Le livre rouge du Parti libéral

Reste le chef

Le chef à qui "on" ne serre pas la main...


Le Parti libéral reprend une autre fois cette stratégie adoptée à l'élection de 1993 qui s'était révélée si efficace: publier tôt en campagne électorale un «livre rouge» présentant à la fois la vision et la feuille de route d'un éventuel gouvernement libéral. Bonne idée! On voit mieux là où Michael Ignatieff veut aller.
Chef du Parti libéral depuis ans, Michael Ignatieff naviguait tantôt à gauche, tantôt à droite, parfois au centre. Loin d'être lui-même un homme de gauche, il cherchait ses repères dans un parti qui les avait perdus à la suite de deux amères défaites. Nouvelle élection oblige, il a choisi de revenir aux valeurs traditionnelles de son parti. Et s'il donne un solide coup d'aviron à gauche, c'est pour mieux le situer au centre.
L'usage veut que les élections se gagnent au centre, là où est la majorité des électeurs. Une majorité formée essentiellement de gens de la classe moyenne dont les besoins se résument simplement: le logement, l'éducation des enfants de la garderie à l'université, des systèmes de transport fonctionnels, des emplois, des régimes de retraite, bref tout ce qui permet à une famille de vivre raisonnablement et d'envisager l'avenir avec confiance. Tout cela se trouve dans ce document.
La stratégie famille de Michael Ignatieff consiste d'abord à récupérer cette partie de l'électorat perdue ces dernières années aux mains du NPD. Et comme d'autres chefs libéraux avant lui, il ne se gêne pas pour piger dans le programme néodémocrate, reprenant à son compte des propositions telles que la rénovation écoénergétique des maisons et les subventions au logement social.
Face au Parti conservateur, l'objectif est au contraire de marquer la différence. Il met donc en avant des propositions, généralement progressistes, à mettre en oeuvre immédiatement, plutôt que dans un horizon défini par l'atteinte incertaine du déficit zéro. Puis, il reprend aux riches pour donner aux moins riches. L'annulation de la réduction de 18 à 16 % du taux d'impôt des entreprises annoncée par le gouvernement Harper financera 8 des 11 milliards de ses engagements sur deux ans. Et, mesure nouvelle, il plafonnera la déduction fiscale sur les options d'achat d'actions qui favorisent les dirigeants de grandes entreprises.
La réduction du déficit sous un gouvernement libéral demeurera un objectif prioritaire. On n'oublie pas que ce sont les libéraux qui, les premiers, ont conquis le déficit zéro. Mais, contrairement aux conservateurs, ce ne sera pas un absolu. Un gouvernement Ignatieff aura les moyens de se faire interventionniste quand cela sera nécessaire. Ne craignons rien, le Parti libéral ne devient pas gauchiste. On retrouve tout simplement le Parti libéral que l'on connaissait déjà.
La distinction entre les visions libérales et conservatrices est établie de la bonne façon. Ce livre rouge devrait contribuer à redonner confiance aux électeurs envers le Parti libéral. Michael Ignatieff lève ainsi un obstacle. Demeurons néanmoins sur nos gardes, car ce nouveau livre rouge ne dit pas tout. Par exemple sur cette question, oubliée, de l'indemnisation de 2,2 milliards à verser au Québec pour l'harmonisation de la TPS et de la TVQ. Un oubli tout ontarien de la part d'un chef dont les conseillers principaux sont tous de Toronto.
S'il a en main un programme convaincant, reste maintenant à Michael Ignatieff à convaincre les électeurs de lui faire confiance comme futur premier ministre. C'est maintenant pour lui le principal défi de cette campagne.


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