Bonne fête, Jean !

Chronique de Louis Lapointe

Pour ceux qui l’ignorent encore, c’est l’anniversaire de notre premier ministre Jean Charest aujourd’hui, longtemps surnommé amicalement la brebis dans les milieux branchés du droit, entre autres parce que son anniversaire coïncide avec la St-Jean, mais surtout parce qu'il a déjà personnifié le petit St-Jean Baptiste à l'occasion du défilé de la St-Jean à Sherbrooke en raison de ses blondes bouclettes. Une fête où il aura, cette année encore, de nombreuses raisons de se réjouir.
Tout d’abord, les derniers sondages nous indiquent que les Québécois le considèrent toujours comme le meilleur chef et seraient prêts à le réélire si une élection avait lieu demain matin, et ce, malgré tous les mensonges qu’il a pu leur conter au cours de la dernière campagne électorale au sujet du trou de 40 milliards dans les actifs de la Caisse de dépôt et de placement du Québec. La récente affaire des tests de pathologie du cancer du sein ne semble pas non plus les avoir troublés davantage.
Il semble même que les Québécois aient enfin compris que Jean Charest souhaitait leur faire plaisir en baissant leurs impôts de 900 millions $ comme il l’a fait en 2007, plutôt que de s’occuper des problèmes de plus en plus aigus en santé. Ils ont choisi l’argent plutôt que leur santé comme l’avait prévu Jean Charest. En pleine crise économique, « un tien vaut mieux que deux tu l’auras ». Voilà pourquoi les Québécois font l’équation suivante : il y a plus de chance de se faire soigner quand on est riche et en santé que pauvre et malade ! Une autre leçon de vie d'Yvon Deschamps !
Et puis, Jean Charest a remporté haut la main deux élections partielles, une chez les Anglais, l’autre chez les Français. Ce qui lui permettra de compter sur la présence d’un nouveau ministre qui l’épaulera dans sa lourde tâche de résister aux empiétements d’Ottawa dans une autre de nos juridictions provinciales. Clément Gignac, un ancien économiste de la Banque Nationale qui jusqu’à tout récemment travaillait corps et âme pour Stephen Harper à la création d’une commission canadienne des valeurs mobilières, va pouvoir jouer les agents doubles et informer Jean Charest de l’avancement des travaux des conservateurs et du plan que Jim Flaherty a préparé pour nous embobiner. Ceci donnera encore une fois l’occasion à Jean Charest de planifier une nouvelle montée de lait comme il l’a si bien fait au cours de la campagne électorale de l'automne dernier avec la souveraineté culturelle et les jeunes contrevenants. Je n’ai aucun doute qu’il choisira cette fois-ci encore le moment opportun qui contribuera à le rendre davantage populaire auprès des Québécois qui adorent voir ses petites pommettes de chérubin s’échauffer lorsqu'il pique une de ses crises maintenant légendaires.
Autre cadeau, Jean Charest a appris que la mentalité des Québécois avait évolué sous sa gouvernance au chapitre de l’éthique et des mœurs politiques. Bonne nouvelle pour un premier ministre qui s’apprête à faire adopter un premier code d’éthique pour les élus de l’Assemblée Nationale et à embaucher un commissaire pour le faire respecter. Les électeurs de Rivière-du-Loup ont réussi l’exploit d’élire un député possédant un casier judiciaire et qui ne leur a pas dit toute la vérité au sujet de ses présumées activités de lobbying, qui n’en seraient pas, auprès de l'administration municipale de Rivière-du-Loup, alors qu’il était président du PLQ. On ne peut imaginer un signe plus éloquent d’ouverture à l’égard des criminels. Si Jean Charest et Stephen Harper cherchaient un endroit pour construire de nouvelles prisons au Québec, ils l‘ont trouvé. Rivière-du-Loup semble un lieu propice à la réinsertion sociale et à la réhabilitation.
Après avoir échoué à l’alcootest, à l’image de Bill Clinton qui n’inhalait pas la fumée de sa marijuana, Jean D’Amour nie maintenant avoir accompli des activités de lobbying. Il agissait plutôt à titre de commis voyageur au service d’une firme d’ingénieurs. Si nous avions un doute depuis 2007 au sujet de l’ouverture d'esprit des Québécois alors qu’ils n’avaient pas voulu pardonner à André Boisclair sa consommation de cocaïne et ses sketches douteux à la télévision, il s’est totalement estompé.
Vous me direz qu’André Boisclair était homosexuel et que même si ce n’est plus un crime depuis 1968, dans l'esprit de nombreux Québécois conduire avec les facultés affaiblies est beaucoup moins grave pour un homme comme Jean D’Amour qui gagne sa vie au volant d’une voiture en faisant le commis voyageur, même s’il s’agit d’une infraction criminelle, que pour un homosexuel de devenir premier ministre du Québec.
Il faut dire que les circonstances militaient en sa faveur, puisque ses allées et venues comme commis voyageur se limitaient à l’Hôtel de Ville de Rivière-du-Loup, dont il connaissait parfaitement le chemin puisqu’il l’avait emprunté à plusieurs reprises alors qu’il était maire de la place. De là à dire que les électeurs ont cru qu’il ne s’agissait pas d’une si grave infraction criminelle, puisqu’il avait eu l’occasion de se pratiquer pendant de nombreuses années lorsqu’il rentrait chez lui après les longues réunions du conseil de Ville, il n’y a qu’un pas. Son péché mignon devait bien être connu ! D'ailleurs, malheureusement pour lui et ses électeurs, Jean D'Amour ne pourra pas compter sur l'aide d'un chauffeur dans ses futurs déplacements vers Québec, Jean Charest a décidé qu'il demeurerait un simple commis voyageur.
Pour ce qui est des présumées activités de lobbying du nouveau député de Rivière-du-loup, il faut comprendre que Mario Dumont avait déjà considérablement élevé la barre et fait évoluer les critères éthiques de la population de son comté en leur cachant pendant plusieurs années qu’il touchait un salaire supplémentaire de 50,000$ venant de son parti. Raison de plus pour élire un candidat libéral dont le chef a montré l’exemple pendant 11 ans, recevant lui aussi un salaire secret de 75,000$.
Lorsque Jean Charest soufflera les 51 chandelles de son gâteau de fête ce soir, il aura certainement une pensée heureuse pour tous ses compatriotes québécois à qui il donne l’exemple chaque jour depuis son élection en 2003. Si, comme leur premier ministre, les Québécois sont plus sensibles aux questions éthiques, ils sont également plus nombreux à être bilingues. C’est normal, l’anglais est la langue de la prospérité et des affaires. C’est aussi la langue de l’ouverture sur le monde. Un jour ou l'autre, la fête nationale sera bilingue, ce n'est qu'une question de temps. Guy A. Lepage, un pure laine qui ne parle pas un traître mot d’anglais, a joint sa voix à celles de nombreux leaders souverainistes afin de nous inciter à nous ouvrir de plus en plus à l’autre. La langue anglaise nous y aidera sûrement.
Dans un grand élan de générosité, les Duceppe, Khadir, Harel, David et Curzi nous ont rappelé que la St-Jean était la fête inclusive de toute la nation québécoise et que la langue anglaise faisait partie de notre patrimoine. Après tout, les Anglais nous ont donné la démocratie, même si quelques années plus tard ils ont brûlé le parlement parce que les Canadiens français en menaient trop large. Ils ne sont tout de même pas parfaits !
Aujourd'hui, la St-Jean est une fête apolitique où nous pouvons exprimer tous ensemble notre fierté d’être Québécois. Une occasion inespérée de remercier Jean Charest pour l’héritage qu’il nous lègue en matière éthique et linguistique. Nos chefs souverainistes ont raison, si jadis les moutons québécois ne bêlaient qu’en français le jour de la St-Jean, ils ont changé pour le mieux. À l'avenir, tout comme leur premier ministre, ils pourront désormais le faire dans les deux langues et à l’unisson avec tous leurs compatriotes dont la langue est l’anglais.
Je n’ai plus aucun doute, le mouton de la St-Jean est de retour et pour longtemps !

