables au protocole; c'est le gouvernement Harper qui n'est pas en phase avec l'électorat sur cette question.
Le Québec n'est pas davantage muselé à Naïrobi que ne l'est la Californie. Si les Québécois veulent faire entendre leur voix dans le monde au sujet des changements climatiques, ils n'ont qu'à faire comme les Californiens : adopter des mesures audacieuses, devenir un exemple. Absolument rien ne nous empêche de le faire dès maintenant. Comme le démontrait la semaine dernière dans les pages de La Presse le professeur de droit constitutionnel Jean Leclair, «les provinces, plus encore que le gouvernement central, ont entre les mains tous les leviers législatifs nécessaires à une réglementation musclée des activités polluantes.»
Si le Québec devenait l'un des rares états d'Amérique du Nord à atteindre les cibles de Kyoto, il se ferait remarquer. Pas mal plus en tout cas que si M. Béchard résumait son plan vert, en 45 secondes, devant quelques diplomates bâillant aux corneilles.

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    16 novembre 2006

    Monsieur Pratte
    Après avoir pris connaissance des éloges faits au Québec par les délégués présents à Nairobi, vous pourriez peut-être admettre dans un prochain éditorial que les Québécois, même ceux du PLQ, sont capables de nous représenter dignement à l'échelle internationale. Même s'ils ont été baillonnés par Ottawa et n'ont pu discourir sur la tribune officielle, ils ont quand même prouvé au reste du monde que les Québecois étaient bien en avance sur le reste du Canada en matière d'environnement. Croyez-vous encore que l'éblouissante Rona Ambrose a bien défendu la position du Canada, y incluant le Québec? Elle a fait bien piètre figure et vous le savez bien. Comme porte-parole du parti libéral, vous pourriez quand même admettre que le score final est Québec 1 - Canada 0. Même si je suis souverainiste, je suis Québécois et je préfère que le Québec soit représenté par des Québécois au niveau international. On n'est jamais mieux servi que par soi-même.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 novembre 2006

    Nous aussi on baille aux corneilles quand on vous lis.
    Ça ne vous empêchera pas d'écrire pour autant...
    ...malheureusement.
    Dominique Frappier

  • Archives de Vigile Répondre

    16 novembre 2006

    Si le Québec était un pays souverain indépendant, le ministre Béchard aurait droit à 240 secondes.
    La province de Québec a droit à ZERO seconde. C'est normal puisque le pays souverain c'est le CANADA.