Être contre l'anti-américanisme?

2006 textes seuls

Être contre l'anti-américanisme?
_ 20 décembre, 2005
http://aprestout.blogspot.com/
Pendant les années Clinton, j'ai carrément été un fan des Américains. J'admirais leurs écrivains, leur système universitaire, leurs prouesses technologiques, leurs journaux, etc. Le pays physique lui-même était admirable avec ses zones semi-tropicales, ses déserts, ses montagnes, ses grandes villes. Je savais bien qu'il y avait une bande d'agités qui s'énervaient au sujet de la queue du président, mais cela ne semblait pas plus grave que cela. Le Sénat américain a mis fin à tout cela. Les Institutions veillaient.
J'étais pro-américain et si j'entendais le mot "amerloque", je faisais "tut, tut, tut". Si j'avais quelque chose de bien à dire sur ce qui se passait au sud de notre frontière, je disais:"Les Américains ont fait ceci, les Américains sont comme cela". Il y a pourtant près de 300 millions d'Américains comprenant toutes les catégories d'individus s'échelonnant de Charles Manson à Jimmy Carter, mais je ne me sentais pas mal à l'aise de dire:"Les Américains...".
Puis il y eut Bush, les néo-cons alliés à la droite religieuse au pouvoir, la théorie de la guerre préventive, la mise au rancart du tribunal de l'ALENA, du Tribunal Pénal International, de Kyoto et de l'Onu, le pouvoir illimité du "commander in chief" d'emprisonner et de torturer, Guantanamo, l'invasion de L'Irak, Abu Graïb, la démission des média, du Congrès et du Parti Démocrate, la réélection de Bush, Katrina,la prise de contrôle de la Cour Suprême, les affaires Plame, Abramoff, Delay et Frist, etc. Cela fait 5 ans que cela dure et il en reste 3 à faire.
C'est au point où je me suis senti fier de Jean Chrétien quand il a refusé d'accompagner les Américains en Irak. Quand Paul Martin a accusé les Américains de manquer à leur parole en ne respectant pas une décision du tribunal de l'ALENA, je me suis dit:"Dis-moi pas qu'il l'a dit!" J'en suis presque devenu fier d'être Canadien.
Les Américains ont changé. Ils se sont donné un gouvernement quasi-fachiste qui pratique la torture et la guerre d'agression. Ils se le sont donné en sachant qui était Bush, après l'avoir vu opérer pendant 4 ans. Ils ont voté pour lui, pour qu'il continue à faire ce qu'il faisait.
Il était correct de dire, avant Bush, que les Américains sont formidables. Maintenant qu'ils ont changé, pourquoi ne pourrait-on pas dire que ce sont des fachistes qui torturent les gens et attaquent d'autres nations? Je sais, je sais, on ne peut pas tous le mettre dans le même sac. Quarante-neuf pour cent d'entre eux n'ont pas voté pour Bush, etc.
Pourquoi est-il admis d'englober une collectivité pour la louanger? Pourquoi est-ce incorrect d'englober une collectivité pour la blâmer?
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"Espèce d'anti-américain primaire !"
_ 26 avril 2006
Jorge G. Castaneda, un ancien ministre des Affaires étrangères du Mexique, décrit dans Foreign Affairs la montée des gouvernements de gauche en Amérique latine. Chávez au Venezuela, Lula au Brésil, Kirchner en Argentine, Vázquez en Uruguay, Morales en Bolivie et Bachelet au Chili ont frappé le continent comme un véritable tsunami.
Castaneda explique le plus sérieusement du monde qu'un des facteurs ayant favorisé la montée de la gauche est la disparition de l'URSS. L'argument traditionnel qu'un gouvernement de gauche en Amérique latine constituait une "tête de pont soviétique" sur le continent ne pouvait plus jouer. En somme, on ne pouvait plus traiter les socialistes de vilains communistes:
"Left-wing governments would no longer have to choose between the United States and the Soviet Union, because the latter had simply disappeared."
Il semble qu'il n'y ait pas qu'en Amérique latine qu'il faille renouveler le stock d'injures rendues obsolètes par la disparition de l'URSS. Une des injures les plus populaires, mises de l'avant par plusieurs commentateurs du journal La Presse est "anti-américain primaire". On l'utilise généralement pour stigmatiser les opposants, ce qui aide à masquer la faiblesse des arguments que l'on avance.
Ainsi, Lysiane Gagnon, dans sa chronique "Les larmes et la logique" du 25 avril 2006, écrit ceci:"Les tenants du retrait immédiat, aveuglés par leur antiaméricainisme (sic) primaire, confondent l'intervention en Afghanistan avec la désastreuse offensive en Irak, et semblent croire que le Canada est en Afghanistan pour faire plaisir aux États-Unis."
Il y a bien sûr plein de raisons se situant dans le droit fil de la logique pour effectuer un retrait graduel de l'Afghanistan. Elles ont été discutées amplement dans ce blogue et mon propos n'est pas d'y revenir. Je voulais simplement signaler la montée en popularité du terme "anti-américanisme primaire", coïncidant par ailleurs avec l'arrivée du gouvernement Harper.
Je ne prévois cependant pas un grand avenir à cette façon d'injurier l'adversaire. Cela ne se dit pas aisément. À quelqu'un qui propose d'augmenter les frais d'immatriculation sur les VUS, vous pouvez toujours crier, de façon hargneuse : "Maudit communisse !" Mais essayez pour voir, en fronçant les sourcils et en regardant bien dans les yeux votre adversaire, essayez, mais sans rire, de vous écrier : "Espèce d'anti-américain primaire !"


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