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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    25 juin 2009

    Loco Locass et la Nation Québécoise présente au Grand spectacle de la Fête-nationale du Québec au Parc Maisonneuve de Montréal, souligne l'anniversaire du premier ministre, Jean Charest en lui chantant ''notre'' happy birthday bien Québécois !
    cliquez sur ce lien pour écouter le fichier audio

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    24 juin 2009

    Hi hi hi...
    Meri, monsieur Lapointe. J'ai apprécié votre texte; vous utilisez savoureusement l'ironie.
    Puis-je y ajouter un petit quelque chose?
    C'est qu'il est assez cocasse, que beaucoup de fédéralistes se soient faits mettre dans la tête que les Anglais nous avaient apporté la démocratie... Alors que le concept, en lui-même, ne vienne pas du tout d'eux; qu'ils nous aient fait vivre une période d'occupation militaire; que ce soient les Français qui ont créé les Droits de l'Homme; que le Royaume-Uni soit aujourd'hui l'un des rares pays où existent toujours une monarchie, aujourd'hui...

  • Archives de Vigile Répondre

    24 juin 2009

    Le peuple québécois est vraiment unique au monde. Jamais un autre peuple de la terre n'agirait contre ses intérêts et de facon aussi bête que le fait le peuple québécois. C'est à n'y rien comprendre. Je suis totalement confondu! Plus bête que ca tu meurs. Et bien, ca s'en vient! Je ne souhaite qu'une chose: que notre histoire soit incinérée de manière à ce qu'on ne laisse pas de traces car on ne mérite pas de passer à l'histoire. Je n'en reviens pas! Je n'en crois pas mes yeux et mes oreilles! Piquez-moi que je me réveille! Ben voyons donc, ca ne se peut pas!...Ben, coudonc!