Québec -- À la fin du présent mois, la réserve de 2,3 milliards de dollars de Monique Jérôme-Forget, qui devait lui servir à équilibrer l'exercice financier actuel (2008-09) et le prochain (2009-10), sera presque déjà entièrement vide.
C'est ce qu'on peut conclure en consultant le rapport mensuel des opérations financières au 31 décembre 2008, rendu public en fin de journée hier par le ministère des Finances. À une dizaine de jours du discours sur le budget 2009-10 et alors qu'il reste trois mois à comptabiliser dans l'exercice financier actuel (janvier, février et mars 2009), le document indique que, «pour les trois premiers trimestres de l'année en cours, le solde budgétaire aux fins de la Loi sur l'équilibre budgétaire montre un excédent de 1,5 milliard de dollars des dépenses sur les revenus».
C'est déjà plus que la somme de 1,204 milliard que le gouvernement Charest prévoyait utiliser pour boucler la présente année financière (2008-09), comme il l'avait soutenu dans le Point sur la situation économique et financière du 4 novembre 2008, à la veille du déclenchement des élections.
Pour le mois de décembre uniquement, l'État a enregistré un déficit de 177 millions de dollars. En décembre 2007, c'était au contraire un surplus de 679 millions de dollars que l'État avait pu engranger.
Au total, les «revenus autonomes» du Québec sont en baisse de 179 millions de dollars pour l'année. Situation attribuable au «ralentissement de la croissance économique» -- le document évite le mot «récession» -- et à l'impact des deux mesures fiscales: la baisse de l'impôt sur le revenu, en vigueur depuis le 1er janvier 2008, et la réduction du taux de la taxe sur le capital. Pour la période d'avril à décembre, l'impôt sur le revenu est en baisse de 1,3 % et l'impôt des sociétés, de 17,3 %.
Au reste, Québec a davantage dépensé en 2008-09. Au 31 décembre, on enregistre une hausse de 2,5 milliards de dollars de dépenses par rapport à 2007. Les grands responsables de ces augmentations sont Santé et Services sociaux (ajout de 1,4 milliard de dollars), Éducation et Culture (635 millions de dollars) ainsi que Gouverne et Justice (348 millions de dollars).
Quelques aspects viennent compenser en partie cette perte de revenus. D'une part, le service de la dette, qui s'élève à 5,0 milliards de dollars au 31 décembre, ce qui constitue une baisse de 220 millions par rapport à décembre 2007. Les transferts fédéraux sont aussi en hausse: à 10,5 milliards de dollars pour les neuf premiers mois de l'exercice, il s'agit d'une augmentation de 617 millions en comparaison avec la même période en 2007-08.
Janvier noir non compilé
Les chiffres compilés au 31 décembre ne comportent évidemment pas «l'épouvantable» mois de janvier 2009 que la ministre Jérôme-Forget avait déploré, le 11 février, lorsqu'elle fut contrainte d'admettre que le Québec serait en déficit en 2009-10.
Il a été impossible hier d'avoir des chiffres précis sur ce mois, mais la ministre n'avait pas caché sa frayeur. «Il y a eu une détérioration brutale [des revenus de l'État] en janvier», avait déclaré la ministre lors de son point de presse. «Je peux vous dire que le ministère des Finances a été extrêmement ébranlé par ce qui se passait en janvier», disait-elle pour justifier ses mauvaises prédictions du 4 novembre. Toutefois, à la lecture du rapport mensuel sur les opérations financières au 31 décembre, on peut voir que la situation avait commencé à se dégrader bien avant ce janvier noir. Mais au ministère des Finances, le porte-parole Jérôme Thibaudeau signale qu'il est toujours «délicat d'interpréter les rapports mensuels» puisqu'il y a toujours plusieurs fluctuations, par exemple des acomptes provisionnels versés en retard par les sociétés.

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