Le devoir de ne pas oublier

Depuis quelques jours, un débat sévit dans le forum de La Presse autour de la controverse suscitée par l’éditorial du 23 juillet de M. Pratte intitulé « Espèce de coloniser »

Comprendre notre intérêt national

Depuis quelques jours, un débat sévit dans le forum de La Presse autour de la controverse suscitée par l’éditorial du 23 juillet de M. Pratte intitulé « Espèce de coloniser ».
Cet éditorial était une réplique aux nombreuses réactions de l’éditorial du samedi précédent intitulé « Le calumet de paix ». Exception faite des commentaires de cette Fleur-de-Lys, nous n’avons pas vu aucunes de ces répliques publiées. En fait, quel était le but de M. Pratte ?
Selon une intervention d’une jeune intervenante de 16 ans (publiée le 25 juillet), il s’agissait de « susciter des réactions ». Elle en félicitait même M. Pratte ! Quelle déception ! Les gens ont plongé tête première dans un débat linguistique sans y voir le piège tendu par M. Pratte. D’après moi, il détournait plutôt notre attention sur ce thème pour éviter qu’il ne porte sur un autre sujet : notre histoire. N’oublions pas qu’une nation amnésique de son histoire est plus facile à contrôler !
Ainsi, l’éditorialiste en chef a écrit : « LaFontaine et Baldwin ont jeté le rapport Durham aux poubelles. » Il donnait cet exemple de notre histoire pour démontrer qu’il était temps pour les Québécois de tourner la page et d’accepter la venue de Paul McCartney pour le 400ème anniversaire de la fondation de Québec.
Est-ce vraiment ce qui s’est produit à cette époque ? Pourquoi alors, a-t-on honni Durham et son rapport s’il a été jeté aux poubelles ? Je suis donc retourné à mes livres d’histoire.
Il est écrit dans le livre Canada-Québec : synthèse historique : « L’alliance réformiste de Baldwin et Lafontaine qui dure de 1841 à 1849 ne constitue pas un parti politique proprement dit mais plutôt une association établie entre des représentants des deux groupes ethniques dans le but principal d’obtenir un gouvernement responsable. »
Cette vision de collaboration entre les Canadians et les Canadiens français est compatible avec celle que M. Pratte se fait du Canada. Un pays de compromis où les différends n’existent pas. Un pays où l’entente règne ! Cependant, pourquoi a-t-il mentionné le rejet du rapport Durham par ces deux politiciens ? Ont-ils vraiment rejeté le rapport Durham ? Car enfin de compte, il aurait pu se contenter uniquement de l’aspect positif de la collaboration entre eux qui a effectivement conduit à la responsabilité ministérielle et à la reconnaissance du français comme langue officielle.
Nous savons tous le traumatisme collectif laissé dans notre mémoire par le nom Durham et encore plus le fameux rapport Durham. Il s’agissait pour l’éditorialiste en chef de marquer davantage notre inconscience et notre mémoire pour supporter sa thèse de collaboration et d’entente entre nos nations à cette époque et aujourd’hui.
Durham disait en gros que les Canadiens français étaient un peuple inférieur, sans histoire. Il proposait leur assimilation par l’union des deux Canadas, la responsabilité ministérielle et la représentation selon la population.
Or, le gouvernement de Londres a procédé à l’Acte d’Union des deux Canadas en 1841, avec l’anglais comme seule langue officielle mais en rejetant la responsabilité ministérielle et la représentation proportionnelle proposées pourtant par Durham.
Peut-on affirmer alors que le rapport Durham a été jeté aux poubelles ? Il est clair que non car la principale recommandation soit l’union des deux Canadas fut faite. De plus, la minorisation politique des Canadiens français fut effective par une représentation par le nombre de sièges et non par la population. Ainsi, nous étions minoritaires dans l’assemblée législative même si nous étions démographiquement majoritaires (jusqu’environ 1850). Tout un exemple de la belle démocratie britannique ! Cette minorisation politique de nos ancêtres fut très efficace car elle a permis à faire accepter très facilement l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique de 1867 aux élites canadiennes françaises de l’époque et aux fédéralistes d’aujourd’hui parce qu’elle recréait la province de Québec ! Même si nous étions encore plus minoritaires au sein du Canada…
Nous assistons donc depuis quelques temps à un révisionnisme historique de la part des fédéralistes. Après le grossier révisionnisme du premier ministre du Canada qui affirmait que Samuel de Champlain fut le premier gouverneur du Canada et que Michaëlle Jean en était son successeur, nous assistons au révisionnisme historique de M. Pratte.
Je sais que M.Pratte aime le français. Il le parle et l’écrit correctement. Il a même écrit : « Or, pour que le français se porte bien dans notre coin de continent, il ne suffira pas de l’Imposer par la loi. Il faudra aussi que nous en prenions soin, que nous le respections suffisamment pour faire l’effort de bien le parler et l’écrire. »
J’ajouterais cependant ceci. Pour que cette langue française se porte bien dans notre coin de continent, il faut savoir d’où elle vient et pourquoi elle s’est implantée ici. Cette langue est porteuse de notre histoire et de notre culture. Elle fait partie de notre identité nationale comme Québécois. Pourquoi la parler si nous oublions de qui nous l’avons hérité ? Pourquoi la parler si nous oublions tous les combats faits par nos ancêtres pour la conserver ?
J’appelle donc vos lecteurs à une réflexion sur ce sujet. A l’occasion du 400ème anniversaire de la fondation de Québec, comme nation, nous avons un devoir de mémoire et de ne pas oublier notre devise : « Je me souviens » !
Adrien


