COÛTS DE LA CIMENTERIE DE PORT-DANIEL

Cimenterie et «menteries»

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Les choix économiques douteux de Pauline Marois

Les titanesques dépassements de coûts du projet de cimenterie de Ciment McInnis, en Gaspésie, ont de quoi inquiéter. Les contribuables québécois ont malgré eux investi massivement dans le projet et pourraient devoir encore ajouter de l’argent. Une réédition partielle ou complète de la malheureuse aventure de la Gaspésia n’est pas à exclure, d’autant que les leçons qu’on en avait tirées ont été ignorées.
D'abord, les chiffres : entre 400 et 450 millions de dollars de dépassements de coûts ! L’équivalent d’un amphithéâtre de Québec. Comparable à ce que le Québec, sous différentes formes, a accordé en aide initiale à ce projet évalué au départ à 1 milliard de dollars. Les politiciens soutiennent qu’il n’y a pas de subventions comme telles, mais on nage ici dans l’argent public : prêt de 250 millions par Investissement Québec (IQ). IQ y a ajouté une participation de 100 millions de dollars en capital-actions. Enfin, la Caisse de dépôt et placement (CDPQ) l’a imité.

Dans une vidéo promotionnelle, il faut entendre le président-directeur général de Ciment McInnis, Christian Gagnon, soutenir qu’une « équipe chevronnée », avec des « investisseurs chevronnés », s’occupera de mener à bien ce projet. Quelques mois plus tard, on apprend, par le truchement du Globe and Mail, que les « chevronnés » ont laissé le plafond être défoncé.

Comment expliquer l’explosion des coûts ? Les réponses à cette question ont varié énormément. La poursuite du concurrent Lafarge ? Les exigences environnementales ? Les ajouts aux projets ? La porte-parole de Ciment McInnis en a fait rire plusieurs avec cette comparaison : « C’est comme si, pendant la construction d’une maison, on décidait d’ajouter une salle de bains. Le projet devient plus cher. » Autre explication : l’accélération des travaux visant à respecter l’échéancier… Cela rappelle étrangement une maxime, placée en exergue du rapport Lesage de la commission d’enquête sur le fiasco de la Gaspésia : « Précipitation est mère du regret. »

Depuis le départ, en fait, on a le sentiment que ce projet sera source d’énormément de regrets. Il fut annoncé par Pauline Marois avec un électoralisme dégoulinant. Lors de la conférence de presse, elle avait affirmé que la circonscription de Bonaventure avait fait « un très bon choix » aux élections précédentes. Car on pouvait constater, avec l’aide à la cimenterie, « les résultats […] de ce choix »… Les Gaspésiens doivent voter du bon bord, on le sait. Puis, le gouvernement Couillard s’est laissé convaincre que c’était un bon projet. Il semble toujours prêt à aider Bombardier (dont un des administrateurs et actionnaires, en passant, est l’ancien premier ministre libéral Daniel Johnson, qui fut entre autres maître de la transition entre les gouvernements Marois et Couillard). Et on sait que le PLQ rêve de reconquérir des circonscriptions dans la péninsule. Électoralisme…

Autre fait transpartisan… et cocasse, la Coalition avenir Québec s’opposait à l’aide de l’État à ce projet. « J’aime bien les Gaspésiens, mais pas le gaspillage », s’amusait à dire François Legault. Son ami et ancien député « économique » à la CAQ, Christian Dubé, ne ratait pas une occasion de critiquer cet engagement de l’État, de dire que la Caisse risquait trop gros. En juillet 2014, à la Commission des finances publiques, il déplorait que le dossier ait été « quand même assez politisé ». Or, c’est M. Dubé, aujourd’hui vice-président à la CDPQ, qui est chargé du dossier pour elle… C’est lui qui, aujourd’hui, garantit que ce projet sera rentable, grâce au marché américain. Espérons-le. Pour l’instant, il demeure un des projets industriels les plus polluants de l’histoire du Québec. Et les autres cimenteries québécoises — qui fonctionnent à 60 % — et des sénateurs américains y voient une concurrence déloyale. Ces derniers le contesteront-ils en vertu de l’ALENA ?
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