L'avocat Lucien Bouchard

Chronique de Louis Lapointe

Personne ne peut nier que Lucien Bouchard ait déjà été à sa façon un grand tribun et un leader charismatique. Mais voilà, depuis 9 ans, il est avocat au sein d’un important cabinet d’avocats juif de Montréal, Davies, Wards, Phillips, Vineberg. Si, jadis, comme premier ministre, il représentait tous les Québécois, aujourd’hui, à titre d’avocat, il défend les intérêts de ses clients et de sa firme.
Lucien Bouchard est avocat d'affaires, alors que Pauline Marois est la chef du Parti Québécois, une importante distinction dans le débat qui s’est engagé entre ces deux protagonistes. L’un représente des clients, l'autre aspire aux plus hautes fonctions publiques et souhaite devenir première ministre du Québec et réaliser un jour la souveraineté du Québec. L’un dépend des honoraires que lui versent ses clients, l’autre est rémunérée par les contribuables. Leur éthique n’est pas la même, pas plus que leurs intérêts respectifs qui sont voués à des objectifs tout à fait opposés.
Lorsque l’avocat Lucien Bouchard s’exprime en public, rien n'exclut qu'il puisse utiliser les forums qui lui sont proposés pour défendre non seulement sa vision, mais également celle de ses clients. Dans cette perspective, fidèle à son serment d'avocat, sa loyauté appartient d'abord à ses clients, pas aux Québécois.
Lorsque Lucien Bouchard nous dit qu’il est souverainiste, mais que la souveraineté n'est pas réalisable, son engagement politique ne peut pas être qualifié d'intéressé, puisque, dans un souci d'objectivité, il a le mérite de demeurer indépendant à l'égard de ses convictions personnelles, un avantage incontestable pour ses clients fédéralistes. À l'époque où il représentait des partitionnistes du West-Island de Montréal, l'avocat Guy Bertrand n'avait pas fait preuve d'autant d'abnégation, ayant clairement endossé la cause de ses clients!

Lorsqu’il se porte à la défense de son frère Gérard que Pauline Marois aurait traité d’Elvis Gratton, sans équivoque, Lucien Bouchard nous indique que sa famille passe avant la nation. Comment pourrait-on le lui reprocher?
Lorsqu’il reprend publiquement le credo des lucides, encore là, comment ne pas aussitôt constater qu'il défend avec conviction une vision de la société où ses clients seront favorisés? N'est-ce pas là le rôle de l'avocat?
Lorsqu’il supporte la politique du gouvernement Charest à l’égard des écoles juives orthodoxes, l'homme est fidèle aux valeurs que porte son cabinet d’avocats. Ne s'agit-il pas là de nobles sentiments que nous ne saurions remettre en doute?
Lucien Bouchard n’est pas et ne prétend plus être un homme politique, il ne représente plus les Québécois, il est d'abord un dévoué avocat d’affaires au service de ses clients et de sa firme! Un bon père de famille qui a quitté la vie publique et choisi de gagner honorablement sa vie.

Featured bccab87671e1000c697715fdbec8a3c0

Louis Lapointe534 articles

  • 888 979

L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





Laissez un commentaire



8 commentaires

  • Lionel Lemay Répondre

    22 février 2010

    Comment peut-on croire à la sincérité d'un homme qui est imbu de lui-même, qui butine d'un parti politique à un autre pour assurer sa survivance et qui doit protéger les intérêts de ses employeurs et ses clients dont la majorité, comme son épouse, seraient d'origine juive.
    Cet homme ne peut donner une opinion politique objective pour ne pas blesser son entourage parce qu'il vit une condition de multi ou interculturalisme au sein de sa propre famille, une politique préconisée par son frère.
    J'espère que les vrais souverainistes vont prendre le contrôle du PQ et nous redonner notre pays conquis par les Anglais en 1759.

  • François Taylor Répondre

    21 février 2010

    Lucien, le pays se passe d'abord dans la tête!!
    Un pays se construit d'abord par l'énergie pure
    Celle du rêve et du désir fou de se dire enfin oui.
    Harnachons cette ressource souterraine mais sure,
    alors le futur avec le passé ne sera pas enfouis.
    Comptables et gestionnaires importants comme ils sont,
    Restent sans outils pour faire éclore les possibles en pensée.
    Laissons-les dans les coulisses peaufiner leurs façons,
    Pendant que nous démarrons les feux de joie du pays rêvé.
    La contrée en devenir possède la force de rassembler.
    Car à son ombre les arc-en-ciel prendront rendez-vous.
    Sans exclure ni privilégier, oui à tous elle offrira un foyer,
    Les damnés de la terre y vivront leur exil triste mais doux.
    Déficit, tarifs, taxes, exportations; tous des mots obligés,
    Des outils pour consolider ce que nous aurons enfin bâti.
    Sans forces pour gonfler les voiles pour notre odyssée,
    ils affament l'âme en domestiquant le risque et la nuit.
    Commençons donc par le commencement, par le dire.
    Traçons par nos mots sans relâche l'avenir à ériger
    Avec des envolées fébriles disant la joie d'être sires
    Le plaisir grave de tenir la barre de notre grand coursier.
    Des milliers et des milliers de jeunes attendent le signal,
    Afin qu'au projet si peu fou on se remette enfin à croire.
    Le rêve ne sera plus des marchands planétaires le vassal
    Investi qu'il sera dans la solidarité et ses couteux devoirs.

