André Boisclair et les syndicats

Boisclair - chef du PQ


Tout va mal pour André Boisclair. Le chef péquiste a manifestement perdu sa couche teflon. Lui qui réussissait à traverser toutes les tourmentes sans perdre de plumes voit maintenant les incidents les plus mineurs se retourner contre lui. C'est ce que confirme le sondage CROP que publiait hier La Presse où le PLQ de Jean Charest devance maintenant le PQ dans les intentions de vote.
Ces déboires provoquent une grogne au sein du Parti québécois. Mais ce mécontentement ne s'explique pas seulement par les maladresses du nouveau chef et par les carences de son leadership. Il s'explique aussi par les résistances à ses orientations politiques.
Le mouvement d'opposition au sein du parti s'est cristallisé autour des distances qu'André Boisclair tente de prendre avec le mouvement syndical. Il ne s'agit pas là d'une gaffe ou d'une erreur de parcours de sa part, mais manifestement d'un choix clair et conscient.
De nombreux signes indiquent que M. Boisclair a pris cette orientation dès la lutte au leadership, quand il a refusé de remettre en cause les législations dites antisyndicales du gouvernement Charest et ensuite quand il a refusé de promettre de renverser la loi spéciale qui impose les conditions de travail aux employés de l'État.
Et bien sûr, pour coiffer le tout, des propos très agressifs : " Il y a ppeut-être de la nostalgie de cette époque où les leaders syndicaux étaient copains-copains, passaient leurs soirées autour de repas arrosés. Ce n'est pas le type de leadership que je recherche. " Une attaque parfaitement inutile où transpire l'arrogance du chef péquiste, qui a cimenté la fronde contre lui et qui compromet ses efforts.
C'est dommage parce que, sur le fond, la volonté de M. Boisclair d'affranchir le parti qu'il dirige de ce qui ressemble à une forme de tutelle, est tout à fait souhaitable. Le Parti québécois, qui a traditionnellement été une grande coalition, a perdu ses contrepoids est en train de devenir un parti travailliste, dominé par le monde syndical, par le monde associatif et populaire, et plus particulièrement par la gauche syndicale.
Ce processus s'est accéléré sous la direction de Bernard Landry qui, à force de concessions pour asseoir sa popularité, a laissé un héritage empoisonné, laissant son parti prendre un chemin qui va à contre-courant des tendances occidentales, notamment la révolution de Tony Blair au Royaume-Uni. Le PQ, au lieu d'être à l'écoute des Québécois, a choisi de se durcir.
Le PQ se retrouve avec un programme gauchisant, gênant pour un parti de pouvoir, avec une faction, le SPQ libre, qui se décrit comme une gauche syndicale organisée au sein du PQ, et avec une brochette d'anciens dirigeants syndicaux à des postes clés : Monique Richard, ex-présidente de la CEQ, est maintenant présidente du parti, Marc Laviolette, ancien président de la CSN, est président de ce SPQ libre, Gérald Larose, lui aussi ex-président de la CSN, est président de l'organisation soeur qu'est le Conseil de la souveraineté. Ça fait bien du monde.
Le poids de cette gauche syndicale, souvent dure et dogmatique, est une anomalie. D'abord parce que ce courant exerce une influence disproportionnée sur le parti : le candidat du SPQ libre dans la course au leadership, Pierre Dubuc, a recueilli un famélique 1,22% des voix. Mais le contrôle sur les instances et la ferveur militante lui permettent de faire adopter par le parti une résolution sur la nationalisation des éoliennes ou de fédérer la fronde contre le chef. Ensuite parce que ce courant est loin de représenter le citoyen québécois qui vote PQ et qui voterait OUI à un référendum, foncièrement centriste, parfois même tenté par l'ADQ en région.
Un déséquilibre où André Boisclair est pris en sandwich. D'un côté, son virage irrite certains éléments de son parti et affaiblit son leadership. Et de l'autre, son impopularité dans les sondages qui s'explique en partie par son incapacité à ramener son parti là où il devrait être, là où sont les Québécois, c'est à dire au centre.
Mais en est-il capable ? André Boisclair aa-t-il le talent et l'autorité morale pour imprimer au PQ un virage que ni René Lévesque, ni Pierre Marc Johnson, ni Lucien Bouchard n'ont réussi ? Il risque plutôt d'être rejeté par le PQ, parce qu'il n'y a pas sa place, comme ce fut le cas pour ses prédécesseurs.
Certains péquistes rêvent donc d'un retour de Bernard Landry, en oubliant commodément que celui-ci à mené son parti à une débâcle aux dernières élections, dont on n'a jamais fait un bilan sérieux. Mais le problème, ce n'est pas André Boisclair, c'est le Parti québécois lui-même.
adubuc@lapresse.ca


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