Je te comprends

Comment je suis arrivé à promouvoir la souveraineté, et des perspectives pour aider les indécis à comprendre ce combat

Comprendre notre intérêt national

Contrairement aux Québécois « de souche », la relation des
immigrants envers le Québec n'en est pas une de souvenir mais de
compréhension. En effet, alors que les Québécois indécis à propos de la
souveraineté doivent faire un effort de se rappeler leur histoire, les
immigrants eux doivent faire un effort d'étude et de compréhension. Si le
slogan pour les Québécois est « je me souviens » alors pour les nouveaux arrivants, il devrait être : « je te comprends » !
Pour moi la souveraineté du Québec est devenue une évidence. Et je crois que si des Québécois sont encore indécis, c'est qu'ils souffrent de
quelques blancs de mémoire. Du côté des nouveaux arrivants, je crois qu'il s'agit simplement d'une ignorance presque générale de l'histoire et
l'identité du Québec. Cela est dû en partie soit par leur manque de
curiosité et de respect envers leur société d'accueil ou bien par une
conviction illusoire qu'ils sont simplement dans une province comme les
autres du Canada.
En tant qu'immigrant de première génération, je voulais donc simplement
essayer de partager avec vous ce que j'ai compris de l'histoire et
l'identité du Québec et ce qui m'a amené à défendre et promouvoir la
souveraineté. J'espère ainsi enrichir comme je peux ce combat, et amener les immigrants à se situer dans celui-ci.
L'ouverture sur le monde, l'ouverture sur le Québec
Je suis né au Mexique d'un père mexicain et d'une mère française. Mon père travaillait comme professeur et chercheur dans ce qui est parfois considéré comme l'université la plus importante du monde hispanique. Malgré cette position favorable, il pensait qu'il pouvait trouver encore une meilleure situation aux États-Unis ou au Canada pour lui et pour nous. Par circonstances plutôt que par véritable connaissance et amour du Québec, il a accepté une offre à l'université McGill. J'avais seulement deux mois quand nous sommes arrivés. J'ai donc vécu toute ma vie ici, mais je suis allé toute ma scolarité dans un établissement du programme d'enseignement de France où la majorité des élèves étaient des immigrants comme moi. Ma seule véritable fenêtre sur la culture québécoise a été la télévision : le hockey, RBO, les Bye-bye, Cent limites, etc. C'était des excellentes expériences, mais cela ne m'a jamais fait comprendre en profondeur le contexte historique de la société dans laquelle je me trouvais.
Étrangement, je pourrai dire que mon sérieux intérêt pour le Québec a
commencé à cause des (ou grâce aux) évènements du 11 septembre 2001. Je n'avais que 17 ans, mais cette attaque m'a fait poser beaucoup de questions sur le monde dans lequel je vivais. Je ne pouvais pas accepter les interprétations simplistes des grands médias et je me suis donc mis à faire des recherches, surtout sur Internet. Cette volonté de vérité m'a ouvert les yeux sur la réalité politique et historique de notre monde, et j'ai ainsi pu mieux nuancer mes analyses. J'ai compris, et je le constate encore, que nous ne vivons pas dans un monde très rose. La terre est comme un vaste champ de bataille où des forces politiques, économiques, religieuses et autres se font la guerre dans une volonté soit de domination ou alors de liberté.
Le flambeau de l'humanité dans les mains du Québec ?
La révolution américaine est un excellent exemple d'un combat gagné pour la liberté. Qui aurait cru que ces petites colonies pouvaient renverser le plus grand empire du monde à l'époque ? Qui aurait cru qu'ils réussiraient à gagner cette guerre et instaurer la première république de l'histoire moderne ? Grâce à leur constitution et leur respect des droits de leurs citoyens, les États-Unis sont devenus en quelques années la référence sociale, économique et politique du monde. Ils ont pavé la voie pour les révolutions françaises, haïtiennes, les révolutions bolivariennes des colonies d'Amérique latine, la création des républiques en Europe, etc. Ce petit peuple d'Amérique du Nord a réussi à changer radicalement la face du monde en moins d'un siècle. Mais depuis environ 50 ans, les États-Unis ont graduellement perdu ce statut privilégié, et se sont transformés en empire, perdant ainsi leur statut de civilisation. La question se pose : qui va prendre la relève ? Pas en tant qu'empire, mais en tant que civilisation phare pour l'humanité ? Et pourquoi pas le Québec ?... Pourquoi pas ?
• Je comprends que des Français ont habité le Canada avant les
Anglais ;
• Je comprends que ces colons Français ont bâti le Canada à la sueur
de leur front, faisant face à des conditions souvent très difficiles ;
• Je comprends que l'empire britannique a vaincu la France et
colonisé les Canadiens français ;
• Je comprends que les Canadiens français devenus Québécois se
battent pour leurs droits politiques, économiques et culturels depuis plus
de 240 ans ;
• Je comprends que la réaction de l'empire britannique a été une
réticence violente et même raciste aux aspirations légitimes et naturelles
du peuple québécois ;
• Je comprends que le Québec a montré une combativité, une patience
et une maturité authentique à travers ces décennies de revendications ;
• Je comprends que le gouvernement fédéral canadien a été installé
