On dit souvent, avec raison, que les péquistes sont des cannibales qui mangent leur chef. Il faut croire qu’ils sont aussi sadomaso sur les bords, eux qui ne semblent avoir élu André Boisclair que pour le plaisir de se faire du mal et de le trucider un an plus tard.
Bon, il n’est pas encore mort, mais il a déjà plusieurs coups de couteau et tous les Brutus de son propre parti attendent en ligne pour frapper à leur tour.
À commencer par Bernard Landry, lui-même assassiné par son parti en 2005, et qui revient hanter son jeune successeur avec son fidèle ami Yves Michaud.
M. Landry a profité des mauvais sondages pour sortir de l’ombre, mais il répète déjà depuis quelque temps à qui veut bien l’entendre au PQ qu’André Boisclair est dangereux parce qu’il fait reculer la cause souverainiste de 40 ans. Ayant définitivement enterré ce qu’il pouvait rester de son devoir de réserve, M. Landry a passé la journée d’hier à donner des entrevues extrêmement dures contre André Boisclair. Il en remettra d’ailleurs ce matin chez Arcand, question de bien faire passer son message.
Que les premières attaques contre André Boisclair viennent de Bernard Landry et de ses acolytes, ce n’est pas très surprenant. Ce qui l’est plus, par contre, c’est que personne ne s’est porté à la défense du jeune chef hier.
André Boisclair et son entourage ont-ils sous-évalué la fronde ? N’ont-ils pas de plan de contre-attaque ou, alors, personne dans le caucus ou au parti pour répliquer ? Dans les trois cas, c’est de mauvais augure pour la suite des choses. Cela trahit une nonchalance suicidaire ou une suffisance extrême.
Vous savez qu’un chef de parti est dans le trouble quand personne ne s’interpose pour le protéger. Même Jean Charest, dans ses pires moments, pouvait toujours compter sur un loyal soldat prêt (ou conscrit) pour aller au front. Pas André Boisclair, ni dans son parti ni chez les militants. À part deux ou trois lecteurs paranos persuadés du grand complot Gesca-Power-La Presse contre la cause souverainiste, personne n’a pris la plume hier (ou le clavier, plutôt) pour défendre M. Boisclair. Ce serait même plutôt le contraire.
Fallait vraiment qu’un profond malaise plane pour que deux sondages déclenchent une telle réaction, alors que les partis politiques minimisent toujours la portée des sondages quand ceux-ci sont négatifs. Même Gilles Duceppe, principal allié d’André Boisclair, a affirmé hier que ce n’est pas le temps de parler de putsch… accréditant du coup cette thèse.
Mais les péquistes, ces cannibales, n’ont qu’eux à blâmer. L’élection d’André Boisclair, en novembre 2005, n’aura été qu’une nouvelle version de la fable du Roi nu. Combien de fois a-t-on entendu des militants, des députés, des membres de l’exécutif du parti dire qu’il y avait un problème avec André Boisclair ? Mais ils ont préféré faire comme s’ils ne voyaient pas.
Aujourd’hui, les plus frustrés d’entre eux reviennent en courant à l’église, un an après les noces, pour dire que, finalement, ils ont de bonnes raisons de s’opposer au mariage.
Est-il encore temps d’annuler ce mariage ? Ce serait présumer que Jean Charest daignera attendre que le Parti québécois règle ses problèmes matrimoniaux avant de déclencher les élections. Ce serait présumer de trop.
Pourquoi Jean Charest attendrait-il, lui qui profite enfin d’une embellie après trois ans de grisaille ? Les péquistes ont eu quatre ans pour se choisir un chef. On accuse Jean Charest de beaucoup de choses, mais ce n’est tout de même pas sa faute si le PQ a des remords. Surtout que ces mêmes péquistes le poussaient dans le dos l’automne dernier pour qu’il déclenche des élections.
Les péquistes n’ont pas le choix : va falloir aller à la guerre avec leur chef actuel. Pourquoi, de toute façon, reprendraient-ils Bernard Landry, à qui ils ont montré la porte il y a 18 mois ? Certains péquistes sont déjà arrivés à la conclusion qu’il est trop tard et que M. Boisclair va périr du « syndrome John Kerry », de qui on a dit : il n’est même pas capable de battre Bush, le pire président de l’histoire.
Le sort d’André Boisclair est désormais entre les mains des grosses pointures du caucus – Louise Harel, en particulier – qui pourraient décider de « tirer la plogue » dans les prochains jours ou, au contraire, de lui envoyer une bouée de sauvetage.
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