Ce qu’on appelle le plan Marois est pour le moment une proposition, peut-être incomplète mais bonifiable. Il s’agit de savoir jusqu’où elle le sera, ce qui dépendra du sens dans lequel iront tous ceux qui peuvent influer sur son cours. Ceux qui la rejettent d’emblée ne peuvent pas contribuer à la transformer.
Beaucoup de ceux qui écrivent dans Vigile sont non seulement opposés à cette proposition mais également, et absolument, au Parti québécois auquel ils reprochent même ce qu’il a accompli. J’ai critiqué durement ce parti en plusieurs occasions et ne le regrette nullement, mais je refuse de renier tout ce qu’il a réussi ou correctement fait simplement parce qu’il a parfois erré ou perdu. Comme tant d’autres, je me souviens d’avoir souvent pensé comme lui à certains moments où il errait. Par ailleurs, je n’ai pas la faculté de me retourner automatiquement contre celui qui perd une bataille pour la seule raison qu’il l’a perdue.
Beaucoup de pistes proposées dans Vigile sont intéressantes, particulièrement celles qui visent à l’union (pas nécessairement l’unification) de tous les mouvements et partis indépendantistes ainsi que celles qui insistent sur la souveraineté populaire. Il n’en demeure pas moins que, pour le moment, cette union demeure un voeu pieux et le demeurera aussi longtemps que chacun, ou presque, poursuivra sa propre stratégie pour y arriver sans l’arrimer, avec les ajustements que ça suppose, à celles d’autres personnes ou d’autres groupes qui la souhaitent également. On pourrait presque dire que personne ne veut tirer le premier. Cette union ou cette convergence n’a de réalité, présentement, que dans la discorde, la non-communication ou la difficulté de communication entre ceux qui veulent la réaliser. Dommage.
Sur le plan pratique, il ressort que les seules organisations politiques en mesure de peser électoralement et même d’influencer notablement l’opinion générale demeurent, pour les indépendantistes, le Parti québécois, le Bloc et, peut-être, Québec solidaire. On peut le déplorer ou le regretter, mais ne pas vouloir en tenir compte équivaudrait à un suicide politique. Une vingtaine de mouvements et de partis comptant au plus, en moyenne, quelques centaines de membres, cela équivaut à une vingtaine de groupements sans moyen matériel de se faire entendre de la population en général et donc condamnés à n’exercer aucune influence publique tirant à conséquence. Il faut bien sûr des lieux assurant les communications entre indépendantistes, dont Vigile constitue sans doute le meilleur exemple à la fois quantitatif et qualitatif, mais, bien qu’indispensable, cela seul n’assurera jamais une victoire électorale ou référendaire. On peut joyeusement dialoguer ou s’engueuler tous les jours, entre soi, sur un site web sans aucunement transformer le paysage politique québécois en termes d’appuis à l’indépendance.
En dernier ressort, même ceux qui, philosophiquement ou stratégiquement, ne sont aucunement d’accord avec ce que peut proposer le PQ mais n’abandonnent pas l’idée de l’indépendance sont condamnés, depuis longtemps, présentement et, selon toute évidence, pour plus longtemps que certains voudraient bien le croire, à voter pour ce parti. On peut, évidemment, décider sur le plan personnel que, dans cette condition, on renonce à croire l’objectif atteignable et on s’intéresse à autre chose, mais alors, logiquement, on se retire dans ses terres et on soigne son amertume sans tirer sur le pianiste et sans accuser ponctuellement les traîtres qu’on s’invente pour se consoler.
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[Lors de la même causerie, Parizeau a décortiqué un sondage complexe->20278] effectué récemment, d’où il ressort que, même si la majorité des Québécois préféreraient un État indépendant, les deux tiers croient que cela ne se produira jamais, confirmation éloquente qu’on leur a jusqu’à maintenant servi un argumentaire qui ne leur parle pas suffisamment parce qu’il ne répond pas vraiment à leurs interrogations et ne calme pas les doutes créés par la propagande fédéraliste. Leur attitude dépend probablement aussi, pour une part, du peu de vigueur et de persévérance avec laquelle certains combats ont été menés par les gouvernements péquistes successifs.
Je suis bien loin de condamner les groupes, par exemple le RRQ, qui réagissent ponctuellement aux coups fédéraux par des manifestations publiques de diverse nature. Je remarque cependant que les gestes et les critiques du RRQ envers le PQ ne l’empêchent pas, même lorsqu’il est malmené par le PQ, de maintenir, dans ce que j’appellerais une mésentente cordiale, ses liens avec ce dernier. Il y a peut-être là une leçon à tirer.
Conclusion? À chacun de tirer la sienne.. ou de me tirer dessus!
P.S. Je m’en voudrais de ne pas mentionner en la déplorant la réaction de Gilles Bousquet au PQ rentre-dedans, qu’il ne devrait pas confondre avec la moindre critique de son cher parti. Si nous n’avons même plus un confédéraliste (malgré lui indépendantiste... parfois) à nous mettre sous la dent les jours de grisaille, qu’allons-nous devenir? Allons, monsieur Bousquet, soyez charitable, revenez-nous!
Petit état préliminaire des lieux
Du PQ rentre-dedans à la rentrée du PQ
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6 commentaires
Archives de Vigile Répondre
11 juin 2009Monsieur Poulin, votre texte touche à l'essentiel. La démarche PQ est la leur et démontre un certain esprit d'ouverture vers le pays.
