30 ans ! Cela fait 30 ans aujourd’hui que Félix Leclerc n’est plus des nôtres ! Et pourtant, son nom nous semble toujours familier.
Pour peu qu’on s’intéresse minimalement à la culture québécoise et qu’on ne vive pas en ce pays comme un touriste, on est capable de fredonner sans trop de problèmes deux ou trois de ses chansons.
Immortel
Si l’immortalité, pour un homme, consiste à demeurer dans le souvenir des générations qui lui survivent, on peut dire de Félix qu’il est immortel. De temps en temps, de jeunes créateurs reprennent même ses classiques pour les faire revivre !
Ce qui est étonnant, par ailleurs, c’est que le souvenir de Félix Leclerc demeure aussi vivant alors qu’on entend si rarement ses chansons à la radio, obsédée par la nouveauté. Il est assez rare qu’on diffuse à heure de grande écoute ses classiques, et encore moins ses titres un peu oubliés.
Il n’est malheureusement pas le seul dans cette situation. On entend rarement, sinon jamais, les grandes chansons de Gilles Vigneault, de Robert Charlebois, de Claude Léveillé, de Claude Gauthier, ou de groupes comme Octobre. On prive ainsi tout un peuple de son patrimoine musical et culturel. On en prive surtout sa jeunesse.
Félix Leclerc n’était pas seul, mais il a marqué quelque chose de radicalement nouveau dans notre culture : la figure du poète chansonnier.
Ses chansons étaient souvent de belles méditations mélancoliques sur la condition humaine, comme on le voit avec Le p’tit bonheur et Moi, mes souliers. Mais Félix Leclerc a aussi embrassé l’idéal du pays à naître, que ce soit en exprimant sa colère devant la soumission des Canadiens français, dans Un soir de février ou L’alouette en colère, ou en témoignant de son amour du Québec, dans La nuit du 15 novembre ou dans ce chef-d’œuvre absolu qu’estLe Tour de l’île.
Si le peuple québécois a du génie culturellement, il l’exprime d’abord dans la chanson. C’est avec elle que ce qu’il y a de plus profond en lui a pu rejaillir dans le monde et révéler son identité.
Certes, le temps n’est plus à la chanson militante, au sens où les chansonniers d’hier brandissaient le drapeau du pays et se voulaient à l’avant-garde du combat souverainiste. L’heure n’est plus aux grandes mobilisations nationalistes et la chanson engagée se donne à plusieurs causes. Cela dit, le simple fait de continuer à chanter en français au Québec est un acte politique.
Classiques
Du Tour de l’île, déjà évoqué, à Ti-Nor, de Gilles Vigneault, en passant par Le vieux dans le bas du fleuve, de Gaston Mandeville, sans oublier L’escalier, de Paul Piché, La bittt à Tibi, de Raôul Duguay, Et j’ai couché dans mon char, de Richard Desjardins, Le parc Belmont, de Diane Dufresne, Le Picbois, de Beau Dommage, Lindberg, de Robert Charlebois, ou J’suis Québécois, de Georges Dor, notre patrimoine musical est riche en chefs-d’œuvre qui font vibrer l’âme québécoise.
On a mis une culture au monde. Il faudrait peut-être l’écouter.