afin de concilier les aspirations politiques de tous les Canadiens et la
volonté de la couronne britannique de maintenir un contrôle total sur le
territoire ;
• Je comprends que le gouvernement fédéral, voulant garder son
hégémonie, a empêché le Québec de se développer librement ;
• Je comprends que la relation politique actuelle entre le Québec et
le gouvernement fédéral les limite et les contraint mutuellement ;
• Je comprends que les valeurs et les aspirations du Québec sont
particulières et légitimes et que leur seul moyen de se réaliser passe par
la souveraineté politique du Québec.
C'est ce que j'ai compris, et c'est ce qui me force à reconnaître la
légitimité de ce combat. La souveraineté du Québec ce n'est pas un projet capricieux, irrationnel ou enfantin de quelques hurluberlus ; pas du tout. C'est un projet nécessaire qui se voudrait la conclusion positive d'un combat d'un peuple pour la revendication, l'affirmation et la libre
expression de ses droits.
Une civilisation québécoise ?
Je pense avoir compris cela parce qu'en étudiant le monde actuel et notre histoire moderne, je réalise à quel point j'ai été privilégié de vivre au Québec. Plus j'en apprends, et plus je suis content de vivre ici, et pas en France, au Mexique ou aux États-Unis. Le modèle social québécois est
véritablement un exemple pour tous. Ce n'est pas une société parfaite comme aucune ne le sera jamais, mais c'est une société qui a démontré jusqu'à maintenant que malgré les traitements difficiles qu'elle a reçu depuis sa subordination au pouvoir britannique, elle ne cherche pas la vengeance. Elle ne cherche pas à faire souffrir les autres comme elle a souffert, mais cherche plutôt à aider les autres là où elle a réussit. Le Québec est vraiment un modèle politique à ce niveau. C'est une société entièrement industrialisé, éduqué, qui vibre ouvertement avec toute la planète. Il ne lui manque plus que le statut et la reconnaissance officiel comme pays à part entière…
Je pense que les immigrants devraient réaliser la chance qu'ils ont de
vivre ici. Je ne le cache pas : on vit mieux au Québec qu'au Mexique, de
manière générale. Et ça ne veut pas dire que je n'aime pas le Mexique. Mais ça veut dire que l'on doit tous reconnaître que dépendamment des époques, il y a certains peuples qui réussissent mieux que d'autres, à cause de différents facteurs. Si on comparait le niveau de civilisation dans les premiers siècles après Jésus-Christ au Mexique et en France par exemple, on serait forcé de remarquer la supériorité architecturale, artistique et même politique des peuples du Mexique. Si on remonte encore plus loin vers le 3ème millénaire avant la naissance du Christ, et qu'on compare l'Égypte et la Grèce, on doit reconnaître la supériorité de la civilisation égyptienne. L'histoire du monde est une succession de développement de civilisations dans différentes régions de la Terre. La question n'est donc pas de chercher « la meilleure », mais plutôt de voir l'histoire de l'humanité comme un tout, où chaque civilisation passée inspire et guide les civilisations présentes. Si l'on regarde maintenant le Québec, bien qu'on ne peut le considérer comme une civilisation, on peut clairement voir qu'il a tous les potentiels de le devenir. Il lui manque l'outil le plus important du moment : la souveraineté politique. Quand le Québec aura pris cette décision de manière claire et sans équivoque, il affirmera au reste du monde : « je suis prêt à participer à l'avancement de l'humanité activement, librement et en assumant pleinement la responsabilité de mes décisions. » Cela implique qu'on a confiance en soi, en son histoire et dans les valeurs qu'on défend.
La souveraineté du Québec comme remède face à l'apathie politique
Finalement, beaucoup de gens s'inquiètent du sort de l'humanité. Les
jeunes en particulier observent le monde et voient des guerres, des
injustices, des maladies, et toutes sortes de maux et se demandent : «
qu'est-ce que je peux faire ? » Je me suis posé la même question. Certains se referment sur eux-mêmes et se disent « je vais m'occuper de ma survie à moi tout seul ». D'autres décident de s'impliquer dans leur quartier, ou au sein d'organismes humanitaires. Mais la véritable implication, après avoir été un changement spirituel personnel, doit à mon avis être politique. Et quel plus belle occasion que celle de fonder un nouveau pays ?! Le problème que j'ai rencontré plusieurs fois est que les gens ne réalisent pas que le Québec sera fondé selon nos volontés individuelles. Ils pensent que fonder le Québec c'est simplement aller voter oui ou non à un référendum. Pas du
tout. C'est un processus qui va demander à chacun de nous de proposer des idées, de débattre, d'élaborer des projets. Bref, de jeter les fondations de ce pays. Si on fait du Québec un pays, on ne fera pas un pays qui appartient seulement à quelques personnes, mais on fera un pays qui nous appartient tous. Et si nous voulons nous assurer qu'il y fasse bon vivre, mettons-y notre grain de sel et bâtissons-le ensemble.
Beaucoup d'immigrants au Québec restent préoccupés par leur pays d'origine où persistent toutes sortes d'injustices. Je leur dis : « venez participer à la réalisation de la souveraineté du Québec et venez ensuite en aide à ces pays par le biais du Ministère des Affaires Étrangères du Québec ! »

