L’aventure « héllénico-calendiste » de Facal et Legault

L’art de ramer à contre-courant

Si le leadership de Pauline Marois apparaissait plus solide, c’est le genre de chose qui ne se produirait pas.

Chronique de Richard Le Hir


L’art de ramer à contre-courant
Si le leadership de Pauline Marois apparaissait plus solide, c’est le genre de chose qui ne se produirait pas
Il ne manquait plus que ça ! La rumeur voudrait en effet que Joseph Facal et François Legault forment un nouveau parti nationaliste de droite http://www.vigile.net/Un-nouveau-parti-avec-Legault-et sous l’oeil bienveillant de Lucien Bouchard pour d’abord mettre de l’ordre dans les finances, l’éducation et la santé puis, si l’on a le temps et que le bon peuple n’est pas encore trop écoeuré, faire la souveraineté. Autant dire la reporter aux calendes grecques.
Je vous dirai tout de go que moi, les partis nationalistes de droite, ça ne m’inspire pas une grande confiance. Il faut dire que les modèles de l’histoire ne sont guère enthousiasmants, à moins qu’on ait une attirance particulière pour des personnages comme Benito Mussolini, Francisco Franco, ou Antonio de Oliveira Salazar.
Ou, plus près de chez nous, comme Maurice Duplessis qui, si l’honnêteté la plus élémentaire nous oblige à dire que le Québec lui doit certaines initiatives remarquables (l’électrification rurale, les pensions aux mères nécessiteuses, Radio-Québec, la résistance aux intrusions fédérales dans les champs de compétence du Québec, la perception par le Québec de ses propres impôts) n’en était pas moins une figure autoritaire, rétrograde et anti-démocratique (omniprésence du clergé, anti-syndicalisme primaire, intolérance religieuse, abus de pouvoir, corruption).
Que Lucien Bouchard soit de la partie comme belle-mère de service, accoucheuse ou entremetteuse ne me surprend pas du tout. J’avais déjà eu l’occasion de souligner chez lui certaines ressemblances avec Duplessis dans un article publié dans Le Devoir en 1999 :
« Aujourd'hui, le progrès de la société québécoise passe par une profonde remise en question de ce fameux «modèle», n'en déplaise au premier ministre Bouchard, qui choisit justement l'année du quarantième anniversaire de la mort de Maurice Duplessis pour en faire l'apologie. Ce faisant, non seulement ouvre-t-il la porte à des comparaisons peu flatteuses pour lui-même, mais en plus se trouve-t-il à nous faire réaliser que, si Duplessis est mort, son esprit règne encore. La «Révolution tranquille» a débarrassé le Québec d'une équipe dépassée. La vraie révolution reste à faire pour liquider son esprit. » http://www.vigile.net/spip.php?page=archives&u=archives/auteurs/l/lehirr.html
Or après avoir d’abord appelé à la défense du modèle québécois, Bouchard, toujours en retard d’une conjoncture, et dont la lecture de l’économie n’est pas la première force, a entrepris de le clouer au pilori avec le manifeste des Lucides. Pour ma part, j’ai fait le chemin inverse, justement pour des raisons de conjoncture. Ce qui pouvait apparaître nécessaire en 1999 ne l’est plus du tout aujourd’hui, bien au contraire.
D’abord ça ne s’est pas fait lorsque la conjoncture aurait pu le permettre, et ensuite il n’est surtout pas question de le faire dans la conjoncture actuelle quand celle-ci exige justement le contraire. Pour ceux qui en douteraient, je les renvoie aux propos des prix Nobel d’économie Krugman et Stiglitz dont Vigile s’est fait l’écho au cours des derniers mois et que j’ai eu l’occasion de commenter dans plusieurs articles récents.
Donc l’agenda économique de cette nouvelle droite se trouve complètement disqualifié en partant. Et qu’on cesse de terroriser les Québécois avec la question de leur endettement. Comme je l’écrivais au début du mois de mars dernier :
« Comprenons-nous bien. La situation financière du Québec n’est pas rose, et un coup de barre s’impose incontestablement. Mais ce coup de barre, il s’impose à tous les pays qui ont été ébranlés par cette crise financière que nous n’avons d’ailleurs pas fini de traverser, au premier rang desquels figurent les États-Unis, et relativement parlant, la situation du Québec se situe dans la bonne moyenne. Il n’y a donc pas de quoi s’alarmer, sauf pour comprendre qu’une fois de plus, des efforts concertés sont à l’oeuvre pour faire croire aux Québécois qu’ils n’échapperont aux foudres de Wall Street et de ses agences de crédit qu’en restant bien sagement à l’intérieur du Canada. » http://www.vigile.net/L-autre-grosse-arnaque
Je comprends que M. Facal était en Espagne à ce moment-là et qu’il ignore peut-être même l’existence de ma prose, mais l’Espagne, c’est toujours bien sur cette planète-ci. Alors que ne comprend-il pas à la situation actuelle, et pourquoi cherche-t-il à entraîner les Québécois à sa suite dans une aventure héllénico-calendiste (un néologisme de mon cru formé de l’adjectif « héllénique » qui signifie grec et du nom commun pluriel invariable « calendes ») sans lendemain ? Pour brouiller les cartes ? Au profit de qui ?
Si le leadership de Pauline Marois apparaissait plus solide, c’est le genre de chose qui ne se produirait pas. Où est-elle, au fait ? Le vacuum qu’elle laisse en n’occupant pas la place qui lui revient est en train de provoquer des méchants courants d’air.


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    28 septembre 2010

    Qu'un membre influent de l' ADQ (Mario Dumont) se joigne à ce mouvement et qu'un membre notoire du part libéral (ou deux) qui n'a pas été entaché par les scandales de corruptions en fasse de meme et le tour est joué. L'ADQ s'effondrerait, le parti libéral perdrait des plumes et le PQ en perdrait plusieurs.
    Quant à moi......j'aime bien ce genre de ''stratégie'' qui forcera le Québec à bouger et enfin se débarrasser des libéraux.

  • Archives de Vigile Répondre

    28 septembre 2010

    Je viens de lire le texte de Lisée qui précise les intentions de Facal :
    http://www.vigile.net/Facal-vs-Facal-Je-prends-pour-le
    Un nouveau parti ?
    Ce serait une coalition encore plus solide.
    Un gouvernement de coalition formé de ;
    Québec Solidaire (gauche) - PQ (centre) - Parti de Facal (Droite)
    Tous nationalistes.
    Plus solide, car une coalition à l'intérieur du PQ est bien plus facile pour nos ennemis à diviser (technique du salami).

  • Archives de Vigile Répondre

    28 septembre 2010

    Un parti de droite nationaliste ?
    Ils vont avoir de la grosse misère à recruter, car la majorité des Québécois de droite sont anti-nationalistes. Pour eux, des nationalistes c'est des indépendantistes.
    Facal est trop intelligent pour ne pas savoir ça.
    Donc, ce nouveau parti ne vise pas cette droite là.
    Mon "pif" me dit que c'est une tactique pour récupérer les déçus du PQ qui sont de centre droit et nationalistes. Ce que l'ADQ n'a pas su faire.
    Ensuite, il sagit de faire un PQ de coalition composé du regroupement de la gauche (SPQLibre-qui vient d'être réintégré), du centre (Social-Démocratie de Marois), et maintenant de la droite nationaliste.
    Si c'est véritablement leur projet, alors c'est gagnant. Sinon, c'est la division des forces et Charest qui reprend le pouvoir.