Laissez un commentaire



4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    31 juillet 2008

    Que vous avez raison Adrien!
    Je vais conserver comme citation ce bout de votre texte:
    "Pour que cette langue française se porte bien dans notre coin de continent, il faut savoir d'où elle vient et pourquoi elle s'est implantée ici. Cette langue est porteuse de notre histoire et de notre culture. Elle fait partie de notre identité nationale comme Québécois. Pourquoi la parler si nous oublions de qui nous l'avons héritée ? Pourquoi la parler si nous oublions tous les combats faits par nos ancêtres pour la conserver ?"
    Oui votre texte fait réfléchir et il en ressortira quelque chose pour faire avancer le Québec, j'en suis convaincu.
    Daniel Roy, C.A.

  • Archives de Vigile Répondre

    30 juillet 2008

    " Ainsi, l’éditorialiste en chef a écrit : « LaFontaine et Baldwin ont jeté le rapport Durham aux poubelles. » Il donnait cet exemple de notre histoire pour démontrer qu’il était temps pour les Québécois de tourner la page et d’accepter la venue de Paul McCartney pour le 400ème anniversaire de la fondation de Québec. "
    N'est-ce pas plutôt plus juste de dire que LaFontaine a "défendu" la langue de ses compatriotes après l'écrasement de l'insurrection patriotique ??? Parler du duo LaFontaine-Baldwin, comme les Minutes du Patrimoine nous l'ont servi longtemps, est franchement étrange ! Oui ok la collaboration Québec-Ontario mais pour le Symbole important dans la mémoire collective du peuple québécois, on repassera ...

  • Michel Guay Répondre

    30 juillet 2008

    Pratte et son patron de Gesca Ontario savent très bien que pour que le français se porte bien au Québec il faudrait franciser tous les emplois au Québec et et il faudrait qu'Ottawa cesse d'angliciser le Québec avec nos impôts Québecois fédéraux .
    Et aussi il faudrait que Pratte cesse de voter pour les angliciseurs fédéralistes.
    Alors Pratte , Dubuc et Desmarais n'auraient pas à accuser les victimes québecoises bilinguisés et crétinisés par leur système d'assimilation anglicisation à la canadians .
    Ils détruisent notre droit de vivre en français systématiquement et avec mépris ils nous accusent d'avoir une langue détériorée par le bilinguisme qu'ils nous imposent .
    Gesca c'est Lord Durham

  • Archives de Vigile Répondre

    30 juillet 2008

    Votre réfutation de ce minable sophiste aux poches pleines de l'argent des Desmarais est admirable. J'ai l'impression que je vais passer une bonne journée aujourd'hui.
    Vous n'avez pas cédé à la provocation du texte de Pratte (c'est difficile, moi-même je fais un bouffon de moi-même en vase clos par chance. N'étant pas dans l'action mais devant subir la volonté des fédéralistes qui ont excessivement de pouvoir et de tribunes nous subissons et désorganisés nous réagissons promptement instantannément et sans doute idiotement aux sophismes qu'ils "concoctent" -- mot que j'emprunte aux essayistes de l'actualité j'espère qu'ils me pardonneront... ces superbes plumes tous autant qu'ils sont... -- contre nous). Nous tombons dans tous leurs pièges et ils réussissent à nous avoir là où ils nous veulent: aigris et sans attraits ni charmes ni charismes ni riens... et frustrés de notre manque de fric en plus car seulement défendre nos ennemis ici dans la cute... province est payant...
    Ce que vous avez fait ici devrait faire école.
    Malheureusement ils sont si abondants que ça prendrait de l'organisation des honnêtes plumes de la défense et résistance de notre territoire contre l'occupation médiatique des néo-britanniques au Québec. En plus ça risque d'être du travail de bénévole. Est-ce que nous ne pourrions pas nous créer une ligne nationale Québécoise de la réfutation sophistique canadian ? Avec leur douzaine de provocations quotidienne, on aurait de quoi jouer... en nous amusant par rien qu'un peu
    François Therrien