Justin Trudeau a eu une réponse vraiment pitoyable, mercredi.
Les journalistes le questionnaient sur l’idée d’étendre la loi 101 aux entreprises et organismes de compétence fédérale.
« Ces jours-ci, notre priorité, c’est de protéger [...] les individus, ceux qui sont en train de vivre dans la peur de la COVID-19. Et c’est ce sur quoi nous nous concentrons », a-t-il ânonné.
Bien sûr que la pandémie en est à un stade critique.
Cela ne rend toutefois pas les autres questions taboues ! D’ailleurs, il en abordera évidemment de nombreuses dans son discours du Trône, bientôt.
Avec cette esquive, on comprend que le chef libéral canadien n’est pas chaud à l’idée, voire qu’il la rejette.
Oh, mais attention, a-t-il insisté : « Le Parti libéral du Canada sera[it] toujours là pour protéger la langue française. »
Fadaises...
Consensus
Ça me rappelle Jean Charest, en 2012, en pleine campagne électorale. « Je veux travailler partout, tout le temps, au renforcement de la langue française », avait-il certifié.
L’ennui : il venait de faire volte-face précisément sur cette même question de l’application de la loi 101 aux entreprises et aux organismes fédéraux.
Cette idée qui donnerait un coup de pouce au français est dans le décor depuis 2007. Depuis 13 ans, le Bloc québécois, puis le NPD (avec l’appui du Parti vert) ont déposé quelque cinq projets de loi en ce sens. Tous rejetés ! Au Québec, la CAQ a promis de le réclamer au fédéral en 2018 ; ce que François Legault a fait depuis son élection.
D’ailleurs, Erin O’Toole, le nouveau chef conservateur, se dit maintenant favorable. Bref, aujourd’hui, quatre partis et 180 députés y sont favorables. Une « majorité claire » aux Communes !
Mais Justin Trudeau se dérobe en invoquant la COVID...
La CAQ
En 2012, pendant quelques heures, Jean Charest s’était aussi prononcé en faveur. En mobilisant un argument de taille : « Le Parlement fédéral [...] a quand même reconnu le Québec comme nation. Bon ! Donnons un sens au mot. »
C’était très juste. Et concordait avec le type de fédéralisme qu’il prétendait défendre : « asymétrique ». C’est-à-dire que le Québec, comme nation, doit avoir, dans le Dominion, un traitement adapté à cette réalité fondamentale.
À l’époque de l’Accord du lac Meech, on appelait cela « société distincte ». (Mais comme on le sait, cette entente a expiré... en grande partie en raison de Trudeau père.)
Revenons à 2012. Un tollé au sein du PLQ avait forcé M. Charest à faire volte-face. L’ancienne députée montréalaise du PLC, Marlene Jennings, avait soutenu qu’avec une telle mesure, la communauté anglophone n’aurait d’autre choix que de se tourner... vers la CAQ, plus à même de la protéger ! (La CAQ de l’époque avait Dominique Anglade comme présidente et candidate vedette.)
En 2020, notons-le, la Commission jeunesse du PLQ s’est dit en faveur de l’idée d’étendre l’application de la loi 101. Cela crée des malaises à l’interne, mais « la porte n’est très certainement pas fermée à ce stade-ci », a soutenu André Fortin, du PLQ. À suivre.