Un jeune de 17 ans poignardé à la gare centrale à Bruxelles

Chronique de José Fontaine




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Le 14 avril dernier, un jeune de Bruxelles de 17 ans est abordé par deux jeunes malfrats qui lui demandent son MP3 (une radio à 500 €). Il refuse. Les deux jeunes le poignardent. Il est mort, tué en pleine salle d'attente de la gare centrale en présence de témoins qui n'ont rien fait parce qu'ils n'ont rien vu, tellement la scène a quelque chose d'invraisemblable. Car ce lieu public est le plus calme et le plus sécurisé qu'on puisse imaginer.
Ce qui est frappant, c'est que les parents, les amis de la victime songent, malgré leur immense douleur, aux répercussions que peut avoir un tel fait divers atroce puisque, comme dans tout pays d'immigration comme en Europe actuellement, il y a des tensions entre autochtones et immigrés.
Une pétition est rédigée. Elle va dans le sens d'une exigence de sécurité mais aussi dans le sens d'une idée d'exiger la justice sans haine, avec l'idée de prévenir toute réaction de type raciste. La pétition a déjà reçu 200.000 signatures. A la rentrée des classes, le directeur du collège de Joe, la victime, plaide dans le même sens et une amie du si jeune homme affirme que sa vie a été détruite mais que ceux qui l'ont tué ont aussi leur vie détruite, même s'il faut évidemment qu'ils soient durement sanctionnés.
Une manifestation s'organise pour dimanche prochain. Elle sera sans slogans, ni calicots. Les jeunes amis de Joe refusent toute récupération politique, surtout évidemment de l'extrême droite xénophobe, incarnée surtout en Flandre par le Vlaams Belang, le plus important parti de Flandre (mais avec un peu plus de 20% seulement).
Mais les partis flamands démocratiques (80% des électeurs flamands) ont diffusé un communiqué commun affirmant qu'ils allaient à cette marche silencieuse, qu'ils s'y engageaient, sans aller au-delà en termes de communication, ce qui était souhaité. Les partenaires sociaux s'y engagent aussi (patrons et syndicats) Le Premier ministre fédéral estime qu'en tant que père de famille il aurait été à la manif mais que comme Premier Ministre, il doit surtout prendre les mesures pour que cela ne se reproduise pas.
L'émotion est immense. Le jeune assassiné est un Bruxellois francophone, mais l'émotion réunit tout le pays sur un thème simplement humain: justice, sécurité, refus de la dissension entre autochtones et étrangers.
Cela semble unitariste. On dirait qu'à cette occasion la Belgique comme nation existe, mais elle n'existe que sans symboles, sans roi, sans aucune autorités, sans politiciens sauf manifestant “en tant qu'être humains”.
C'est curieux car aujourd'hui, le syndicat des métallurgistes socialistes - et Dieu sait si les syndicats veulent éviter les dissensions - s'est cependant scindé en trois parties correspondant aux trois Etats fédérés, mais en maintenant entre eux la solidarité ouvrière et "parce que chaque syndicat - wallon, flamand ou bruxellois - travaille dans une société différente" (c'est ce qu'ils ont dit).
Je vous ai dit les faits bruts. Cette unité “belge” et en même temps ces différences, ces ruptures. Tout cela est typique de l'Etat où je vis et dont fait partie la Wallonie que je veux voir devenir indépendante, ce qui ne m'empêche pas d'apprécier qu'on s'unisse avec les Flamands quand il le faut pour des raisons supérieures. Bien sûr j'ai signé la pétition. Les dirigeants religieux marocains ont appelé les fidèles musulmans à dénoncer les criminels s'ils les connaissaient, ce qui est effectivement parfois un devoir, celui de dénoncer les délits quand ils peuvent semer la haine si de justes sanctions ne sont pas prises.
Je ne me sens pas belge, je suis wallon et je souhaite la disparition de la Belgique mais non pas cet esprit qui fait que, aux heures graves, on puisse se réunir sur un essentiel que j'oserais dire républicain car la monarchie est démonétisée dans l'Etat belge depuis que l'on se rend compte que le Prince héritier n'est pas à la hauteur de sa tâche dans la mesure où même ses partisans disent qu'il peut encore progresser dans l'aptitude à la tâche qu'il doit remplir. Oui, mais il va avoir 47 ans...
José Fontaine

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Né le 28/6/46 à Jemappes (Borinage, Wallonie). Docteur en philosophie pour une thèse intitulée "Le mal chez Rousseau et Kant" (Université catholique de Louvain, 1975), Professeur de philosophie et de sociologie (dans l'enseignement supérieur social à Namur et Mirwart) et directeur de la revue TOUDI (fondée en 1986), revue annuelle de 1987 à 1995 (huit numéros parus), puis mensuelle de 1997 à 2004, aujourd'hui trimestrielle (en tout 71 numéros parus). A paru aussi de 1992 à 1996 le mensuel République que j'ai également dirigé et qui a finalement fusionné avec TOUDI en 1997.

Esprit et insoumission ne font qu'un, et dès lors, j'essaye de dire avec Marie dans le "Magnificat", qui veut dire " impatience de la liberté": Mon âme magnifie le Seigneur, car il dépose les Puissants de leur trône. J'essaye...





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