Des élections au Québec en février prochain?

Québec - prochaines élections 2007


par Lessard, Denis
QUÉBEC - Des élections générales risquent d'avoir lieu plus tôt que prévu, au Québec. Les troupes de Jean Charest pressent le pas et se préparent désormais à devancer d'éventuelles élections fédérales forcées par le renversement du gouvernement Harper.
Selon les informations obtenues, le premier ministre tient à avoir la possibilité de déclencher des élections dès la mi-février, ce qui signifierait un scrutin à la mi-mars. Rien n'est encore irréversible, rien n'assure qu'il saisira cette occasion et déclenchera la campagne électorale, mais il veut être certain qu'il pourra le faire dès février, s'il le juge opportun.
C'est pourquoi, par exemple, les libéraux ont prévu non pas une mais deux réunions de caucus coup sur coup en janvier une fréquence exceptionnelle pour une période ou l'Assemblée nationale ne siège pas. Dans les officines du PLQ, on rappelle que des réunions identiques, destinées à passer en revue les thèmes d'une éventuelle campagne, avaient été convoquées dès le début de 2003, quand il était clair que le premier ministre Bernard Landry s'apprêtait à déclencher des élections.
À compter du début de 2007, tous les scénarios sont possibles. " À partir du retour des Fêtes, c'est une année électorale ", se contente-t-on de répéter. Mais durant tout le mois de décembre, des conseillers du premier ministre ont fait le tour des élus libéraux et ont clairement indiqué que leur patron était bien tenté par des élections hâtives. Avec seulement 33 jours, cinq lundis consécutifs, les campagnes électorales sont bien plus faciles à prévoir qu'il y a quelques années, quand elles duraient 54 jours.
Toute la semaine à l'Assemblée nationale, les chefs de parti semblaient s'entendre pour un baroud d'honneur au Parlement avant l'affrontement. LCN a annoncé cette semaine qu'il y avait des scénarios d'élections le 2 ou le 16 avril. En fait elles pourraient bien avoir lieu plus tôt.
Le signe le plus transparent d'élections imminentes sera l'annonce d'un remaniement ministériel, destiné à redistribuer les armes avant le combat. Le ministre des Finances Michel Audet paraît en situation précaire : il a perdu bien des batailles auprès de ses collègues cet automne. Il a échoué à faire reporter des annonces coûteuses, qui font qu'il sera bien difficile de présenter un budget crédible au printemps 2007.
En coulisses, on indique qu'à la fin de l'automne dernier, M. Charest a songé très sérieusement à déclencher des élections, mais il s'y est pris un peu tard et a été refroidi quand l'organisation lui a demandé cinq semaines de préparation, un délai qui l'aurait amené trop tard en saison.
Satisfaction plutôt qu'intentions de vote
Chez les libéraux, on a mis de côté les sondages sur les intentions de vote, qui montrent encore une très nette avance du PQ dans l'électorat francophone.
On garde plutôt les yeux rivés au baromètre de la satisfaction à l'endroit du gouvernement. Compte tenu que près de 45 % de gens se disent plutôt satisfaits des décisions à Québec, on parie que ces électeurs, une fois dans l'isoloir, n'iront pas appuyer le Parti québécois ou l'Action démocratique du Québec. Avec ce niveau de satisfaction, le PLQ n'est pas loin de son seuil d'appui traditionnel. Dans une course à trois où l'ADQ garde autour de 15 % d'appuis, les libéraux peuvent espérer être réélus en misant sur le taux de satisfaction plutôt que sur les intentions de vote.
Chez les stratèges libéraux, on confie avoir senti " un mouvement favorable " dès l'automne dernier dans la perception des électeurs, quand le premier ministre Charest multipliait les annonces. L'entrée d'André Boisclair à l'Assemblée nationale n'a pas freiné cette tendance. À chaque occasion, M. Charest a tapé sur le clou du manque de " maturité ", le point faible du leader souverainiste selon les groupes de discussion des sondeurs du PLQ. Au cours du dernier mois, les libéraux ont sondé l'opinion publique chaque semaine, une opération sans douleur pour un parti dont les coffres débordent.
De surcroît, dans les circonscriptions, les organisateurs se disent désormais prêts à des élections, ce qui est très nouveau dans les rangs libéraux, passablement moroses depuis trois ans.
Besoin de Harper
Dans un monde idéal, le gouvernement libéral visait le dépôt d'un budget électoral en mars, et se servait de son congrès biennal, à la fin de mars, comme tremplin pour le lancement de sa campagne. Mais devant l'incertitude quant à l'espérance de vie du gouvernement Harper à Ottawa, on a décidé d'examiner des scénarios de déclenchement plus hâtif.
Une défaite des conservateurs à Ottawa serait une catastrophe pour M. Charest, qui aurait dès lors bien de la difficulté à " vendre le rêve " d'un règlement imminent au problème du déséquilibre fiscal. Les conseillers de M. Charest ont subitement pris conscience de la volatilité de la stratégie avec le partenaire Harper. Dès l'arrivée de Stéphane Dion à la tête du PLC, le plan de match où Ottawa s'engageait à limiter le pouvoir fédéral de dépenser s'est volatilisé avec un programme constitutionnel, Stephen Harper serait entré de plain-pied sur le terrain de prédilection de Stéphane Dion.
À Québec, on réfléchit aussi sur l'opportunité de convoquer l'Assemblée nationale en février plutôt qu'à la mi-mars. On pourrait alors déposer un " cadre financier ", basé sur la synthèse des opérations financières au 31 décembre. Avec les dépenses de l'automne, un vrai budget serait difficile à équilibrer.
Les avis sont très partagés sur les risques de déclenchement d'élections à Ottawa dès le printemps. Personne ne croit chez les libéraux que la question de l'Afghanistan puisse servir de détonateur, comme le suggère le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe.
Certains conservateurs québécois, qui ont l'oreille de Jean Charest, prédisent même que le gouvernement Harper pourrait survivre au vote sur le prochain budget. Il serait difficile pour le Bloc de battre un budget qui donnera plus d'argent au Québec (on parle de 1 milliard de plus en transferts, comme début de règlement du déséquilibre fiscal). Et surtout, le PLC est sans le sou, et n'aurait pas intérêt à se lancer trop vite sur le sentier de la guerre.


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