Graffiteurs indépendantistes interdits de manifestation

Canada Day 2008

Québec -- Un juge a empêché trois indépendantistes, militants du Réseau de résistance du Québécois (RRQ), de participer à la traditionnelle manifestation antifédéraliste du 1er juillet de cette organisation, qui se tenait hier à Québec. Ces militants, deux frères, Yannick et Patrice Racine (28 et 24 ans), ainsi que Jonathan Labine (28 ans) ont été arrêtés le 25 juin en fin de journée pour avoir fait des graffitis. C'est le lendemain à midi, après une nuit passée en prison, qu'ils ont été amenés devant un juge, lequel leur a imposé plusieurs conditions de remise en liberté, dont une caution de 1000 $ par individu. Ils se devaient aussi de «ne pas être présents à la manifestation du RRQ le 1er juillet, à Québec», «ne pas distribuer ou afficher des tracts» et «garder la paix et bien se conduire». De plus, les frères Racine se sont fait interdire de communiquer avec M. Labine. Les trois personnes devront retourner devant la cour le 4 juillet pour subir leur procès.
Patrick Bourgeois, directeur du journal Le Québécois, estime qu'on traite ses camarades «comme s'ils étaient du Hezbollah»! Il se demande pourquoi on les a «sacrés en prison comme des criminels dangereux, soumis aux fouilles, et étant obligés de circuler menottes aux poignets et aux pieds». «Pourquoi n'ont-ils pas eu seulement une sommation à comparaître?», a-t-il demandé. Selon M. Bourgeois, «ils ne représentent pas une menace à la sécurité publique, ces trois flos-là. Ils auraient fait quelques graffitis. Ça reste quand même rien qu'un dessin sur un mur».
Un porte-parole de la police de Québec a expliqué au Devoir hier que MM. Racine et Labine avaient été arrêtés une première fois dans la nuit du 23 mai alors qu'ils venaient de faire un graffiti sur un panneau publicitaire, rue Saint-Sacrement à Québec. Ils avaient alors été libérés sur place après identification. Une enquête de l'escouade du crime en réseau a suivi, au terme de laquelle les policiers ont décidé de réclamer des mandats d'arrêt puisque ces individus «avaient probablement commis d'autres méfaits du même genre ailleurs» et présentaient des «risques de récidive», notamment à l'approche du 1er juillet, a précisé Jean-Sébastien Roy, de la police de Québec. Ce dernier a aussi confirmé que les prévenus ont été menottés aux pieds et aux poignets. «C'est toujours comme ça à la centrale du parc Victoria. On doit procéder ainsi puisque les prévenus circulent dehors» et ont donc plus de chances de s'enfuir.
Patrick Bourgeois, lui, fait remarquer que les murs des grandes villes du Québec sont pleins de graffitis, des «tags». Lorsqu'il y a des «dessins abstraits», c'est «l'impunité», s'est-il plaint hier, mais lorsqu'on trouve quelque chose comme «Québec libre» sur le dessin, «il leur faut mettre toute la gomme et coffrer ceux qui osent écrire de tels messages de liberté».
Selon M. Bourgeois, l'avocate des militants, Mélanie Haddad, tente actuellement de faire casser la condition qui interdit les militants Racine et Labine de se parler. Elle n'a pas rappelé Le Devoir hier.
Peu de participants
Contrairement à leur habitude, les membres du RRQ ne sont pas allés se colleter, sur la terrasse Dufferin, devant le Château Frontenac, avec les mangeurs de gâteaux à l'effigie du drapeau unifolié. Ils ont préféré tenir une «vigile de protestation» contre les «fêtes de la confédération» devant ce qu'ils estiment être «un des monuments les plus honteux qui dévisagent la ville de Québec», la colonne Wolfe, érigée devant le Musée national des beaux-arts du Québec à l'endroit où le général anglais est mort. En 1963, le FLQ avait fait sauter le monument, qui avait été reconstruit deux ans plus tard.
En tout, moins de cent personnes sont allées entendre M. Bourgeois, le cinéaste Pierre Falardeau et d'autres tribuns, dont René-Marcel Sauvé, pester contre ce qu'ils appellent le «Canada Day». M. Falardeau s'est indigné en ces termes: «On se fait enculer avec notre propre argent!», a-t-il lancé, insistant sur les importantes sommes dépensées au Québec par le gouvernement fédéral.


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