Revoir en profondeur la politique autochtone

Québec 2007 - Analyse


Une large proportion de la population québécoise l’ignore, les droits et titres des Premières Nations, sur un vaste territoire québécois, n’ont jamais été éteints ou cédés. S’appuyant peut-être sur cette méconnaissance, les gouvernements du Québec ont trop souvent agi comme si ces droits n’existaient pas, voire comme si les Premières Nations n’existaient pas. Cela doit changer ; cela va changer. Car, à l’avenir, je vous annonce que les Premières Nations seront incontournables pour l’avenir du Québec. Pendant cette campagne électorale, nous inviterons les partis politiques et leur chef à prendre conscience des enjeux qui concernent les Premières Nations et à prendre les engagements nécessaires et utiles.
Plusieurs seront surpris que l’on s’immisce dans cette campagne électorale. Traditionnellement, en respect de nos identités, de nos spécificités et de nos droits particuliers, les Premières Nations se sont tenues à l’écart des élections et campagnes électorales des autres gouvernements. Cette attitude est certainement prudente et cohérente avec nos positions politiques. Par contre, la même prudence nous incite à être très attentifs aux enjeux de ces élections. Des questions essentielles, telles que le respect de nos droits et l’accès aux terres et aux ressources pourraient être compromises par des enjeux électoraux. Je pense notamment à certaines promesses faites récemment aux régions. Il est trop facile d’être généreux avec des terres et des ressources que les Premières Nations n’ont pas cédées.
Non au statut quo
C’est pourquoi, sans prendre position pour aucun parti, les Premières Nations se feront entendre pour avertir tous les partis politiques que le statut quo n’est plus acceptable et que le prochain gouvernement du Québec devra revoir en profondeur sa politique autochtone, notamment à l’égard de la gestion du territoire et des ressources. Nous sommes en droit de poser des questions aux chefs de parti et d’exiger des réponses claires et engageantes de leur part.
Est-il nécessaire de rappeler qu’en 1983, le gouvernement du Québec a adopté des principes reconnaissant les Nations autochtones et la nécessité d’établir des relations harmonieuses avec celles-ci. Deux ans plus tard, en 1985, l’Assemblée nationale du Québec a adopté une résolution reconnaissant officiellement l’existence des Nations autochtones et le droit à leur culture, langue et traditions, en plus du droit de participer à la gestion de la faune et au développement économique de leurs terres. Ce que l’on jugeait insuffisant à l’époque s’est avéré une politique trop audacieuse pour les gouvernements successifs qui ont tout fait pour diminuer la portée de ces principes.
En juin 2003, le premier ministre du Québec signait avec moi, à titre de Chef régional de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL), un Engagement politique mutuel créant le Conseil conjoint des élus. Ce Conseil, composé d’un nombre égal de représentants élus, s’est réuni à quelques reprises. Toutefois, ces rencontres n’ont pas permis d’atteindre les objectifs fixés, notamment celui convenu dans l’Engagement politique mutuel de « progresser dans une meilleure connaissance du point de vue de chacun ». Depuis, plusieurs conflits se sont cristallisés ou sont apparus. Ces conflits, entre des communautés autochtones et le gouvernement du Québec, reposent dans une forte proportion sur des questions de juridiction, notamment à l’égard de la gestion des terres et à l’accès aux ressources.
Il est inconcevable que les peuples autochtones du Québec doivent encore et toujours se battre pour que leurs droits soient respectés et appliqués. Il est urgent que les choses changent, spécialement au niveau des relations politiques entre le Québec et les Premières Nations, ainsi que dans la participation des Premières Nations dans la gestion des territoires et des ressources naturelles. Pour ce faire, et dans un objectif de sensibiliser les partis politiques, les candidats, et la population québécoise, l’APNQL rend public un document qui contient des principes et des enjeux qui méritent une attention particulière pendant la présente campagne électorale québécoise. Ce document se veut un appel ultime aux politiciens québécois, afin que le Québec adopte rapidement une nouvelle orientation à l’égard des Premières Nations. Par-dessus tout, il est essentiel que chacun des chefs de partis réalisent l’importance de ces enjeux et qu’ils se prononcent sur leur vision de la relation future entre le Québec et les Premières Nations.
Il n’est jamais bon, en démocratie, de nier l’évidence. Les Premières Nations du Québec, sont des peuples égaux à tous les autres peuples du Monde. Elles forment des nations distinctes, possédant leur propre histoire, leur culture et leurs règles de gouvernance. Or, les accommodements consentis, depuis 400 ans, par les Premières Nations aux nouveaux arrivants ont depuis longtemps atteints des proportions déraisonnables. Il est temps que l’on renouvelle la relation.
À la population québécoise, particulièrement celle située dans les régions ressources, nous souhaitons faire mieux connaître nos positions à l’égard du développement du Québec. Les Premières Nations ne sont pas contre les projets de développement, mais elles sont pour un développement harmonieux du territoire, respectueux des droits des Premières Nations et des principes de développement durable.
Aux chefs de partis et à leurs candidats, rappelez-vous que le développement du Québec ne pourra se faire sans le concours des Premières Nations. Celles-ci sont dorénavant incontournables pour l’avenir du Québec.
Bonne campagne à toutes et tous!
Ghislain Picard
Chef régional

Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador


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