La gestion de l'offre de produits agricoles coûte 300 $ par famille au Québec

Réaction: "Le gouvernement conservateur accorde-t-il foi au pamphlet idéologique de l’IEDM sur la gestion de l’offre?"

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Agroalimentaire - gestion de l'offre

(Photothèque Le Soleil) - Au moment où la Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois débute ses audiences nationales, il faut savoir que la gestion de l'offre du lait, des oeufs et de la volaille coûte au moins 300$ par an de plus à une famille de quatre personnes au Québec, soit 575 M $ pour tous les Québécois.
Malgré une tendance généralisée en faveur de la libéralisation des marchés et de la concurrence, la plupart des politiciens et des intervenants du milieu agricole québécois continuent de défendre le système de gestion de l'offre. Ce système d'inspiration protectionniste, qui fonctionne en grande partie comme un cartel, est coûteux et inéquitable. Le secteur agroalimentaire doit s'adapter à la concurrence internationale et cesser de pénaliser les consommateurs et, à long terme, les agriculteurs eux-mêmes. Plus on tardera à s'adapter à la concurrence, plus la transition sera difficile.
Les consommateurs sont les perdants
La gestion de l'offre permet aux producteurs de lait, de volaille et d'oeufs du Canada, dont la grande majorité sont situés au Québec et en Ontario, d'ajuster leur production afin de protéger leurs revenus. Pour ce faire, des quotas sont fixés pour correspondre à une évaluation arbitraire de la demande intérieure et aux prix souhaités. L'intérêt des consommateurs devient tout à fait secondaire. Des tarifs douaniers astronomiques et la fixation de prix élevés pour ces denrées constituent un impôt particulièrement régressif pour le consommateur à faible revenu.
Au Canada, le prix du lait a augmenté de 53% depuis 12 ans, soit deux fois plus que l'inflation, alors que les coûts de production ont fléchi de 3,8%. La consommation s'est ajustée en conséquence : elle a diminué de 18% pour le lait et de 30% pour le beurre depuis 1980. On prévoit que la consommation de lait diminuera encore de 12% d'ici 2020. Un écart important de plus de 37% existe entre les prix au détail du lait observés au Québec par rapport aux États-Unis. Pour les oeufs, la différence est de 55%. Le poulet se vend au détail plus du double plus cher au Québec.
Les partisans de ce système de gestion de l'offre et les groupes de pression des secteurs agroalimentaires concernés se targuent de ne recevoir aucune subvention. Pourtant, la gestion de l'offre s'apparente en pratique à un pouvoir de taxation octroyé par l'État aux producteurs agricoles. Plutôt que de les subventionner directement grâce aux impôts perçus auprès des citoyens, le gouvernement laisse les producteurs augmenter les prix en leur conférant des privilèges monopolistiques. Cela revient au même, sauf que le gouvernement n'a pas à subir la colère des consommateurs qui ignorent la situation.
La «souveraineté alimentaire» est un cul-de-sac
Ces mécanismes canadiens de mise en marché agricole sont perçus par la communauté internationale comme des interventions gouvernementales protectionnistes qui vont à l'encontre d'une plus grande ouverture au commerce international. Une politique d'isolationnisme économique telle la «souveraineté alimentaire» risque de nuire à la réputation du Canada et d'entraîner des mesures de représailles sur d'autres marchés non agricoles. Le Canada devrait cesser de tenir un double discours, favorable à la libéralisation du commerce international mais protectionniste pour certains marchés agroalimentaires.
Vu qu'il est le quatrième plus grand exportateur et le cinquième plus grand importateur de produits agricoles au monde, le Canada pourrait jouer un rôle de chef de file pour résoudre l'impasse des négociations à l'OMC autour du cycle de Doha. En abolissant son système de gestion de l'offre, le Canada acquerrait la légitimité d'exiger des États-Unis et de l'Europe qu'ils éliminent leurs propres aides gouvernementales. Un succès dans les négociations à l'OMC, en plus d'offrir de meilleurs prix aux consommateurs canadiens, améliorerait l'accès des produits agricoles des pays en voie de développement aux marchés des pays industrialisés et contribuerait à les sortir de la misère.
Plutôt que de protéger une industrie inefficace, le Canada devrait se préparer à répondre à une demande de plus en plus diversifiée et en plein bouleversement. Ces changements concernent l'environnement, la génétique, les méthodes de production et, surtout, l'innovation et l'information. Seule la mise en place de canaux de distribution internationaux permettra à l'industrie agricole canadienne d'accéder à l'information stratégique indispensable. Notre industrie pourra ainsi offrir des produits innovateurs pour rivaliser avec le Brésil, l'Australie, la Chine et l'Inde qui ont pris une avance sur le chemin menant à une économie agricole mondialisée, compétitive et ouverte, en plus des États-Unis et de l'Europe, qui occupent et occuperont des positions dominantes.
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Marcel Boyer*
Vice-président et économiste en chef