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Romain Angeles5 articles

  • 7 411

Je suis né en 1984. Je suis tuteur. Je me suis présenté à deux élections comme candidat indépendant. J’écris des articles surtout axés sur la politique et la philosophie. Je défends l’idée de la souveraineté pour le Québec.





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9 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    11 septembre 2008

    Superbe texte, qui touche juste et touche bien !
    Bravo,
    Julien

  • Archives de Vigile Répondre

    10 septembre 2008

    De la poésie historique et politique ! Bravo !
    Peut-être prophétique ...
    Sébastien Harvey

  • David Poulin-Litvak Répondre

    3 septembre 2008

    Tres bel article M. Angeles.

  • Jacques Bergeron Répondre

    31 août 2008

    Quel bel exemple d'assimilation «culturelle» de ce Québécois, qui, par l'étude et l'analyse de l'histoire, a choisi de partager notre combat! Celles et ceux qui acceptent de se battre dans tous les combats du monde, même les plus emballants,
    devraient lire cet émouvant témoignage d'un «compatriote» qui a compris que notre combat d'émancipation nationale, tout comme les autres combats, se gagnent d'abord et surtout par
    «l'engagement politique». Le nôtre est seulement différent des autres combats par notre volonté de nous donner un pays indépendant de langue française en terre des Amériques. Il pourra certainement servir d'exemple au monde entier lorsque le Québec sera indépendant, comme cet article est un exemple d'intégration culturelle et politique que tous les Québécois, épris du désir de vouloir vivre en «français» sur cette terre des Amériques, devraient lire.

  • Romain Angeles Répondre

    30 août 2008

    Je vous remercie énormément à tous pour vos beaux commentaires. J'espère que mon texte vous donnera l'inspiration, la motivation et le courage d'agir et de faire rayonner le flambeau de la souveraineté là où des oreilles indécises ou ignorantes seront prêtes à vous écouter. Aucun de nous n'a la réponse finale concernant les moindres détails de la souveraineté, mais nous avons certainement tous des préférences, des suggestions, des revendications, des projets d'amélioration pour la société... À nous la parole!

  • Archives de Vigile Répondre

    30 août 2008

    Merci infiniment, Romain.
    Marie Mance V

  • Lucille Labrie Répondre

    29 août 2008

    Magnifique analyse de notre histoire passé et actuelle.
    La majorité des Québécois de souche sait tout cela mais elle préfère s'endormir au lieu de relever les manches pour faire du Québec un pays.
    Nous allons regretter amèrement notre passivité monsieur Angeles mais il sera trop tard.
    De nombreux pays plus petits que le Québec ont été créés pendant que d'autres peuples sont dispararus ou se meurent comme les Tibétains.
    Hélas, il semble bien que nous vivons un retour du colonialisme anglais et que nous ayons choisi notre folklorisation comme les Acadiens et Franco-Canadiens. Je n'ai pas le goût que mon peuple ne sert qu'à ziguer et à faire des stépettes à la "canayenne" devant des touristes qui viendront nous visiter
    en 2060

  • Georges-Étienne Cartier Répondre

    28 août 2008

    Superbe texte : Merci !

  • Mathieu Gauthier-Pilote Répondre

    28 août 2008

    Mais c'est qu'il écrit fort bien en plus de dire des choses intelligentes...
    Le projet de bâtir un nouvelle République démocratique là où se trouve une vieille colonie, devrait emballer toute personne qui aime les idées et rêve de participer à la construction d'une société plus juste, plus humaine et pourquoi pas une société dont le modèle deviendra un nouveau point de repère dans la marche du progrès de l'humanité.
    Faire l'histoire du Québec, c'est bien. Faire l'histoire tout court, c'est mieux. :-)