SURPLUS BUDGÉTAIRE À QUÉBEC

La tentation des bonbons

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Le gouvernement Couillard doit d'abord réparer les torts causés par sa politique d'austérité

Ce n’est pas une mauvaise nouvelle, de prime abord, que les finances du Québec affichent un surplus. Encore faut-il qu’il y ait réellement surplus ! Si oui, comment a-t-il été dégagé ? Scénario prévisible : le gouvernement Couillard, dans l’espoir de conserver le pouvoir en 2018, sera fortement tenté, d’ici là, de multiplier les bonbons tous azimuts. Il ferait mieux d’établir une priorité et de guérir durablement notre système d’éducation, qui a pâti de ses décisions ces dernières années.
Que le Québec, en cette période de marais économique, fasse un surplus pour 2015-2016 n’est évidemment pas une mauvaise nouvelle. L’Ontario prévoit faire un déficit de 5,7 milliards de dollars pour le même exercice financier. Le mois dernier, l’Alberta admettait être dans le rouge de 6,4 milliards de dollars.

Les agences de notation seront ravies. Standard & Poor’s et Fitch ont déjà amélioré la cote du Québec en juin. Bien sûr, on peut trouver rageant de devoir faire plaisir à ces analystes au coeur sec et qui nous ont trompés — impunément — dans le passé (pensons, avant 2008, à ces cotes AAA accordées aux agglomérés d’« actifs » toxiques…). Mais c’est là la rançon de l’emprunt… La bonne opinion de ces agences a au moins pour effet que nos dettes auront tendance à nous coûter moins cher ; leur poids sera moins lourd.

Pour certains, tout surplus est un scandale : l’argent aurait dû être dépensé. Mais en soi, il ne faudrait pas oublier qu’en période de croissance, même faible, tout gouvernement devrait viser un budget équilibré. La doctrine de Keynes l’a bien établi : c’est en période de récession que le gouvernement ne doit pas hésiter à faire des déficits. Une fois la récession terminée, le gouvernement doit tenter de diminuer le poids de sa dette. Le déluge de dépenses qu’a décidé d’engager le gouvernement Trudeau à Ottawa à un moment où l’économie n’affiche pas, à proprement parler, de récession heurte cette logique économique traditionnelle. Même le parti Québec solidaire, à la réputation dépensière, a souvent promis des budgets équilibrés, depuis ses débuts. Communiqué du 2 mars 2007 : « Québec solidaire, seul parti à présenter un cadre financier équilibré. » Viser l’équilibre ne découle pas nécessairement d’une « idéologie néolibérale » mangeuse d’enfants, mais d’une responsabilité politique élémentaire. Que nos gouvernements passés aient négligé ce fait a conduit le Québec à la situation actuelle : le service de la dette nous coûte quelque 11 milliards de dollars par année.

Au reste, de quelle taille est l’actuel surplus ? Le rapport mensuel des opérations financières de mars (dévoilé la semaine dernière) indique 1,653 milliard de dollars — 1,803 si l’on ajoute la « provision pour éventualité », non dépensée en 2015-2016. On ne saura toutefois qu’à l’automne, lorsque les comptes publics seront déposés, l’ampleur réelle du surplus. Certains, comme l’ancien secrétaire du Conseil du trésor Denis Bédard (voir Le Devoir du 9 juin), estiment que l’équilibre budgétaire de nos gouvernements relève du « mirage ». La preuve en est que le Québec a continué à s’endetter pendant ce temps.

Ces nuances et analyses n’empêcheront pas le gouvernement Couillard de se vanter pour autant. Il martèlera qu’il a réussi le tour de force d’imposer une rigueur « sans austérité toxique ». La preuve en est, déclarait le ministre des Finances, Carlos Leitão, le 6 juillet, que les revenus des impôts, tant ceux des particuliers que ceux des entreprises, ont augmenté. Pour ensuite conclure : « L’économie va bien. » Le ministre omet de dire qu’il est allé chercher pas mal de sous dans les poches des particuliers lors de la mise à jour économique de novembre 2014 (262 millions pour 2015-2016), mais aussi des entreprises. Il avait appelé cela des « gestes immédiats portant sur les dépenses fiscales ». Quant aux entreprises, il leur a aussi soutiré d’importants montants pour le « marché du carbone » (859 millions pour 2015-2016).
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