«Il est devenu urgent de réviser la répartition des pouvoirs dans notre
collectivité».
- René Lévesque
Au début du mois de novembre, la Coalition pour un Québec des régions
lançait le livre Libérer les Québecs afin de promouvoir l’instauration de
gouvernements territoriaux. Dans ce recueil de textes de différents
auteurs, on retrouve un document de 1977, qui ne fut jamais publié avant
aujourd’hui et dans lequel René Lévesque lui-même s’exprime sur la
nécessité de changements profonds dans le partage des responsabilités au
sein du territoire québécois.
Les membres de la coalition veulent libérer les régions de la
concentration du pouvoir que cultive le gouvernement du Québec pour
demeurer un État central fort. En retirant tout pouvoir aux habitants des
régions, en écartant les élus locaux des décisions vitales pour les
communautés, on crée un fossé, celui du désintérêt envers la chose publique
sur laquelle ils ne se sentent plus d’emprise. Puis vient la frustration
envers le gouvernement pour son incapacité à régler les problèmes, certes
particuliers à chaque région, mais importants et surtout urgents, comme
l’exode vers les villes. L’État québécois nécessite une cure de
rajeunissement, il devient trop lourd, trop coûteux et inefficace au point
de vue démocratique. Au Parlement du Québec, on empile allègrement dossiers
d’importance régionale, cas particuliers et dossiers d’ordre national dans
un brouhaha sans queue ni tête où même le rapport d’importance des sujets
les uns par rapport aux autres se perd.
Ce que ce regroupement dit en fait c’est laissez les régions s’occuper
d’elles-mêmes, donnez-leur les moyens.
La publication de cette œuvre s’inscrit donc dans une démarche de
mobilisation citoyenne qui mènera à des États généraux du Québec des
régions, possiblement en 2008. La coalition sait qu’un changement radical
tel qu’elle le demande exige l’approbation de la population. Comment
l’obtenir se trouvera probablement au nombre des sujets à discuter lors de
cet évènement.
Le Parti québécois doit s’assurer de figurer sur la liste des invités. Se
présente l’opportunité d’exercer du leadership et de présenter à cette
tribune une nouvelle vision du combat national ainsi qu’une approche plus
régionale de la souveraineté.
***
Le plan de match actuel du PQ consiste à créer les conditions gagnantes à
la tenue d’un référendum, convaincre la population de voter pour son option
et déclencher le processus devant mener à l’indépendance. Suivra un
deuxième référendum sur l’adoption d’une Constitution pour notre nouveau
pays.
Une alternative plus crédible consiste à fusionner les deux référendums.
Si le PQ accède au gouvernement, il enclenche le travail de préparation
interne à la souveraineté en convoquant une Assemblée Constituante. Le
mandat de l’Assemblée Constituante sera restreint dans le temps car elle
remettra un projet de Constitution d’un Québec indépendant dans un délai de
deux ans. Il s’agit de laisser la marge de manœuvre nécessaire au ministre
de la souveraineté pour préparer le référendum sur ce projet de pays avant
une élection générale.
***
Pour démontrer le lien qui unit la souveraineté et le développement des
régions, le PQ et son nouveau chef proposeraient d’élire les représentants
sur une base régionale, chacune des régions ayant un poids égal. On peut,
par exemple, demander aux citoyens de chaque région d’élire 3 représentants
pour un total de 51 élus.
Pauline Marois ne doit pas craindre de clarifier les enjeux et de jeter un
peu de lumière sur le pays à faire, le chemin à parcourir. La méprise, les
idées obscures et les concepts flous, laissons ça aux fédéralistes.
Cette nouvelle démarche interpelle directement les électeurs à qui l’on
demandera, pour la première fois, d’imaginer après et de décider ensemble,
sans l’ingérence du reste du Canada, dans quel genre de société nous
souhaitons vraiment vivre.
