Bataille de chiffres autour du nombre de morts côté irakien

Selon les études, entre 100 000 et 1,2 million d'Irakiens auraient trouvé la mort depuis mars 2003.

Irak - les suites 2008



Cinq ans après le début de l'opération "Iraqi Freedom" ("Liberté de l'Irak"), nul ne connaît le nombre de civils irakiens ayant trouvé la mort de façon violente. Les Etats-Unis recensent le nombre de disparus dans leurs propres rangs, qui approche désormais les 4 000, mais celui des victimes irakiennes continue de faire l'objet d'estimations contradictoires. Selon les études, entre 100 000 et 1,2 million d'Irakiens auraient trouvé la mort depuis mars 2003.
Dans un article intitulé "Quel est le vrai taux de mortalité en Irak ?" publié mercredi 19 mars, le Guardian explique pourquoi Washington entretient le plus grand flou autour de cette question. Le quotidien rappelle que pendant la guerre du Vietnam, le décompte quotidien des victimes vietcongs était censé convaincre le peuple américain que la victoire était proche. Mais le "Body Count" a surtout eu pour effet d'écœurer l'opinion publique et de donner des arguments supplémentaires aux pacifistes.
L'intervention en Irak a été gérée tout autrement. "Le ministère irakien de la santé a tout d'abord essayé de tenir un bilan fondé sur les chiffres de la morgue, mais il a vite arrêté de publier ses statistiques sous la pression du gouvernement soutenu par les Américains", rapporte ainsi le journal. Depuis, la bataille des chiffres fait rage. Un groupe de recherche britannique indépendant, l'Iraq Body Count (IBC), recense tous les décès rapportés par les médias, ainsi que les statistiques des hôpitaux. Ses extrapolations à l'échelle du pays sont comprises entre 100 000 et plus d'un million de morts. Les enquêtes de l'IBC suggèrent par ailleurs que les Américains ont tué quatre fois plus de civils durant les deux premières années de la guerre que les insurgés, et ce alors que les médias se sont exclusivement intéressés aux attentats-suicides.
500 MORTS PAR JOUR, SELON "THE LANCET"
L'Organisation mondiale de la santé en Irak (OMS) et le ministère irakien de la santé ont également mené leur propre enquête en 2007. Il en ressort que 151 000 civils irakiens seraient morts de façon violente durant les trois premières années de l'occupation américaine (avril 2003 à juin 2006), soit 120 par jour, c'est-à-dire deux fois plus qu'au cours des deux dernières années du règne de Saddam Hussein. L'OMS donne une fourchette comprise entre 104 000 et 230 000, mais même l'estimation la plus basse est deux fois plus élevée que celle de l'IBC, qui est de 47 000 pour les trois premières années. George Bush avait évalué ce nombre à 30 000 morts.
Une autre enquête, publiée en octobre 2006 par la célèbre revue médicale britannique The Lancet, estime pour sa part qu'en juin 2006, plus de 600 000 Irakiens étaient morts de façon violente. Un chiffre faramineux qui équivaut à 2,5 % de la population, soit 500 morts par jour depuis le début de l'opération "Iraqi Freedom".
La dernière étude en date, menée pendant l'été 2007 par l'institut de sondage britannique Opinion Research Business (ORB), confirme l'ampleur du taux de mortalité en Irak et suggère même que le bilan pourrait être encore plus lourd. Selon l'institut, 16 % des Irakiens interrogés affirment avoir perdu un membre de leur famille de façon violente depuis 2003, 5 % déplorant deux décès. Et plus d'un million de civils, sur une population légèrement supérieure à 26 millions d'habitants, auraient ainsi trouvé la mort en quatre ans.
Soren Seelow


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