Nous devons, nous, le peuple, travailler TRÈS fort à créer un effet de masse critique crédible, coordonné et dynamique. Les termes "référendum" et "crises" sont accessoires, voire secondaires. Ce qui importe, c'est de maintenir une attitude proactive, militante.
Nous sommes une vingtaine d'investisseurs à avoir créé "L'Indépendante", un produit brassicole qui vise un seul objectif: faire la promotion du Québec, un nouveau pays pour le monde.
Oui il faut un discours, une réflexion. Il faut également être dans l'action. C'est pour cette raison que nous avons supporté et appuyé la marche vers l'indépendance du 24 mai dernier, marche organisée par des jeunes "alignés" sur l'indépendance nationale.
Jacques Leduc,
L'Indépendante
Raymond Poulin Répondre
11 juin 2009Bien sûr qu’il ne faudrait qu’un vote gagnant, monsieur Bertrand, le tout est d’y arriver. Quant aux votes unanimes dont vous parlez, ils auraient pu être utiles, en tout cas au moins un aurait pu être utile, si l’un de nos gouvernements successifs s’en était prévalu pour foncer et agir en dépit d’Ottawa, mais il aurait fallu pour cela que ce gouvernement soit préparé, et ait préparé la population, à affronter sereinement la tempête qui aurait suivi. Une population qui ne sent pas son gouvernement droit dans ses bottes, surtout si elle est encore colonisée mentalement, ne suit pas.
Robert Bertrand Répondre
11 juin 2009Dans cet esprit de l'état des lieux.
Au cours des 5, des 10, des 15 dernières années, combien de votes unanimes à l'Assemblée nationale face aux avancées de l'autre Pays ?
Qu'ont donné tous ces votes unanimes ?
Quelqu'un peut nous faire les archives de ces votes unanimes et les résultats que cela a donné ?
Un des derniers votes unanimes : sur les Plaines, sur la parcelle de terrain appartenant à Ottawa ?
Que pourrait ajouter un référendum parcellaire gagnant ? 85M$ de nous dire MONSIEUR Parizeau.
Faisons état de tous les votes unanimes. Parlons-en pour se convaincre que rien ne fait reculer nos adversaires. Combien d'autres votes unanimes faudrait-il ajouter ? Contentons-nous, ajoutons-en, autant qu'il est possible. Cela deviendra ridicule au point qu'il n'y aura qu'une seule voix possible.
Il n'en faudra qu'un GAGNANT. Un VRAI qui clôturera tous les votes unanimes ! Celui du PAYS.
Tant les Conservateurs que les Libéraux ne veulent plus rien savoir du Québec et de ces votes unanimes de l'Assemblée nationale.
UN VOTE GAGNANT venant des citoyens fera toute la différence. Puisque rien d'autres fonctionne. VRAI ou NON ?
Raymond Poulin Répondre
11 juin 2009En effet, monsieur Bousquet, Parizeau est à la fois un visionnaire, un organisateur hors-pair et ce que j’appellerais un penseur concret, qui ne s’est jamais embarrassé de la langue de bois bien qu’il soit un grand technocrate. Je n’ai pas souligné un point important de son allocution aux IPSO : pour la énième fois depuis dix ans, il a martelé ce message au PQ : «Préparez-vous!» Aucune des grandes études techniques qu’il avait fait effectuer pendant son mandat n’a été actualisée depuis. Quant au brouillon de plan de Pauline Marois, c’est justement cela : un brouillon, ça s’éparpille dans toutes les directions. Si son brouillon et les études techniques nécessaires devaient demeurer en l’état jusqu’au retour éventuel du PQ au pouvoir, nous risquerions fort d’aller à l’abattoir une fois de plus, probablement la dernière pour longtemps, et très probablement la dernière tout court pour le PQ. Comme vous pouvez le constater, mon optimisme est plutôt modeste, je connais la propension des élites péquistes à retomber dans le ronron dès que se manifeste un regain de confiance à son endroit. À l’exception de l’époque Parizeau, il en a été ainsi depuis la moitié du premier mandat. C’est pourquoi beaucoup de militants ont abandonné le navire, ce qui n ‘a pas pour autant permis de construire une alternative plus crédible, et c’est la seule raison pour laquelle j’appuie encore ce parti malgré ma réticence. Je n’ai aucune propension à la mystique partisane.
Archives de Vigile Répondre
10 juin 2009Merci M. Poulin pour votre invitation de continuer et je le fais en écrivant : Vive Monsieur !
M. Parizeau est ouvert, il n'a pas la langue de bois, il sait ce qu'il faut faire et le dit sans s'inquiéter des grenouilles de bénitiers qui grouillent grenouillent et scribouillent.
C'est notre De Gaule, un homme d’État dont nous devrions tous être fiers et Charest, notre Sarkozy qu'il faudrait bien se défaire.
Archives de Vigile Répondre
10 juin 2009Monsieur Poulin.
Ce texte m'apparaît faire preuve d'objectivité, de mesure et de sagesse. Cela fait du bien et redonne de l'espoir dans la possibilité d'une union intelligente des forces souverainistes. Moi, il m'a fait du bien; il me remonte le moral. Merci!
Nicole Hébert