Institut économique de Montréal
*L'auteur est titulaire de la Chaire Bell Canada en économie industrielle de l'Université de Montréal
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Réaction
Le gouvernement conservateur accorde-t-il foi au pamphlet idéologique de l’IEDM sur la gestion de l’offre?
Ottawa, le vendredi 24 août 2007 – En réaction à la note de l’Institut économique de Montréal sur les prétendus coûts de la gestion de l’offre pour les consommateurs, le porte-parole du Bloc Québécois en matière d’Agriculture et Agroalimentaire, le député de Richmond—Arthabaska, André Bellavance, se demande si le gouvernement conservateur accorde foi à ce pamphlet idéologique qui témoigne d’un manque de rigueur.
« Si l’on en croit l’Institut économique de Montréal (IEDM), la gestion de l’offre est un système coûteux pour les consommateurs québécois. Pourtant, c’est au Québec qu’on trouve les produits laitiers à plus bas prix. Il serait intéressant de savoir si le nouveau ministre conservateur des Affaires étrangères, Maxime Bernier, estime lui aussi que la gestion de l’offre est un mécanisme qui doit être aboli, a déclaré André Bellavance.
Rappelons que le nouveau chef de la diplomatie canadienne, Maxime Bernier, est un ancien de l’IEDM et qu’il accepte mal tout mécanisme qui déroge aux règles du libre marché.
« Pour ce conservateur originaire de la Beauce où se trouvent de nombreux producteurs laitiers, il serait préférable de dénoncer la position de l’IEDM et d’affirmer qu’il respectera la motion du Bloc Québécois réclamant que le Canada défende l’intégrité de la gestion de l’offre à l’OMC », a conclu André Bellavance.
Détracteur acharné de la gestion de l’offre, l’Institut économique de Montréal étaye notamment sa thèse en soulignant le fait que le prix du lait a augmenté plus rapidement que l’indice des prix à la consommation (IPC) au cours des dernières années.
« C’est peut-être vrai depuis 2004, en raison d’un redressement des prix consenti par la Commission canadienne du lait. Mais l’Institut ne dit pas que le prix du litre de lait serait actuellement de 90 cents, plutôt que 71 cents, si le prix du lait à la ferme avait augmenté au rythme de l’IPC depuis 1980 », a expliqué André Bellavance.
À longue échéance, il est donc clair qu’une déréglementation du secteur laitier désavantagerait les consommateurs et les producteurs. D’ailleurs, c’est dans les pays qui ont déréglementé leur secteur laitier, comme la Nouvelle-Zélande et l’Australie, que les prix à la consommation ont le plus augmenté depuis le début des années 1980.
L’Institut économique de Montréal prétend finalement que la gestion de l’offre constitue une subvention détournée. « Je constate plutôt que grâce à la gestion de l’offre, les producteurs de lait retirent leur revenu entièrement du marché. Les producteurs laitiers du Québec ne reçoivent pas de subvention pour soutenir leur prix », a conclu André Bellavance.
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Source: Site du Bloc Québécois


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