Vigile - un débat libre

Les principes républicains sont au fondement même de la quête souverainiste

18. Actualité archives 2006


Certes, des opinions diverses et adverses se sont échangées sur Vigile à propos de la guerre du Proche-Orient, quelques rares interventions en Tribune libre n'étaient pas du meilleur goût, mais on avait affaire à un débat libre, comme de coutume, et en aucune manière à du salissage ou à un quelconque racisme, ce qui serait d'ailleurs en contradiction avec la cause démocratique de l'auto-détermination du Québec.

Les principes républicains sont au fondement même de la quête souverainiste, étant intrinsèquement liés et associés au principe démocratique de souveraineté nationale.
Les deux pierres d'assises de cette République du Québec à fonder sont la Charte des droits et libertés et la Charte de la langue française.

Le principe républicain est en opposition avec le multiculturalisme impérial : il propose une démocratie centrée sur le citoyen, dans la liberté, l'égalité et la solidarité, que ne contredit pas mais confirme l'exigence d'une citoyenneté québécoise et d'une carte de citoyenneté québécoise pour voter. Il appartient à la nation de décider si elle désire octroyer la citoyenneté après certaines conditions, comme c'est le cas des régimes républicains - France, États-Unis, Suisse... Je ne crois pas que passer de 3 à 5 ans par exemple soit une brimade ou une mesquinerie. Une immigration mieux intégrée, un processus de naturalisation solide et sérieux, seront un gage de réussite de l'immigration : le laxisme et le "jemenfoutisme" en cette matière ne font que semer les germes de la discorde de demain, une future division de la nation qui n'est pas dans son intérêt ni de ses citoyens.

En prenant position pour l'émancipation des peuples, contre la discrimination, la sujétion et donc contre le racisme, il est conséquent, et j'ose croire que c'est dans l'ensemble le cas, que l'ensemble des souverainistes soient contre toute forme de racisme.

Cela vaut pour le Proche-Orient autant que pour le reste du monde. De leur histoire les Québécois tirent naturellement une sympathie pour les petites nations dont la liberté est brimée par les impérialismes, un sympathie pour la paix, or le principe de justice qui fonde un ordre international juste, pacifique et libre, repose sur l'auto-détermination de tous les peuples.

On comprend très vite combien l'impérialisme à la Bush ne fait aucunement avancer la démocratie au Moyen-Orient, si tant est qu'il veuille vraiment le faire. La Palestine et le Liban, aidés et non pas constamment détruits, sont les nations arabes de cette région ayant les meilleures perspectives de développement démocratique et sont déjà parmi les plus démocratiques.

Les Québécois et les souverainistes sont à même de comprendre très bien à la fois le besoin que les Juifs ont éproué de se trouver un État-nation accentué par le besoin d'échapper à l'insécurité, et le besoin identique des Palestiniens à jouir librement de leur vie individuelle et nationale dans un pays libre.

Malheureusement les Palestiniens ont payé pour les persécutions européennes et furent des victimes innocentes de cette entreprise. Aujourd'hui toute solution de paix et donc de sécurité passe par la reconnaissance fondamentale de ce droit à une Palestine libre mais aussi du droit au retour des Palestiniens, réfugiés trop nombreux privés de tout droit, droit au retour à reconnaître à titre symbolique et sous forme de réparations financières, non pas de retour au sens strict en Israël (librement en Palestine libre seulement).

Cela exige en retour la reconnaissance par les Palestiniens de l'existence d'Israël et de surcroît du droit d'Israël à l'existence, des Israëliens à vivre en paix dans un pays libre. Arafat a fait faire de larges avancées à l'OLP sur cette voie, et Rabin à Israël. C'est dans leurs pas de l'accord d'Oslo qu'il faut reprendre le chemin.

En ce qui concerne le Proche-Orient, le droit de vivre d'Israël, de la Palestine et du Liban est équivalent, en justice, je crois qu'il faudrait le rappeller !

La guerre perpétuelle ne fomente que la haine. La spirale de la haine doit cesser, et les coupables ne logent pas d'un côté, mais des deux côtés ; cependant Israël possède une force bien plus grande et une responsabilité d'État démocratique qui a créé le réfugié palestinien, à permettre à la Palestine de vivre. L'occupation depuis 1967 est inacceptable. Certains musulmans parlent malheureusement de créer plus de violence encore, de "détruire Israël" et autre idées fourvoyées. Seulement il n'est pas moins correct, au contraire, d'empêcher depuis 1967 à une nation de vivre, dans les actes. La justice et la paix dépendent de cette reconnaissance mutuelle au droit de vivre.

La présente guerre, en détruisant le Liban plus que le Hezbollah, aura servi à quoi ? À créer le Hezbollah de demain après avoir fait naître l'OLP puis le Hezbollah et avoir envahi deux fois auparavant le Liban en vain ? Espérons que cette spirale infernale cesse bientôt.
Israël ne sert pas tant ses intérêts véritables dans cette guerre que ceux de la politique bushienne. La guerre n'améliore ni le sort des Israëliens, ni celui des Libanais, ni celui des Palestiniens.

En outre, ne sévit pas seulement aujourd'hui la menace d'un renouveau de l'anti-judaïsme mais celle de l'anti-arabisme, de l'anti-islamisme, très agissants malgré l'absence de mots pour les décrire, et même une latente haine méprisante des "autres", des cultures non occidentales ou même non-anglo-saxonnes dans la veine de Samuel Huntington. Il faudrait que l'Occident se garde de ces dérives non seulement pour l'humanité mais pour son propre bien.

Dans la dernière guerre, ce n'est pas tant le point de vue de la majorité des Québécois et des souverainistes qui faisait exception, position bien représentée par la France, que les positions des médias états-uniens et de Bush et Harper, sur la Planète. Et la position de la France, défavorable à la destruction du Liban, était une position modérée.
L'intérêt véritable des trois nations concernées et de tout le Moyen-Orient ne peut se trouver que par la paix.
La seule solution est la paix, c'est sans doute la plus difficile lorsque pris dans l'engrenage des vengeances et vendettas méditerranéen, mais c'est la seule véritable.

Le dire et critiquer le caractère de la guerre menée par Israël demeure un acte sain, ou au moins conserver le droit de proposer cette critique est sain - à condition que l'on reste dans les bornes de l'humanisme, de la quête d'une paix véritable, c'est-à-dire celle qui reconnaisse le droit des trois peuples, Israëliens, Libanais et Palestiniens, à vivre libres et en paix, sans sombrer dans la haine quand on critique le choix des armes ou leur application illégale. Comme de laisser s'exprimer le point de vue contraire fait partie des conditions d'un débat démocratique sain.
En outre, Vigile a permis au souverainiste de défendre deux perspectives opposées sur cette guerre et même davantage, des positions plus mitoyennes, disons-le comme ça, [dont toute la difficulté a été exprimée par Joseph Facal->1520].
Pax vobiscum, salam, shalom !

Charles Courtois
_ Montréal

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Charles-Philippe Courtois est docteur en histoire et chercheur postdoctoral à la Chaire de recherche en rhétorique de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Il prépare la publication de La Conquête: une anthologie (Typo, automne 2009).





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