Élections fédérales

S'occuper de ses affaires

2 mai 2011 - Harper majoritaire



La première des cinq semaines de la campagne électorale s'est terminée hier avec l'intervention-surprise du premier ministre Jean Charest. Il s'y est invité suivant le principe que les absents ont toujours tort. Il a d'autant plus raison de le faire que, pour leur part, les chefs des partis en campagne ne se gênent pas d'intervenir, avec promesses à l'avenant, dans des dossiers qui concernent les provinces.
L'engagement du premier ministre Stephen Harper annoncé jeudi de soutenir la réalisation du projet hydroélectrique du Bas-Churchill par une garantie de prêt a été reçu comme une véritable provocation par Jean Charest. Provocation que l'on voyait bien sûr venir. À maintes reprises, Québec avait indiqué qu'un tel appui serait inacceptable parce que modifiant les règles du marché du transport et de l'exportation de l'électricité et parce que constituant une iniquité de traitement envers le Québec. Mais, avait déjà fait savoir le ministre Peter Mackay, «l'intérêt du Canada passe avant celui du Québec». Le premier ministre québécois se devait de répliquer.
Ici, l'«intérêt du Canada», on le devine aisément, se confond avec l'«intérêt du Parti conservateur». Éliminé de la carte électorale terre-neuvienne en 2008, il a absolument besoin de retrouver les trois sièges qui lui appartenaient historiquement. Cela pourra faire la différence entre un gouvernement conservateur majoritaire et minoritaire, ce pour quoi on est prêt à payer le prix fort.
On connaît bien l'air et la chanson des promesses. Chacun l'entonnera à son tour, y compris Jean Charest. Dans le cas présent, il faut toutefois souligner le cynisme des conservateurs, qui ont inventé un nouveau programme pour leur permettre de s'immiscer dans le financement d'un projet hydroélectrique. À l'inverse, quand le maire de Québec a demandé à Ottawa un soutien financier pour la construction du nouveau Colisée, ils se sont réfugiés derrière l'absence de programme particulier pour le refuser. On ne voulait pas devoir subventionner toutes les constructions de grands amphithéâtres sportifs. Restera à voir, au lendemain des élections, si ce nouveau programme de garantie de prêt pour la construction de nouveaux ouvrages hydroélectriques sera accessible à toutes les provinces et pas seulement à Terre-Neuve. Question d'équité, ce devrait être ainsi.
En toute justice, il faut dire que les conservateurs ne sont pas seuls à marcher dans les platebandes provinciales. Le libéral Michael Ignatieff s'y est aussi aventuré avec des engagements pour bonifier l'aide aux étudiants et soutenir la création de nouvelles places en garderie. Le chef du NPD, Jack Layton, promettait hier un soutien à l'embauche de médecins et d'infirmières. Bien sûr, leurs sabots sont moins gros que ceux des conservateurs. Ils assurent vouloir respecter les compétences des provinces. Néanmoins, ils leur imposent ainsi des priorités et orientations qui ne sont pas les leurs.
Cette propension des politiciens fédéraux à intervenir dans des dossiers relevant des provinces est l'histoire même du Canada. Ils le font parce que la plupart des services aux citoyens relèvent des provinces et que, électoralement parlant, il est payant de faire des promesses qui touchent directement les électeurs, quitte à écraser quelques pieds au passage. Pendant ce temps, ils évitent, fort commodément, de s'engager sur le financement à long terme de ces services qui, comme le rappelait hier Jean Charest à propos du renouvellement des ententes sur le financement des services de santé, est le problème fondamental. Il a raison d'exiger qu'ils s'occupent d'abord de leurs affaires.


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