Les membres de l’Assemblée devront créer des gouvernements territoriaux et
répartir les ressources et les responsabilités entre ceux-ci et l’État
central, à Québec. Ils incluront la Charte québécoise des droits et
libertés ainsi que la Charte de la langue française, modifiées si
l’Assemblée le juge nécessaire. Ils définiront aussi un mode de nomination
des juges pour la Cour suprême et une formule d’amendement de la
Constitution.
Le référendum va alors opposer
- Une Constitution québécoise, mûrement réfléchie et acceptée puisque la
population du Québec aura porté le PQ au pouvoir pour convoquer une
Assemblée constituante, elle aura choisi ses délégués et les idées qu’ils
véhiculent. Il s’agit d’un cheminement hautement démocratique qui impose le
respect et auquel chaque citoyen se sentira lié puisqu’il y participera
d’une manière ou d’une autre. Le pouvoir au peuple.
- Le statu quo, la Constitution du Canada, rapatriée par le Canada anglais
sans l’accord du Québec en 1982, et que, depuis, aucun gouvernement
québécois n’a accepté de ratifier. La loi fondamentale du Canada repose sur
le mépris de la nation québécoise et pourtant, malgré un flagrant manque de
légitimité démocratique, le Québec doit s’y conformer et s’y soumettre.
Democracy à la canadian.
***
Mais une telle logique suppose que le PQ revoit son discours en grande
partie, sinon en totalité. Principalement, le référendum cesse de
représenter le moment où les Québécois commencent à conduire leurs
affaires. La rédaction de la Constitution par des élus du peuple correspond
à la première étape d’une nation qui s’administre elle-même, d’un Québec
qui assume toutes ses responsabilités. Dessiner, collectivement, l’ébauche
d’une structure de partage des pouvoirs d’un État souverain, même sans
l’assurance de gagner le référendum, demeure un geste d’arrachement et
d’autodétermination, et d’apprentissage à l’auto-gouvernance. Peut-être
même nécessaire pour rompre le statu quo.
Ainsi, l’élection d’un gouvernement souverainiste signifie que le peuple
québécois accepte d’engager le Québec dans le processus d’accession à
l’indépendance. Le référendum change de nature complètement. Il sert
maintenant à confirmer que le chemin qu’a pris le gouvernement pour
préparer la souveraineté correspond bien à ses promesses et aux attentes
des citoyens qui portent le jugement final. Il lance au monde : Nous avons
élu un gouvernement de transition pour préparer la souveraineté, il a
répondu à nos attentes et nous sanctionnons son travail, nous validons
notre choix de la dernière élection pour un Québec pays.
Aussi, ce programme requiert de la formation qu’elle accepte de partager
son option avec un nouvel allié inédit, l’Assemblée constituante qui, après
l’élection du PQ, prend le relais pour accomplir sa fonction spécifique,
celle de mettre une pression supplémentaire sur le cadre politique actuel
pour qu’il éclate, qu’il ne puisse plus contenir les aspirations du peuple
québécois, pour rendre indispensable la présence d’un parti
indépendantiste. Le PQ y perd son monopole sur la souveraineté mais il y
gagne un puissant outil de promotion, une Constitution.
***
L’intérêt pour la Coalition pour un Québec des régions semble évident. Ce
groupe comprendra sûrement qu’une telle proposition leur offrira une plus
large autonomie que ce que le Québec pourrait consentir aux régions comme
simple province avec ses moyens limités. Avec moins d’efforts même car la
résistance qu’il rencontrera à vouloir décentraliser un État déjà affaibli
par le lien canadien sera forte.
La stratégie de base du PQ n’inspire plus confiance. Pourquoi ne pas
présenter un nouveau plan plus concret lors des États généraux de la
Coalition qu’on annonce pour 2008?
Mathieu Taillefer
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --
Vive les Québecs libres!
Ce que ce regroupement dit en fait c’est laissez les régions s’occuper d’elles-mêmes, donnez-leur les moyens
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