  • Archives de Vigile Répondre

    20 février 2010

    Vous êtes quant à moi bien complaisant à l'égard de ce gros égo du Barreau!
    En fait cet homme appartient à un parti à membre unique: lui, lui-même et rien d'autre que lui. Un père? Non pas tant un père de famille qu'un "père supérieur", vengeur et moralisateur! Rien de plus à offrir à ses enfants, ce père de famille, qu'une gueule de lendemain de veille!
    A-t-il jamais été plus qu'un opportuniste de grand chemin, ce conservateur, bloquiste, péquiste, lucide, establishment de Môntrial?
    Avez-vous noté comme il a laissé tomber tout le monde? C'est lui qui doit briller, les autres et les "causes" ne sont que des occasions de mettre son lui-même en valeur.
    Il faut qu'une société soit effectivement bien en panne de projets pour se délecter du spectacle de ce catho. du 19ème!

  • Archives de Vigile Répondre

    18 février 2010

    Comment se fait-il que Jacques Parizeau reste toujours indépendantiste malgré tous les revers qu’il a connus au cours de sa vie politique et que Lucien Bouchard semble s’y opposer aujourd’hui, la définissant comme non réalisable ? Comment un homme qui croyait que la solution au problème du Québec était la souveraineté, peut-il conclure aujourd’hui que cela est devenu impossible ? Quel avenir voit-il pour la nation québécoise ? Une nation québécoise qui n’en sera plus une, parlant anglais uniquement et soutenant le multiculturalisme ? Une zone administrative soumise au diktat du grand Canada pour l’éternité ? Nous invite-t-il à l’assimilation progressive ? À ce chapitre, le message est confus.
    Je crois que son égo ne le rend pas lucide. Je crois qu’il a le discours d’un homme blessé ou peut-être celui d’un homme qui a depuis longtemps menti aux souverainistes et aux québécois dans leur ensemble. Une chose certaine, il n’a pas la persévérance, ni la capacité de réflexion, ni le réalisme d’un Jacques Parizeau en ce qui a trait à l’avenir de la nation québécoise, à la seule et unique solution pour assurer notre survivance comme nation francophone en terre d’amérique.

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    18 février 2010

    @ Louis Lapointe:
    Ah, excusez-moi, monsieur Lapointe. J'avais oublié un détail...
    Je vous soumets un petit complément, que je juge pertinent: l'épouse de Lucien Bouchard, Mme Audrey Best, est anglophone et juive. Et si je ne me trompe pas, les deux fils de Lucien Bouchard ont fréquenté des écoles privées juives, à une époque.
    Cordialement,
    JF

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    18 février 2010

    @ Louis Lapointe:
    «Lorsqu’il supporte la politique du gouvernement Charest à l’égard des écoles juives orthodoxes, l’homme est fidèle aux valeurs que porte son cabinet d’avocats. Ne s’agit-il pas là de nobles sentiments que nous ne saurions remettre en doute ?»
    La déontologie de la profession d'avocat est une chose, d'accord. Mais quand Lucien Bouchard fait une bruyante sortie publique, où il manifeste notamment, une réelle rancune à l'égard de Pauline Marois parce que cette dernière a dit que le frère de Monsieur, avait une attitude digne d'Elvis Gratton... Est-ce l'avocat, ou l'homme, en son nom personnel, qui parle?
    Je présume, aussi, qu'un avocat n'est pas obligé de défendre une cause civile avec laquelle il serait fondamentalement en désaccord... De voir aujourd'hui Lucien Bouchard se ranger du même côté, idéologiquement, qu'un Julius Grey... ça surprend, un peu.

  • Archives de Vigile Répondre

    18 février 2010

    Monsieur Lapointe,
    Je suis entièrement d'accord avec votre premier paragraphe.
    Pour le reste, je crois que le métier d'avocat est pour le moins amphibologique !
    Quelle mal de chien doit se donner la conscience d'un avocat honnête !
    Je vous souhaite une bonne journée,
    Hélèna.

  • Gaston Boivin Répondre

    17 février 2010

    Si, comme vous en émettez l'hypothèse , monsieur Bouchard avait peut-être reçu, dans le cas d'espèce qui nous occupe, un mandat de l'un de ses clients, et que sa récente intervention publique pourrait avoir eu pour but principal de bien et mieux servir ce mandat et ce client, il n'en demeure pas moins qu'il ne se serait pas alors adressé à un Tribunal mais au Peuple , ou si l'on veut, à l'opinion publique, et que, ce faisant, il n'aurait plus fait alors du droit mais de la politique. Et, lorsqu'on fait ainsi de la politique, l'on ne devrait pas pouvoir exprimer, dans le cadre d'un mandat privé, une opinion publique que l'on partage ( ou non ) avec un client, si l'on ne précise pas qu'elle est d'abord exprimée dans le cadre d'un mandat privé confié : Dans cette éventualité, que l'on le dise donc au peuple pour éviter tout quiproquo, sinon on abusera, dès lors, en quelque sorte, de la confiance que pourrait nous accorder ce peuple, pour, ainsi la tromper, par omission , quant au motif premier de notre intervention! Le conflit d'intérêt n'existe pas seulement en droit mais également en politique!
    Si cette hypothèse n'est pas la bonne, ce qui est le cas jusqu'à preuve du contraire, alors les propos de monsieur Bouchard doivent être jugés par le peuple tout à la fois à la lumière de sa crédibilité(qui semble augmenter chez les fédéralistes et diminuer chez les indépendantistes), de ses contradictions ou non, et des bien-fondé ou non de ses opinion et intervention et de leur à propos.