Un «paulinerendum»?

Tribune libre 2011

Le 9 février 1982, les résultats du «renérendum» sont rendus publics. La
moitié des 143 000 membres du PQ se sont prononcés par bulletin expédié par
la poste. 95 %, soit environ 70,000 membres, ont appuyé la position de René
Lévesque : il faudrait la majorité des votes et non la majorité des sièges
pour enclencher le processus d’accession à la souveraineté. Le 17 avril
1982, la reine Élizabeth II promulgue officiellement la nouvelle
Constitution. Le Québec n’y adhère pas. Le Québec est toujours dans un
pays où il n’a pas signé le document fondamental de ce pays. Anormalité?
Les Québécois sont trop occupés à suivre «Occupation double» (celle du rêve
!) pour se concentrer sur la vraie «Occupation double» qui gère leurs
affaires.
Près de trente ans plus tard, le chef actuel du PQ est aux prises avec les
mêmes problèmes que le fondateur du PQ. Elle menace les récalcitrants et
essaie d’asseoir son autorité en disant, à mots voilés, que les opposants à
sa vision des choses n’ont qu’à partir s’ils ne sont pas contents. Et si
les dissidents décidaient de partir, combien seraient-ils et où iraient-ils
madame Marois? Chez Legault, évidemment !
Pendant que Pauline Marois essaie de boucher les trous d’un bateau qui
tangue, que fait le chef de la Coalition sur l’Avenir du Québec? Il rit et
s’amuse comme un petit fou. Il ne fait que dire ouvertement et publiquement
ce que Pauline Marois dit en sourdine.

Le premier chef affirme qu’il va mettre la souveraineté sous le boisseau
pour dix ans; le deuxième chef ne chiffre pas sa démarche mais pense et
veut faire la même chose. Le but visé par les deux chefs est le même :
prendre le pouvoir. Legault veut devenir le premier Premier ministre à
avoir quitté le PQ pour diriger le Québec; Marois veut devenir la première
Premier ministre à avoir quitté son parti et être revenue pour prendre la
barre des affaires de l’État.
Au rythme où vont les choses, François Legault pourrait bien, à la rentrée
parlementaire de février 2012, avoir à l’Assemblée nationale un bon nombre
de députés (une bonne douzaine) sans que ceux-ci se soient présentés sous
l’étiquette caquiste.
Un député péquiste est officiellement dans son camp; quelques députés,
anciennement adéquistes, mutés en députés indépendants, deviendront
caquistes sous peu; des élus ou la totalité des adéquistes vont
probablement devenir, après la période des fêtes, des caquistes officiels
avec Gérard Deltell comme chef substitut; d’autres jeunes députés péquistes
mécontents ( 4 ou 5 venant des Laurentides surtout) vont sans doute
s’additionner à cette formation arc-en-ciel. Cela donnerait à Legault le
statut de parti officiel, sans que celui-ci soit passé par un scrutin
général. Ce serait du jamais vu au Québec!
Afin de clarifier les choses, Pauline Marois devrait suivre la voie de René
Lévesque et consulter tous les membres de sa formation politique et
demander carrément si sa démarche de «gouvernance souverainiste» a
réellement l’appui de la très grande majorité des membres «officiels» du
parti. Elle serait sans doute surprise du résultat. Elle ne le fera pas.
Pourquoi? Sa démarche serait battue à plate couture.
Alors, Madame Marois, un «paulinerendum» pour éclaircir le paysage et
dissiper l’ambiguïté entourant votre démarche d’affirmation nationale, ou
ce que vous appelez candidement votre «gouvernance souverainiste» dans une
province qui en est toujours une?
Vous avez déjà enfreint une fois les règles de votre parti en mettant à la
poubelle l’article I du programme officiel du PQ voté en 2005, et cela en
ne passant que par un Conseil national, pourquoi ne pas enfreinte à nouveau
les règles de votre formation politique et faire, comme René Lévesque,
votre propre référendum et bafouer une fois de plus les statuts et
règlements de votre formation politique?
NOTE : Je ne parle pas de Gilles Duceppe. Il pédale sur sa bicyclette. Et
si j’étais à sa place, je continuerais à le faire. Avec un tel plan de
combat, on ne part pas en guerre. On s’amuse à contempler la nature et à
dévaler les côtes à vive allure, pour s’éloigner d’un paysage encombrant et
fort dénaturant présenté par une formation politique qui n’a plus d’étoile
polaire.
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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3 commentaires

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    5 novembre 2011

    Matante partira en flammes en persiflant: "Vous serez tous maudits" (les Rois Maudits).
    Et Duceppe sera couronné pour laver sa réputation. Avec sa politique du "Canada est un beau pays" il n'aura aucune flèche ("clout" en anglais) pour argumenter efficacement et sonner le réveil des troupes "rendues ailleurs".

  • Luc Bertrand Répondre

    5 novembre 2011

    Très bonne analyse au sujet de la CAQ, monsieur Turcotte, malheureusement, pour ce qui est du ''matanterendum'', les dés sont déjà pipés d'avance, tout comme l'a été le congrès d'avril dernier et le vote de confiance. Tout ce qui reste au sein du Parti québécois ne pense qu'en termes strictement provincialistes, ne cherchant qu'à simplement succéder à Jean Charest comme gouvernement provincial, quitte à n'avoir aucun mandat pour faire quoi que ce soit qui dérange les journaleux de ''mononcle'' Paul. Pauline aurait aussi bien pu proposer un moratoire de 10 ans sur la ''chouveraineté'', ça aurait aussi bien passé comme du beurre dans la poèle.
    Il faudra donc attendre une autre défaite humiliante pour que les indépendantistes puissent espérer que quelque chose puisse s'enclencher en faveur de l'indépendance. Même avec Duceppe comme chef, à moins qu'il n'endosse la stratégie des gestes de rupture avec le Canada et le principe de l'élection décisionnelle décisive pour faire l'indépendance du Québec, on en reviendra immanquablement au même point. Il n'y a jamais eu place pour le débat autrement qu'avec un référendum à un moment jugé favorable, sans jamais envisager quoi que ce soit pour atteindre ces ''conditions gagnantes'', au sein des instances du PQ. Vous le savez bien pour y avoir milité aussi longtemps.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 novembre 2011

    Charest: jamais de référendum
    Legault: pas de référendum avant 10 ans (et le con rêve de payer de la péréquation!!!)
    Marois: pas de référendum avant le 3e mandat
    En somme, pas d'indépendance avant 2012, minimum! Le plus fou de l'histoire c'est qu'avec Harper on n'a jamais eu plus belle condition gagnante! Harper et son gouvernement de red necks nous offrent tout ce qu'on a de besoin pour aller chercher le 10-15% qui nous manque.
    On a l'impression de vivre un véritable cauchemar sous Pauline. Un cauchemar qui n'en finit plus.