Un monument au fascisme

Bernard Amyot déforme encore une fois l’Histoire pour en faire son allié, pour mieux justifier l’injustifiable

Chronique de Louis Lapointe

Je suis toujours étonné lorsque je lis les opinions de Bernard Amyot. Encore une fois, dans le [Devoir->31642]* d'aujourd'hui, par un savant sophisme, il tente de justifier l’impardonnable, l’emprisonnement en 1970 de centaines de personnes qui ont eu le malheur de penser différemment de lui, des indépendantistes. Tout cela, en raison de la proclamation de la Loi des mesures de guerre.
Si on suit sa logique, l’héritage britannique de la présomption d’innocence et de l’habeas corpus ne serait réservé qu’à ceux qui partagent sa vison de la démocratie. Les autres pourraient être privés de leurs droits sans que cela ne pose aucun problème. À quoi sert la liberté d’expression lorsque le prince peut emprisonner tous ceux qui le contestent ouvertement ?
Bernard Amyot, un avocat qui reconnaissait encore il y a quelques mois ces mêmes droits à l’enfant soldat Omar Kadhr, les refuse aujourd’hui aux indépendantistes qui ont été emprisonnés en octobre 70, prétextant une décision du Protecteur du citoyen et un vote unanime de l’Assemblée nationale qui les auraient avalisés.
Demander la participation de l’armée pour soutenir la police dans son travail est une chose, suspendre les droits démocratiques de toute une population, c’en est une autre. Mais cette distinction, Bernard Amyot ne la perçoit pas, ou plutôt, il omet volontairement de la voir, car elle viendrait jeter par terre l’édifice de sa plaidoirie en faveur de la suspension des droits démocratique de ceux qui n'ont pas sa vison unitaire du Canada. Un procédé intellectuel dénoncé par le philosophe Karl Popper dans son célèbre essai : La société ouverte et ses ennemis.
Comme c’est son habitude**, Bernard Amyot déforme encore une fois l’Histoire pour en faire son allié, pour mieux justifier l’injustifiable, l’utilisation de la force contre ceux qui ont le malheur de contester ouvertement l'ordre établi, de commettre des délits d'opinion.
Ce n’est pas parce que tout le monde est contre une personne qu’elle est coupable, qu'on peut suspendre ses droits. C’est la première chose qu’on apprend en droit.
Cette vision autoritaire de la démocratie que nous propose Bernard Amyot dans les pages du Devoir s’appelle fascisme, une opinion qui est un monument à la gloire de cette bêtise autoproclamée qui autorise de nombreux régimes autoritaires à emprisonner des milliers d’innocents sans qu’ils aient pu subir de procès.
En définitive, ce que défend Bernard Amyot, pour qui le devoir de mémoire est sélectif, c’est que la raison du plus fort est toujours la meilleure, même lorsque la force utilisée est démesurée. Un avocat qui n’a malheureusement tiré aucune leçon des horreurs qui ont façonné le 20e siècle.
*Le monument de l'oubli
**La pensée unique de Bernard Amyot

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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    22 octobre 2010

    L’histoire se répète. Nonobstant la croyance populaire, sous le joug du Féministan, les arrestations arbitraires, effectuées sans mandat et sans motif apparent sont le lot quotidien des pères de famille persécutés par tout l'attirail juridique de l'État dès qu'une conjointe en manifeste le désir. Il lui suffit de composer le 911 pour que la machine s'emballe et rien ne pourra plus l'enrayer dans sa course folle. Et les juges fripons de la cour du Québec participent à la poursuite du délire institutionnel en refusant de mettre un terme à ces parodies de justice où les preuves reposent sur de simples paroles jamais vérifiées et les accusés traités en personne coupable d’office au point de devoir se conformer à des sentences avant jugement. Les journalistes sont également complices en refusant d'aborder ce côté sombre de la justice au service d'une idéologie, le féminisme d'état. Pour leur part, les Allemands avaient retenu le National-Socialisme.

  • Archives de Vigile Répondre

    20 octobre 2010

    Comme tout le monde l'aura compris, je voulais dire: «C’est carrément un outrage de donner à un aéroport le nom d'un homme qui est responsable du gâchis de Mirabel.»
    :-)

  • Archives de Vigile Répondre

    19 octobre 2010

    Bravo, cher Louis. Belle réplique.
    Je n'irais pas jusqu'à enlever à Pierre Laporte son monument commémoratif, mais comme il y a une école, un parc et même un grand pont qui portent son nom, ce qui est probablement excessif, compte tenu de la contribution réelle de l'homme à la société québécoise (cela dit sans diminuer la sympathie que j'ai pour sa famille, puisque Laporte ne méritait certainement pas de mourir, malgré ce qu'on a pu trouver de répréhensible à son sujet par la suite), on pourrait commémorer la Crise d'octobre dans la dignité en donnant à au moins un lieu le nom de Paul Rose, qui, rappelons-le, n'était pas présent au moment de la mort de Pierre Laporte, mais ne s'est jamais désolidarisé de ses camarades et a subi un traitement particulièrement dur et inéquitable devant la justice.
    Une chose est certaine, cependant, c’est qu'il est absolument honteux que des lieux publics portent le nom de Pierre Elliott Trudeau au Québec, qui a fait incarcérer presque 500 innocents, comme un véritable tyran. C'est carrément un outrage de donner le nom d'un aéroport à un homme qui est responsable du gâchis de Mirabel. Le nom de Trudeau devrait certainement disparaitre totalement de la toponymie du Québec, d'autant plus que Trudeau est en bonne partie responsable de la mort de Pierre Laporte, que les Bernard Amyot de ce monde le veuillent ou non.
    Après Amherst, c'est Trudeau qu'il faudra faire éliminer du paysage québécois.

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    19 octobre 2010

    Puis-je ajouter que le jour où nous aurons notre pays, l'une des premières choses à faire sera de détruire ce monument dédié à Pierre Laporte?
    Si John james Charest se trouve encore sur le sol québécois, le Grand jour, je crois qu'il devrait être arrêté par la nouvelle Sûreté du Québec!